Qu’est ce qui fait de cette rentrée un événement ? Pour l’historien de l’Ecole Claude Lelièvre, « Oui, au moins pour deux raisons : la réduction de la durée de la journée de classe pour un cinquième des élèves de l’enseignement primaire, et la création de 6700 postes budgétaires ( »équivalents temps pleins ») à la répartition inédite. »
On est certes loin, avec seulement 22% des écoliers concernés, de ce qu’espérait le ministre de l’Education nationale (au moins 50%). Mais il faut saisir aussi que c’est la première fois que l’on s’attaque massivement (même si c’est loin d’être majoritaire) à la sacro-sainte journée de classe de six heures propre à l’école primaire française (alors que les durées des vacances, et leurs places dans l ‘année ont fait -elles- l’objet de multiples changements au cours des temps, et depuis longtemps..). On remarquera également que cette expérience »en vraie grandeur » va se faire dans des conditions très contrastées selon les départements (dans presque toutes les communes en Ariège ; dans quasiment aucune dans les Bouches-du-Rhône), et aussi bien dans des villes riches (dont Paris est l’emblème) que dans des villes pauvres (Roubaix ou Denain).
Deux grandes catégories d’emploi du temps se dégagent dans les organisations du temps scolaire décidées localement par les 4000 communes volontaires en 2013 (qui ont par ailleurs choisies presque toutes le mercredi matin travaillé) : soit l’allègement uniforme de chaque journée scolaire en arrêtant la classe plus tôt et en proposant des activités culturelles ou sportives ; soit la mise en place d’une ou deux demi-journées allégées dans la semaine avec des ateliers périscolaires d’au moins 1h15 à 1h30.
On peut envisager que la diversité des conditions et des options qui président à cette expérience en vraie grandeur sera de nature à aider les autres communes à »sauter le pas » en meilleure connaissance de cause pour la rentrée 2014. Il serait particulièrement affligeant qu’à terme on retrouve le bilan fait par l’Inspection générale en l’an 2000 (après quelques années de détermination libre des écoles primaires quant à leurs »rythmes scolaires ») : 96% toujours dans le principe traditionnel en France des six heures de classe, et 4% seulement aménageant différemment le temps scolaire dans le cadre d’une semaine de »cinq » jours… A partir de cette rentrée 2013, le temps est venu pour chacun de prendre ses responsabilités en la matière ; et cela aussi est inédit.
La création de 6700 postes est également l’un des faits marquants de cette rentrée. D’abord parce qu’elle vient après des années de réduction marquées par le non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite ( même si l’année dernière cela avait été un peu amendé par la mise en place in extremis d’un millier d’emplois non prévus). Ensuite et surtout parce que leur répartition rompt avec celle des créations d’emplois qui avaient lieu avant cette politique de réduction, mais qui allaient ( de façon peu ciblée par ailleurs) d’abord aux lycées, ensuite aux collèges, et en dernier lieu aux écoles.
Dans le premier degré : 3000 postes pour améliorer le remplacement et permettre la mise en place des dispositifs »scolarisation des enfants de moins de trois ans » et »plus de maîtres que de classes ». Dans le second degré 3700 postes, en priorité pour les collèges (en particulier ceux en difficulté ). On est dans la droite ligne de l’application de la loi d’orientation (et de »programmation », une nouveauté inédite elle aussi) votée en juillet dernier pour « refonder l’école », en privilégiant ses »fondements » (l’école obligatoire ; et d’abord le primaire, avec son école maternelle).
Claude Lelievre