Premiers programmes, ceux de maternelle, en janvier, seconds en avril. Le calendrier du Conseil supérieur des programmes, présenté au Café pédagogique par son président, Alain Boissinot, est particulièrement chargé. Surtout le SCP veut impulser une réforme culturelle importante : passer des programmes disciplinaires au curriculum.
Le Conseil supérieur des programmes a des ambitions plus vastes que la seule définition des programmes ?
C’est un des aspects intéressants. Depuis la loi d’orientation la conception des programmes a évolué. Avant on définissait les programmes comme des contenus d’enseignement en lien avec un cadre horaire. Aujourd’hui l’idée c’est de réfléchir comme dans de nombreux pays en terme de curriculum, ce qui suppose une approche plus globale.
Le curriculum ce n’est pas que du contenu mais une réflexion sur les compétences, l’évaluation, les outils numériques, la formation professionnelle. C’est une nouvelle approche , une nouvelle manière d’aborder les questions au programme. Plutôt que remplacer les programmes, procédure qui lasse les enseignants, on réfléchit à une nouvelle méthode pour élaborer plus globalement et les accompagner mieux en terme de formation et d’outillage pédagogique et d’accompagnement.
Avec cette approche n’est-ce pas affronter à coup sur les lobbys disciplinaires ?
Historiquement on sollicitait les disciplines les unes après les autres et après on faisait une addition. Là on va renverser le problème. On va partir d’un cadre d’ensemble, par exemple un cycle, avec des champs disciplinaires plus larges que les disciplines traditionnelles. Après on déclinera en disciplines quand ce sera nécessaire.
N’est ce pas prendre le risque que les disciplines trouvent que les connaissances sont insuffisantes ?
Quand on exprime cette crainte on le fait par rapport à une ambition théorique. Mais à quoi ça sert si dans la façon dont on met en oeuvre ce programme dans la classe on s’éloigne de la théorie ? C’est pourtant bien ce que nous disent les enseignants. Ca ne sert à rien de fixer un niveau que les élèves n’atteignent pas. Ce qui compte c’est le niveau réel et que celui-ci ne diminue pas.
Le 6 décembre a été avancée l’idée d’heures pour les équipes enseignantes des collèges. Dans quel but?
On ne va pas prétendre définir pour chaque minute ce que font les enseignants. Il faut faire confiance aux équipes pédagogiques pour qu’elles construisent leur propre démarche. Le ministre a exprimé ce souhait qu’au collège les programmes ne saturent pas la totalité du temps scolaire.
C’est un retour aux 10% qu’on a connu dans le passé ?
Il y a eu plusieurs tentatives ces 20 dernières années : le 10%, les modules.. Elles ont rencontré de l’intérêt mais on a eu du mal à les faire durer. On va faire en sorte que ça réussisse. Et pour cela faire qu’il n’y ait pas une trop forte pression sur les enseignants .
Cette nouvelle conception va-t-elle permettre à l’Ecole de mieux lutter contre les inégalités ?
Bien sur. Lutter contre les inégalités scolaires ça passe par une réflexion entre programme théorique et ceux suivis en classe. Les futurs programmes vont donner aux enseignants la capacité de mieux s’adapter aux élèves réels.
Quel calendrier pour la mise en route des nouveaux programmes ?
C’est un calendrier ambitieux. La première échéance c’est les textes pour la maternelle. On a un constat partagé sur elle et on veut aller vite. Le projet de programme sera prêt en février. Ensuite on s’attaquera à la redéfinition du socle commun ce qui donnera des orientations pour les programmes du collège. Ce sera fait en avril.
Au sein du CSP vous avez constaté des divergences ?
Il y a des sensibilités différentes. Mon sentiment c’est qu’on est dans une période où on éprouve le besoin de sortir des querelles. Tout le monde est convaincu qu’on ne peut pas continuer à se battre entre partisans des connaissances et du socle et que le vrai problème c’est d’articuler ces approches. On va réussir à trouver le terrain d’entente.
Propos recueillis pas François Jarraud
Sur le site du Café
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