Par Jeanne-Claire Fumet
L’Espace Watteau, à Nogent sur Marne, recevait ce mercredi 25 janvier les animateurs du dispositif Tick’art pour une présentation-découverte à l’intention des enseignants. L’occasion de faire le point sur la précieuse offre culturelle proposée par le Conseil Régional aux jeunes franciliens et à leurs professeurs, et de rappeler les multiples actions pédagogiques qui l’accompagnent. Rançon du succès, la petite équipe de Tick’art reconnaît dépasser toutes les prévisions de demandes ; l’adaptation du dispositif devrait en remodeler les conditions d’usage. En fin de rencontre, le directeur de l’Espace Watteau a dévoilé au public enseignant quelques moments forts du programme Jeune Public de la prochaine saison.
Un sésame culturel…
Tick’art, c’est un carnet de 6 tickets nominatifs pour des activités culturelles au choix : une entrée dans plus de 300 salles de spectacles, une entrée dans un festival, une place de cinéma dans une centaine de salles d’art et d’essai, un bon d’achat de 8 € dans les librairies partenaires et un ticket expos/patrimoine (+ un ticket invité) pour la visite d’un lieu d’exception du patrimoine culturel francilien. Financé par le Conseil Régional IDF pour les jeunes de 15 à 25 ans, lycéens, apprentis, suivis par une Mission locale ou en formation dans un organisme financé par le Conseil Régional , il coûte 15 € et doit être utilisé entre septembre et août. Chaque jeune peut bénéficier de 2 carnets dans l’année.
Devenu moyen pédagogique ?
Utilisé par environ 20 000 jeunes franciliens chaque année, en majorité âgés de 15 à 18 ans, les carnets sont souvent commandés par les établissements scolaires (environ 300) et une partie croissante d’entre eux en finance le coût (environ 40%). Signe que le dispositif a trouvé sa place dans les actions pédagogiques et les projets d’établissement ; mais l’objectif d’autonomisation des jeunes au regard de la culture est-il pour autant atteint ? Les enseignants et les formateurs restent des intermédiaires indispensables pour entraîner leurs élèves. Les jeunes gens n’acquièrent pas volontiers les carnets pour leur propre compte, ils répugnent à utiliser individuellement les tickets non utilisés dans le cadre du projet scolaire. Encore trop cher et pas assez motivant, semble-t-il.
Les paradoxes d’une réussite
Pourtant, le coût très modique recouvre un panel de possibilités impressionnant dans toute l’Ile-de-France ; mais paradoxalement, les diversité et la qualité des actions pédagogiques construites autour des événements, en développement constant depuis 2007, sont si attractives qu’il devient tentant d’accaparer le dispositif en soutien de projets pédagogiques, au détriment de la démarche d’apprentissage de l’autonomie préconisée à l’origine. Plus étonnant, l’équipe Tick’art se voit sollicitée par de fréquentes demandes de montages « à la carte » ou de parcours thématique « clé en main » – comme si la souplesse de l’offre limitait aussi l’initiative et la créativité du côté des enseignants. La confiance et la fidélité sont désormais bien installées, mais il reste à endiguer les risques d’une utilisation routinière. Au prix d’une disponibilité toujours plus grande des enseignants ? L’implication dans de tels projets, en effet, excède largement les obligations professionnelles des enseignants et se fait en général de manière bénévole.
Des actions culturelles croisées
Elise Goisneau, responsable du développement des actions culturelles, signale les nouvelles actions : des ateliers « Histoire au cinéma » et « Métiers du cinéma », conçus en collaboration avec les CIP (Cinémas Indépendants Parisiens), des parcours associant des partenaires issus de domaines artistiques différents (spectacle vivant et cinéma, ou lieu de patrimoine et théâtre, par exemple entre le Théâtre de l’Est Parisien et le MAHJ). « Nous avons réussi à donner à nos partenaires l’envie de travailler ensemble : ils n’en ont pas nécessairement l’idée ou la possibilité. Nous essayons de faire se rencontrer les équipes artistiques, parfois à la demande d’un enseignant, dont le projet peut être repris par les équipes partenaires qui le développent à leur compte et peuvent le proposer à d’autres classes. On arrive ainsi à de très belles réalisations, par la libre circulation des idées et des compétences.»
Et l’interdisciplinarité scolaire?
« Cette année, nous avons accompagné un groupe d’élèves de section technique sur un projet de mathématiques, économie et lettres. Le professeur d’économie a repris l’atelier sur les métiers du spectacle et a travaillé sur l’organisation économique de la compagnie, le professeur de lettres s’est penché davantage sur le côté artistique pur, et l’ensemble a donné une cohésion de projet et de classe vraiment remarquable, avec d’excellents résultats. Les élèves sont très sensibles à l’unité de l’équipe pédagogique. »
Un travail de longue haleine
« Pour limiter le nombre d’heures de cours supprimées par les actions culturelles, nous organisons des actions d’accompagnement en dehors du temps scolaire, le mercredi, le samedi, et même le dimanche. Mais l’assiduité des élèves est très irrégulière, beaucoup s’engagent puis choisissent de ne pas venir. C’est pourtant la condition de leur autonomie : qu’ils soient capables de se déplacer et de venir sur les lieux de spectacle pendant leur temps libre, sans contrainte scolaire. Mais il faudrait sans doute commencer plus tôt, pour leur donner de vraies habitudes de pratiques culturelles. Peut-être, si on parvenait à une coopération avec les collectivités locales, pourrait-on commencer dès le collège, ou pourquoi pas en primaire ? Cela permettrait en outre de mutualiser les moyens existants, qui sont très variés. Mais cela relève de l’ordre des décisions politiques qui ne nous appartiennent pas. »
Dans un contexte économique difficile pour la vie culturelle, la petite équipe de Tick’art attend les aménagements que devraient proposer sans tarder les nouveaux responsables du Conseil Régional, pour déterminer les orientations à venir d’un dispositif transformé par son propre succès.
Pour tout savoir sur le dispositif Tickart :
Contact : 01 41 85 09 00
La saison Jeune Public à l’Espace Watteau.
Nicolas Liautard, directeur artistique de l’Espace Watteau, a brossé rapidement les étapes du programme Jeune Public de la prochaine saison. En mars, L’oiseau bleu de Maeterlinck, par la Compagnie Quatre Ailes en résidence à Nogent, rassemblera sur scène acrobates, vidéastes et comédiens. Janvier verra une reprise de Blanche-Neige, dans la mise en scène de N. Liautard nominée aux Molière 2010. Ce spectacle muet, calme, énigmatique, présente une lenteur « à l’opposé des spectacles Jeune Public habituels. Il donne à imaginer bien au-delà de ce qu’il donne à voir », précise le metteur en scène, qui prcise que ces spectacles s’adressent à tous les publics, enfants comme adultes.
Le théâtre de Nogent accueillera également Les Voyageurs immobiles de Philippe Genty (danse, cirque, marionnettes) fin septembre et la clown Catherine Germain dans Le Sixième jour, avec la Compagnie l’Entreprise. A noter également, les entretiens entre Hervé Guibert et Zouck, l’inclassable et dérangeante comédienne des années 80, dits par une jeune actrice placée entre vidéo et univers de boxe. Enfin, Adel Hakim, dramaturge franco-égyptien, proposera l’interprétation de l’Antigone de Sophocle en langue arabe par des acteurs palestiniens.
Le site de l’espace Watteau :
Sur le site du Café
|