A la veille de la publication des propositions ministérielles sur le métier enseignant, la FSU a choisi, le 11 décembre, de parler éducation prioritaire et formation des enseignants. Deux thèmes qui sont bien au programme des réformes à venir. Mais qui obligent apparemment à se décentrer des préoccupations du moment. Dit plus trivialement, on marche à côté de ses chaussures. Mais assez vite on revient aux préoccupations du moment : parler éducation prioritaire c’est bien poser la question de l’avenir du métier et de l’Ecole…
Après les résultats de Pisa, « il est urgent de faire de l’éducation prioritaire une priorité ». Bernadette Groison, secrétaire générale de la FSU, partage avec Vincent Peillon le diagnostic de Pisa, une enquête « que nous prenons tout à fait au sérieux ».
Le ministre a lancé une réflexion sur l’évolution de l’éducation prioritaire depuis un an. Il a organisé des assises académiques en novembre 2013 et il devrait faire des propositions début 2014.0 Déjà quelques unes sont connues. Le ministère envisage de majorer les heures d’enseignement à hauteur de 1,1 h pour 1 h de cours. Concrètement cela aboutit à donner presque 2 heures supplémentaires aux enseignants du secondaire des établissements prioritaires et une demi journée à ceux du primaire puisqu’il semble que finalement ils bénéficieront également de la mesure. V Peillon a aussi annoncé qu’il affecterait les moyens en fonction de la mixité sociale et scolaire des établissements. C’est une façon d’entrer dans le débat de la carte scolaire et d’éviter la labellisation qui stigmatise les établissements.
Un fort taux d’insatisfaction chez les enseignants
Bernadette Groison a présenté une enquête réalisée auprès de 1752 personnels de l’enseignement prioritaire, plutôt des enseignants en poste depuis un moment. Elle met en évidence des conditions de travail difficiles : 70% des enseignants ne sont pas satisfaits, un taux qui monte à 82% en école élémentaire. On ne sera pas surpris que les enseignants posent les bonnes questions : celle des effectifs élèves et de l’équipe enseignante. Deux questions qui ramènent aux préoccupations sur le métier.
Comment diminuer le nombre d’élèves par classe ?
Pour les enseignants, la mesure la plus évidente pour améliorer le niveau des élèves de l’éducation prioritaire c’est diminuer les effectifs élèves. Cette opinion des enseignants a été confirmée il y a quelques années par deux économistes, Piketty et Valdenaire qui ont pu calculer que ramener à 15 élèves par classe les effectifs aurait un effet important sur la réussite éducative. Une autre mesure est défendue par les enseignants : il faut pouvoir travailler en équipe enseignante et équipe élargie. Ca pose indirectement la question de la stabilité des enseignants qui est l’autre grand problème de l’enseignement prioritaire.
Oui mais comment faire ? Piketty et Valdenaire proposaient d’augmenter les effectifs dans les beaux quartiers pour pouvoir les baisser en Zep. Pour la FSU la situation est déjà tellement dégradée partout que la solution réside dans l’embauche de nouveaux enseignants. « On se félicite des 60 000 postes », explique B Groison. « Et du choix de rétablir la formation des enseignants. C’est une bonne chose mais les nouveaux postes vont là alors qu’on en a besoin pour l’enseignement prioritaire. Au regard des besoins il faut davantage de postes. « « Il faut augmenter les poste smis aux concours pour apporter un sang neuf », estime Frédérique Rolet, secrétaire générale du Snes. « Or les concours 2014 ne permettront que le remplacement des départs en retraite ». Sébastien Sihr, secrétaire général du Snuipp, prend en exemple les enseignants surnuméraires du « plus de maitres que de classes ». 900 ont été installés en 2012.Ils ne sont que 300 en 2013. C’est donc le plafond des 60 000 postes promis par F Hollande que la Fsu entend faire exploser.
Comment stabiliser les équipes ?
L’autre sujet c’est la stabilité des équipes. La Fsu veut qu’il y ait une amélioration des conditions de travail, de la formation continue et des bonifications d’ancienneté. La pondération d’1,1 heure pour 1h de cours, proposée par V Peillon, lui semble une bonne chose. Le Snuipp voudrait être certain que ce sera aussi valable pour le primaire.
Mais c’est poser aussi la question de la carte de l’enseignement prioritaire. Le syndicat veut mettre un terme au réseau Eclair dont « les fondements sont rejetés par les personnels ». V Peillon voudrait regrouper l’action publique que un nombre réduit d’établissements, probablement 300 collèges et les écoles qui leur sont rattachées. La FSU est favorable à une carte évolutive, incluant les lycées et L.P. Quant aux sorties du dispositif, la Fsu souhaite que l’on maintienne les avantages du personnel (la prime par exemple) jusqu’à leur départ de l’établissement.
Pas de pessimisme sur le métier
A la veille de la publication des décisions de V Peillon sur l’évolution du métier, B Groison se déclare « pas pessimiste ». « On n’est pas dans la rédaction des décrets mais juste de fiches », souligne F. Rolet. C’est dire qu’il y a beaucoup de flou dans la façon dont les orientations se traduiront. « On est satisfait de la stabilisation de statut rénové des enseignants, sans annualisation », poursuit-elle. « On souhaite que le ministère laisse du temps aux enseignants pour s’approprier les changements ». S Sihr estime que les efforts ne sont pas suffisants pour les directeurs. « Il faut qu’on arrive à mieux mobiliser sur ces questions ». Quelques jours après la publication de Pisa, la FSU insiste sur la nécessité d’un « budget ambitieux ». Se rapproche-t-on d’une solution pour les élèves de l’enseignement prioritaire ?
François Jarraud
Sur le site du Café
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