Faut-il inviter un gamer pour inviter les jeunes filles à étudier les sciences ? C’est ce qu’a fait Science Factor le 19 mars lors d’une journée soutenue par le ministère de l’enseignement supérieur. L’événement a permis à G. Fioraso de soulever la question de l’orientation des filles vers les sciences.
« Il faut que les femmes se disent que ces métiers sont pour elles« . Le 19mars, à l’occasion de la journée Science Factor, Geneviève Fioraso, ministre de l’enseignement supérieur, a redit la nécessité de changer les mentalités et d’inciter les filles à faire des études scientifiques et à entrer dans les métiers scientifiques.
Les chiffres lui donnent raison. Pas sur l’évolution globale des études de sciences. La France se tire assez bien du défi scientifique avec une progression de 2% (et de 70 000 étudiants) dans les filières scientifiques depuis 2004. Mais cela tient beaucoup aux formations de santé qui ont beaucoup augmenté. Les sciences fondamentales perdent des étudiants : 10 000 en moins depuis 2004. Surtout l’orientation des filles s’éloigne toujours des sciences. Si 55% des étudiants sont des filles, elles ne représentent que 27% des élèves des écoles d’ingénieurs, 28% des étudiants en sciences fondamentales, alors qu’elles sont 83% des élèves du secteur paramédical et social et 74% des étudiants en langues.
« Il y a aujourd’hui une grande prise de conscience de V. Peillon, N. Vallau-Belkacem et de moi-même qu’il faut agir vite et fort », nous a dit G. Fioraso. Pour elle, « ce sont les stéréotypes, les préjugés, le manque d’information et peut-être une pédagogie nouvelle » qui sont les leviers pour changer les choses. » Dès le plus jeune âge on doit faire un effort pour que les maths soient perçues non pas comme un vecteur de sélection mais comme quelque chose de ludique ». La ministre a aussi mis en cause les « peurs entretenues par les déclinistes » qui éloigneraient les jeunes des sciences. » On a pris des initiatives », explique-t-elle . « On a mis la parité partout à tous les niveaux. On a mis en place des référents femmes dans toutes les universités pour que les femmes quand elles ont l’impression qu’elles sont objet de discrimination puissent voir une référente. On a un master sur les études de genre. On soutient tout ce qui met en relation des scientifiques avec les jeunes ».
Justement, l’association Global Factor, qui a créé Science Factor, fait partie de ces organismes soutenus par le ministère de l’enseignement supérieur. Elle organise un concours et une rencontre qui incitent les collégiens et lycéens, et surtout les filles, à faire des sciences. Le 19 mars, une cinquantaine de collégiens et lycéens assistent à la rencontre. Mais ils viennent généralement d’établissements qui découvrent à cette occasion Science Factor.
Kamel Hamadeche est de ceux-là. Il enseigne la physique-chimie au collège Jean Jaurès de Pantin où il anime un atelier sciences avec des élèves de 3ème. L’atelier compte 15 filles et 9 garçons. Les élèves ont travaillé sur le CERN de Genève et ont eu l’occasion de le visiter. « Cet atelier m’apporte beaucoup », nous dit-il. « Des élèves curieux ne peuvent qu’être performants en physique-chimie. L’atelier les motive et il crée des liens de confiance. Cela apaise énormément les relations avec les enseignants ».
Venue du lycée Paul Eluard de Saint-Denis avec des élèves de 1ère S et de 2de, Anne Le Marrec est professeure de lettres classiques. « Je ne suis pas loin des sciences car les sciences reposent sur les savants grecs », affirme-t-elle. Elle aussi découvre Science Factor mais est certaine d’être à sa place. « On étudie les sciences à travers Platon, Aristote, Celse, Pline avec les élèves. Rencontrer des scientifiques cela fait écho au travail sur les textes et à la dimension humaniste de la démarche scientifique ».
Mais Science Factor a-t-il besoin des professeurs ? Le contact avec les jeunes se fait par le magazine Phosphore. L’association met en avant des chefs d’entreprise, homme et femmes, comme modèles de scientifiques ayant réussi leur vie. Autre modèle, Aymeric Pierre, un célèbre gamer peu tendre pour les conseillers d’orientation. L’industrie du jeu sera-t-elle plus forte que l’école pour changer les stéréotypes ?
François Jarraud