Publié le 24 janvier, le « Manifeste de l’école catholique au service de la nation » veut peser sur le débat éducatif. « Le système éducatif doit faire l’objet d’une réflexion renouvelée aussi bien sur les objectifs qu’il se fixe que sur les moyens qu’il se donne », affiche le manifeste. « L’Enseignement catholique a décidé de participer à cette réflexion en mettant en avant les leviers sur lesquels il lui paraît indispensable d’agir pour réussir l’école de demain ». Le texte affiche des choix : autonomie des établissements, évaluation des enseignants par le seul chef d’établissement, évaluation régulière des acquis des élèves. Imprécis sur bien des principes, le Manifeste entre dans des détails de gestion quand, par exemple, il parle de « globalisation de la DHG ». Nous avons demandé à Eric de Labarre, secrétaire général de l’enseignement catholique, des éclairages sur plusieurs points. Par exemple, l’annualisation des services…
L’enseignement catholique se sent il menacé en cas de victoire socialiste aux élections ?
La crainte de l’avenir n’est pas dans le tempérament de l’Enseignement catholique et de ses responsables. Peut-il d’ailleurs en être autrement pour des personnes qui ont vocation à accompagner et à préparer des enfants et des jeunes dont nul ne peut dire ce que sera leur avenir et ce que sera le monde dans lequel ils vivront. Nous abordons donc la période qui s’ouvre avec confiance, sûrs que notre contribution originale à l’intérêt général sera reconnue et que la complémentarité quantitative et qualitative de l’enseignement public et l’enseignement privé associé est une garantie et une des clés du renouvellement du système éducatif français. L’opinion publique, les parents d’élèves en particulier, souhaite à plus de 85% (sondage CSA décembre 2009) que l’équilibre actuel, tel qu’il a été trouvé dans le cadre de la loi du 31 décembre 1959, soit maintenu et que le choix de l’école puisse être fait et même conforté sans discriminations financières entre les familles. Quel que soit le choix fait par le peuple français dans quelques semaines, nous apporterons nos savoir-faire et notre façon particulière d’aborder l’acte éducatif aux futurs responsables de notre pays.
Le Manifeste milite pour l’autonomie des établissements et même une contractualisation des établissements publics. En quoi favoriserait-elle la réussite scolaire des élèves ? En quoi faciliterait-elle la gestion des établissements ?
Nous pensons en effet que l’établissement scolaire est le bon niveau et le contrat la bonne formule. L’établissement est le bon niveau, parce que c’est le lieu dans lequel on peut le mieux s’adapter aux besoins spécifiques d’un territoire éducatif ; chacun comprend bien que les exigences ne sont pas les mêmes dans une école d’un quartier résidentiel et dans une école d’une banlieue défavorisée. Il est donc nécessaire que les équipes éducatives sous la responsabilité d’un chef d’établissement plus animateur que gestionnaire disposent de la latitude nécessaire pour inventer les modalités d’apprentissage qui conviennent aux circonstances locales.
Le contrat est le bon outil, parce que la contrite n’a jamais été le moyen de faire progresser quelque système que ce soit. Avec le contrat, on dispose du moyen de mobiliser les établissements et leurs équipes autour d’un projet. Pour nous, la clé de la réussite est la mise en œuvre du triptyque : confiance / liberté / responsabilité.
Le Manifeste se présente comme une réponse à la situation budgétaire. Où en sont les négociations avec le ministère sur l’annualisation et la marge de gestion demandée par rapport aux horaires officiels ?
Le Manifeste est bien autre chose qu’une réponse à un problème conjoncturel résultat de la situation budgétaire. Il s’efforce de dire notre façon d’organiser un système éducatif ayant pour seul objet de la réussite de chaque élève. Ceci étant, quelle serait aujourd’hui la crédibilité de propositions qui ne tiendraient pas compte du contexte économique et budgétaire ?
L’une des manières de gérer de façon plus efficace les moyens publics mis à la disposition des établissements est sans doute de permettre une plus grande souplesse dans leur utilisation. Cela s’inscrit encore dans le cadre du renforcement des responsabilités locales. Les besoins ne sont pas identiques partout et il paraît donc logique de laisser, dans un cadre de règles générales, une marge de manœuvre dans l’usage des enveloppes budgétaires allouées aux établissements. Une des façons de faire est de considérer que l’enveloppe de moyens d’un établissement est arrêtée annuellement et non de façon hebdomadaire. Nous espérons des avancées ce chantier pour la rentrée 2012.
Le Manifeste est contre « l’uniformité » des parcours. Etes vous favorable comme l’UMP à une orientation précoce des élèves vers des filières de pré professionnalisation (des la 4ème par exemple) ?….
Nous défendons effectivement, depuis toujours et conformément à notre expérience éducative, plus qu’une individualisation des apprentissages, une véritable personnalisation des parcours. Si nous le faisons, c’est parce que nous estimons que l’avenir d’un élève n’est jamais définitivement joué. On voit bien par exemple que l’accès à l’enseignement supérieur se fait par des voies de plus en plus diverses. Nous n’avons pas attendus qui que ce soit pour porter la personnalisation comme une des clés de la réussite scolaire.
Pour favoriser cette personnalisation, nous estimons que la culture professionnelle doit être un élément de la culture générale dès le début du collège pour tous les élèves et non seulement pour les élèves rencontrant des difficultés d’apprentissage dans cadre scolaire classique. Pour entrer dans cette culture professionnelle, tous les élèves doivent participer à des activités qui les préparent à « faire » tout autant qu’à abstraire.
Le Manifeste partage plusieurs idées avec le programme UMP. L’enseignement catholique va t -il appeler à voter pour un des candidats aux présidentielles ?…
Personne ne peut nous faire le procès d’être à la remorque de qui que ce soit lorsque nous défendons les propositions que nous faisons, car nous les portons depuis aussi longtemps qu’existe l’Enseignement catholique. Que l’on vienne emprunter nos intuitions dès lors qu’elles peuvent être utiles à tous constitue aussi une façon de participer au service public de l’Education nationale. Ces idées ne sont ni de droite, ni de gauche ; elles sont un élément du patrimoine de l’école française ; nous souhaitons les partager avec tous.
Propos recueillis par François Jarraud
Liens :
Le texte du Manifeste
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L’enseignement catholique pour une réforme structurelle