Atelier du matin,
atelier féminin…
L’atelier du matin s’ouvre à la petite
enfance et à l’école maternelle à travers 3 contributions de
chercheures. Jusqu’à ici, la parité a été malmenée, et les hommes
majoritaires à la tribune. Ici, rien que des femmes. La petite enfance
serait un domaine réservé ?…
L’animateur
de l’atelier est un homme, Michel Warren, de l’université de Paris
Ouest Défense, spécialiste de la scolarisation des jeunes enfants «
de moins de trois ans, comme on disait au ministère, plutôt des petits
de 2 ans ! La différence sémantique a son importance… »,
souligne-t-il.
Les trois interventions tissent des liens entre l’analyse du travail,
la formation, la transmission d’une part, quel que soit le métier
(famille d’accueil, éducatrice de jeunes enfants et enseignantes
d’école maternelle) et d’autre part le développement professionnel
conjoint que cela entraine, quelle que soit la place occupée (stagiaire
ou référente, conseillère pédagogique ou enseignante).
Nicole Chapon,
de l’université de Provence, montre, à l’issue d’entretiens et d’une
immersion dans des familles d’accueil, ce que l’on transmet aux enfants « placés ».
Rappelons que presque 300 000 enfants sont suivis par l’Aide Sociale à
l’Enfance, dont la moitié en famille d’accueil, sur 15 millions
d’enfants vivant en France. Elle fait d’emblée la différence entre la
parenté et la parentalité. Les familles d’accueil co-existent à côté
des parents naturels, les uns et les autres essaient de s’accepter
mutuellement.
A travers la co-résidence, le partage du quotidien dans l’espace privé
qu’est le logement familial, les familles d’accueil transmettent des
gestes, bien sûr, mais bien au-delà… Elles transmettent des rythmes
et des règles de vie collective, elles leur donnent une place dans leur
famille et au sein de la fratrie. Elles véhiculent des normes et des
valeurs qui deviennent structurantes pour que les enfants qu’on leur
confie puissent se (re)construire une place dans la société.
Valérie
Rémery, doctorante à l’université de Genève, a analysé les compétences interactionnelles des éducatrices de
la petite enfance dans l’animation d’activités de jeu, pour les rendre
visibles. «
Je filme les professionnelles en situation réelle de travail, je
conduit des entretiens d’auto-confrontation et des entretiens
pédagogiques entre la référente et la stagiaire qui va mener
l’activité. Et c’est ainsi que des ressources nécessaires au
développement de la professionnalité de stagiaires sont sémiotisées et
re-sémiotisées… »
Elle montre comment, dans le réel du travail, les situations
professionnelles rompent avec un déroulement strictement prescrit et
routinisé, et s’adaptent aux contraintes d’une gestion locale : ainsi,
lors d’une activité de jeu structuré (apprendre à jouer en utilisant
les règles du jeu des doubles avec 6 enfants de 2 ans), certains
enfants ne peuvent attendre leur tour et répondent spontanément avant
le joueur désigné. L’éducatrice référente intervient pour gérer cette
partie conflictuelle et la stagiaire peut continuer de s’occuper du
groupe.
«
Entre transmission et autonomisation, comment passer d’acteur à auteur de sa pratique » ? Catherine Lanaris
a étudié cette question dans la formation continue d’enseignantes
d’écoles maternelles au Québec, dans l’enseignement de la «
psychomotricité » (chez nous les activités physiques et sportives
pratiquées en maternelle). Le partenariat serré entre les chercheures,
les conseillères pédagogiques et les huit enseignantes volontaires, une
formation filée et longue a permis de faire évoluer les pratiques
enseignantes. Alors qu’au début de cette formation, les enseignantes
sont demandeuses de « recettes » pour fonctionner rapidement, du
contenu théorique prêt à consommer (clé en main), les postures se
différencient au fur et à mesure de l’avancée de la formation.
Certaines adoptent une posture passive, avec des difficultés à entrer
dans les réflexions proposées, quand d’autres sont prêtes à
expérimenter des activités et acceptent de cheminer avec les formateurs.
Alors, comment change-t-on de posture ? Ces enseignantes se rendent
compte qu’une pratique n’est pas une reproduction, les connaissances
prennent sens et elles s’emparent des outils.
« On navigue toujours entre transmission et autonomisation, entre
continuité et rupture. Mais les conditions du changement de pratiques
passent par de l’engagement personnel. », dit Catherine Lanaris.
Mais elle ne disent pas ce qui le provoque…