Pourquoi l’Homme a t’il toujours été intrigué et attiré par le Divin? Comment le représente-t-il ? Comment communique t-il avec lui et dans quel but? Quelle est l’impact de la religion dans les activités sociales? Quel rôle joue-t-elle dans certains conflits qui embrasent le monde? Autant de questions, et bien d’autres, qu’aborde l’exposition « Dieu(x); Modes d’emploi » en un spectaculaire parcours confrontant art sacré et anthropologie. Le Petit Palais, musée des Beaux-Arts de la ville de Paris, propose un voyage à travers les religions d’aujourd’hui, pratiquées aux quatre coins du globe. 160 chefs d’oeuvre issus du patrimoine spirituel de l’Humanité sont ainsi prêtés par les plus grands musées du monde. Sculptures, objets d’art, objets ethnographiques, peintures, livres précieux, côtoient maquettes, photos films et bornes interactives, pour tenter d’ expliciter la variété des croyances et témoigner de la richesse des cultes pratiqués.
Présentée de façon pédagogique, à partir de grands thèmes transversaux communs à toutes les religions, l’exposition concerne particulièrement les professeurs d’histoire et de lettres, mais également l’ensemble des enseignants dans le cadre de l’option histoire des arts. Le jeune public est également attendu pendant les vacances de Noël pour découvrir les « lumières » de l’exposition, symbole de renouveau dans toutes les religions, et participer à un atelier spécialement organisé sur ce thème.
Des pratiques actuelles du monde entier
L’exposition « Dieu(x); Modes d’emploi » s’appuie sur des pratiques vivantes actuelles. Elle a le mérite d’illustrer et de raconter, dans une dimension artistique exceptionnelle, comment le divin est appréhendé et pratiqué dans de nombreux pays du monde. Les trois religions du Livre, Judaïsme, Christianisme, Islam, mais aussi les religions asiatiques, et l’animisme africain, océanien, amérindien, sont illustrés et expliqués, à travers leurs différences et leurs ressemblances. Il n’y a pas de hiérarchie des cultes, l’exposition se veut un voyage à travers les religions, dans un soucis d’apaisement, et le parcours est bâti de manière pédagogique, afin de confronter art sacré et anthropologie.
Un parcours en neuf thèmes
Ce voyage spirituel est prévu en neuf étapes, « Divinités », « Cultes », « Passages », « Intercesseurs », « Corps », « Conflits et coexistence » , « Lieux » « Cycles », et « Au-delà ». Chaque section mêle une approche anthropologique et artistique. Ainsi selon les thèmes, l’art sacré cède la place aux multimédias, des maquettes d’architecture côtoient l’actualité des dessins de Plantu. Cette diversité permet une pluralité d’approches en concordance avec les multiples enjeux du thème universel que constitue le fait religieux. Mais chaque partie est longuement explicitée par un texte et des définitions.
Trois chefs d’oeuvre à l’entrée
Le parcours débute par la représentation du divin, en trois chefs d’oeuvre d’ères et d’époques différentes: la stèle d’Hazor représentant des mains jointes stylisées levées vers le ciel, la statuette « dege » du Mali, deux mains tendues implorant l’arrivée des pluies fécondes, et la chasse de Saint-Aignan du XIII ème siècle, où au contraire, des mains divines descendent vers les Hommes. La stèle d’Hazor, datant du XIIIème siècle avant JC est le chef d’oeuvre exposé le plus ancien.
Les visiteurs sont prêts à pénétrer dans la première section, où une multitude de divinités, toutes à la même hauteur, les accueillent.
Peut-on représenter dieu, ou plus largement le divin?
Peintures, sculptures, objets d’art ou ethnographiques, issus du patrimoine spirituel de l’humanité et prêtés par les plus grands musées, donnent des réponses à cette question, selon les différents systèmes religieux. Statues de Shiva, de Visnu, du Christ, côtoient des objets d’Afrique, d’Amérique, d’Océanie (drapeau Vaudou, masque de la Diablada…). L’Islam est représenté, entre autre, par la superbe inscription de Rachid Koraïchi, « Tu manques même à mon ombre ». Le musée d’Israël a envoyé l’oeuvre de Chagall, « Dieu donnant les tables de la Loi à Moïse ».
Comment communiquer avec le divin?
La section suivante présente une variété d’objets destinés à la communication avec le divin. Par leur diversité, ces objets témoignent de l’extraordinaire richesse de l’imagination humaine. Autels portatifs, retables, mirhab, icônes, mandalas, servent de support de prière et de méditation. Amulettes, fétiches, talisman, ex-votos protègent et éloignent les forces du mal. L’accès à la parole divine est représenté par des livres précieux, comme la Bible de Luther de 1524, et une synthèse des exégèses du Coran de Al Baydâw du XVème siècle, qui font partie des trésors exposés. Une borne interactive permet aux visiteurs de se documenter sur la Bible. A ne pas manquer, »Bouddha enseignant à ses élèves », une stèle prêtée par le British Museum. La place du catéchisme dans l’ensemble des religions, est évoquée par de nombreux manuels, mais également par un jeu de l’oie du XIXème siècle, une tablette coranique, et une Torah pour enfant.
Les rites de « passages »
Les rites de passage jalonnent la vie, de la naissance à la mort. Ils sont censés résoudre les crises de l’existence humaine. Quatre documentaires évoquent des rites de passage autour de quatre moments-clés de la vie: la naissance, le passage à l’âge adulte,le rite du mariage, le passage vers l’au-delà.
Les « intercesseurs »
La quatrième section est consacrée aux « intercesseurs » qui communiquent avec le divin et cherchent à rendre favorables les forces de l’au-delà. Une série de portraits les présente avec leur biographie dans des bornes multimédias. Il en existe deux grandes catégories, les représentants officiels nommés par la communauté,et les représentants élus directement par Dieu, comme les prophètes, les chamanes…dotés de pouvoirs spirituels. Leur vie et leurs fonctions sont diverses, guérisseurs, sorciers…
« Discipliner son corps »
Dans toutes les religions, le lien avec la religion passe également par le corps, lieu où luttent le sacré et le profane. Un film sur grand écran présente les différentes disciplines que les religions imposent (s’agenouiller, se prosterner, marcher sur des braises..) ainsi que les tenues vestimentaires qui identifient l’appartenance à un culte, la fonction ou le degré de piété.
La religion source de conflits?
La sixième étape de ce parcours pose la question du rôle de la religion dans les conflits. Elle présente le célèbre tableau de Nicolas Poussin, » La destruction du Temple de Jérusalem », qui après avoir appartenu à Richelieu, a quitté la France depuis trois cents ans. Il voisine avec trente ans de dessins de Plantu, qui plongent le visiteur dans l’actualité de ces dernières années, et illustrent la question de l’instrumentalisation des religions dans les conflits.
Les espaces sacrés bien délimités
La question du lieu sacré est explicitée à l’aide de photographies et de maquettes. Le visiteur est encerclé par d’innombrables photos de lieux saints prises aux quatre coins de la planète, et fréquentés par les femmes et les hommes d’aujourd’hui venus y vivre l’expérience du sacré ( églises, cour de mosquées, synagogues, temples, pèlerinages..). Les maquettes exposées présentent des projets récents de construction d’édifices religieux, en France, en Allemagne et au Japon.
Les jours de fête ponctuent le temps
Ils sont un lien supplémentaire entre l’humain et le divin. Une borne multimédia permet à tout un chacun de se documenter sur les différentes fêtes religieuses , elle facilite les comparaisons et les rapprochements, par exemple sur le jour de Pâques dans les diverses religions. Une présentation de masques et de costumes africains, dont trois venus du Burkina Faso, illustrent également le thème de la fête.
Et l’au-delà?
Avant de repartir, le visiteur peut écouter, par le biais de bornes interactives, comment huit de ses contemporains, croyants ou non, envisagent l’au-delà. Ces témoignages, filmés individuellement, le renvoie à son propre questionnement, et termine la promenade spirituelle.
Pour le jeune public
Le musée organise des visites conférences et des visites contées pour les adolescents et les adultes. Pour le très jeune public, des visites contées en famille avec enfants à partir de 6 ans, sont prévues sans réservation, les mercredis et les samedis, elles font revivre des récits mythiques et des légendes sur les religions du monde entier.
Des ateliers sont proposés aux enfants seuls, « Enquête divine » où les 8-12 ans partent à l’aventure et traquent des indices secrets cachés dans les oeuvres qui les mèneront au coeur des mystères des religions du monde entier. L’atelier « Lumières! » spécialement organisé pour les 6-11 ans, pendant les vacances de Noël, leur fera découvrir ce symbole de renouveau dans toutes les religions et les incitera à concevoir la leur, sous forme d’une empreinte graphique.
Les visites scolaires
Un dossier pédagogique est à la disposition des enseignants. Il a été conçu en partenariat avec le service éducatif du Petit Palais et le CRDP de l’académie de Paris. Il présente l’exposition et son intérêt pour les élèves, propose des activités de découverte pour les jeunes du CE2 à la Terminale, donne des conseils aux professeurs pour enseigner le fait religieux, enseignement transdisciplinaire qui reste délicat. Les nouvelles orientations des programmes de l’histoire des arts peuvent également inciter les enseignants du premier et du second degré, à découvrir l’exposition. Ils y trouvent matière à traiter une ou plusieurs thématiques imposées par les textes officiels. Une copieuse bibliographie est à leur disposition.
Les groupes scolaires du CE2 à la Terminale sont accueillis sur réservation uniquement, pour des visites libres avec leurs enseignants, des visites- conférence ou des visites littéraires. La visite- conférence d’1h30 présente un choix d’oeuvres dans chaque section de l’exposition. La visite littéraire permet de comprendre l’exposition et les oeuvres à travers les textes fondateurs mais aussi les histoires, les récits ou les contes qui font le charme des religions.
Béatrice Flammang
Le site de l’exposition » Dieu(x); Modes d’emploi »