La première fédération de l’éducation manifestera le samedi 6 avril. Pour la première fois les enseignants du secondaire rejoindront ceux du primaire dans un mouvement qui conteste la politique gouvernementale. Quelques jours après son congrès c’est un tournant pour la FSU. C4en est un aussi pour un gouvernement qui a misé sur l’éducation. Bernadette Groison, secrétaire générale de la FSU s’en explique.
« Les élèves et les jeunes ont besoin d’une vraie refondation du système éducatif » déclare l’appel de la FSU. « Il est temps d’assurer une amélioration des conditions de travail et de rémunération des personnels, de mettre un terme à la crise de recrutement, en rupture avec les politiques éducatives précédentes… Malgré des avancées dans le projet de loi d’orientation et de programmation pour l’Ecole soumis au Parlement (créations d’emplois, rappel des valeurs qui doivent fonder l’Ecole, priorité à l’école primaire…), des manques ou des continuités avec les politiques précédentes ne permettront pas les transformations nécessaires ».
C’est que l’appel à manifester de la FSU brasse large. Il demande » des mesures concrètes permettant aux enseignants comme à l’ensemble des personnels de l’Education d’exercer encore mieux leur métier au quotidien » ou « une amélioration des conditions de travail de tous les personnels ». D’autres points renvoient à des manques déjà fléchés dans la politique gouvernementale : la relance de l’éducation prioritaire qui tarde à se faire ou la revalorisation. D’autres encore semblent mystérieux ainsi quand la FSU demande « la création de postes ».. Bernadette Groison s’en explique.
Vous lancez un appel pour une manifestation nationale le 6 avril. Pensez-vous être rejoint par d’autres organisations ?
Nous avons proposé notre appel à d’autres fédérations mais aucune n’a souhaité s’y associer. Bien sur cela reste ouvert.
Dans votre appel vous demandez des créations de postes. En plus des 60 000 promis par F. Hollande ?
On se félicite de la décision gouvernementale de créer 60 000 postes. C’est une bonne chose. On ne demande pas davantage de postes. Mais il faut déjà que ces recrutements aient vraiment lieu. On veut aussi que leur implantation soit réussie.
Vous êtes inquiète à ce sujet ?
La presse dit qu’il n’y a plus de crise du recrutement. Mais je reste inquiète car il y avait un manque de candidats à certains concours et je ne suis pas certaine que l’appel d’air créé par l’annonce d’ouverture des concours suffise. De toutes façons il ne fait pas se mentir. Même si on arrive à recruter, le métier d’enseignant a été très abimé. Les conditions de travail, de rémunération ne sont pas satisfaisantes. Il faut d’abord régler ces questions. Il faut voir comment on peut aider les étudiants à entrer dans le métier et ne pas considérer que tout est réglé.
Vous pensez que dans la situation actuelle une revalorisation est possible ?
On la demande. C’est une question de choix budgétaire. Evidemment ca sera difficile avec le budget actuel en dehors de quelques mesures catégorielles. Mais le gouvernement doit entendre que pour rendre le métier d’enseignant attractif il va falloir revaloriser les salaires. On n’y échappera pas.
On peut avoir à la fois davantage de postes et un meilleur salaire ?
Dans le contexte actuel c’est difficile à porter. Mais un pays qui veut regarder son avenir en face doit voir comment il traite ses enseignants. D’après l’OCDE en France le salaire des enseignants a diminué de 13% en 10 ans alors que partout ailleurs il a augmenté. C’est donc une histoire de choix. Si l’éducation veut recruter du personnel qualifié il va bien falloir qu’elle revalorise les salaires.
L’appel critique la décentralisation. Mais n’est -elle pas un bon outil pour rénover l’éducation ?
L’éducation nationale doit se rénover par elle-même. Evidemment l’Education nationale doit travailler avec les collectivités territoriales, notamment les régions. Elle doit trouver les cadres de travail pour cela. Mais nous n’acceptons pas le transfert de personnels dans la formation professionnelle ou l’orientation. La formation professionnelle doit rester une prérogative de l’Etat. Sinon on craint qu’à un moment ou l’autre on bascule dans l’adéquationnisme. Les jeunes peuvent avoir envie de mobilité. Il faut donc que les formations qu’on leur propose ne soit pas seulement en rapport avec l’emploi local.
On a l’impression d’un net durcissement de la FSU depuis quelque semaines. C’est le résultat du congrès ?
Il n’y a aucun changement dans notre manière de faire du syndicalisme. On continue à participer aux chantiers ouverts par le ministère par exemple sur le collège ou l’éducation prioritaire. On a participé à la concertation sur la loi d’orientation. On veut la refondation de l’Ecole. C’est une avancée mais qui ne va pas assez loin et qu’il faut corriger. Il faut permettre à cette loi d’aller jusqu’au bout mais avec les personnels. Le personnel doit être associé.
Votre manifestation ne sera pas une manifestation d’opposition ?
Ce sera une manifestation d’opposition sur certains points. On peut à la fois dire ce qui ne va pas et reconnaitre ce qui va. L’enjeu c’est concrètement ce qui va se faire pour permettre au personnel de travailler mieux pour la réussite de tous les jeunes.
Propos recueillis par François Jarraud