Par Norbert Troufflard
Vous êtes enseignant ? Changez de discipline ! Mais nous ne vous dirons rien sur son contenu et ce que votre choix implique. Et faites le en moins d’une semaine. Ces propositions vous semblent folles ? C’est pourtant ce que vivent les enseignants de STI à cette rentrée.
En France on peut changer de discipline d’enseignement simplement en cochant la case d’un formulaire. C’est du moins ce qui arrive aux professeurs de STI dans l’académie de Nancy-Metz. Une circulaire rectorale du 6 septembre leur impose d’avoir à choisir avant le 17 septembre entre « architecture et construction », « énergie », « informatique et numérique », « ingénierie mécanique », technologie au collège ou encore, sans rire, « reconversion dans une autre discipline à préciser ».
Déqualification
Cette démarche résulte de la réforme de STI engagée en première l’année dernière, en terminale à cette rentrée. Les enseignants , appartenant à une trentaine de spécialités fort différentes, doivent se plier dans un moule où il n’y en a plus que quatre. « Il n’est pas prévu de table de correspondance entre les anciennes et les nouvelles disciplines », précise le document rectoral. Débrouillez vous donc !
Les enseignants de STI étaient souvent des « pointures » dans leur spécialité. C’est déjà leur identité qu’ils vivent dans cette mutation imposée. Mais c’est aussi leur avenir immédiat car l’évolution de la filière se traduit aussi en ouvertures et fermetures de sections et donc mutations. La fameuse croix mise un peu trop vite dans une case peut vous envoyer loin !
« Contre le mur »
« Comment vont être traitées les demandes, nous ne savons pas », nous confie Michel, un enseignant de cette académie. « Nous sommes tous contre le mur, le peloton d’exécution est en place, l’arme à l’épaule et il n’y a que des balles réelles ». « L’opacité » du mécanisme est dénoncée.
Au rectorat on ne nie pas le problème. « On a des appels tous les jours », nous dit Laurent Brault, doyen des IPR de l’académie et inspecteur en STI. Mais l’académie doit se plier aux instructions officielles et les demandes sont boostées par le calendrier des mutations.
« On fera attention »
C’est justement cette perspective qui fait peur aux enseignants. « On ne va pas faire la carte scolaire avec ces demandes », promet L. Brault. « On fera en sorte de garder sur place le maximum d’enseignants ». Une réunion avec les chefs d’établissement aurait préparé les décisions. « On connait nos troupes, on fait attention ». Si dans de nombreuses spécialités le choix d’une nouvelle est facile à faire, L Brault reconnaît que ce n’est pas le cas pour toutes. « Il reste 5 à 10% de cas difficiles ». Ceux là risquent de vivre en accéléré et la déqualification et l’immersion dans une autre discipline et la rupture avec leur établissement voire leur région. Dur à avaler !
Pour Laurent Brault la réforme a aussi du positif. « En simplifiant l’offre de formation on l’a rendu plus clair aux yeux des familles ». Résultat : après une chute d’un tiers en 5 ans, les effectifs se sont stabilisés en STI dans l’académie. Cette année on enregistre 1% d’élèves supplémentaires.
François Jarraud
STI : On a stoppé le mouvement de chute
Sur le site du Café
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