Par François Jarraud
- Partisans et opposants
- Différencier les filières sans établir de hiérarchie : le HCE juge la réforme du lycée
- Rénover le lycée : Le discours programme de Philippe Meirieu
- Luc Chatel lance la réforme du lycée technologique
C’est un Conseil supérieur de l’éducation tout à fait exceptionnel qui s’est tenu jeudi 10 décembre 2009. Il a duré longtemps (de 14h à 22h30). Mais la vraie exception c’est l’adoption des décrets et arrêtés par le CSE. Il faut remonter loin en arrière pour voir un projet ministériel adopté ainsi par les représentants de l’Ecole. Rappelons qu’en 2005 la loi Fillon avait obtenu 39 voix contre et 4 pour. En 2007 la réforme Robien sur le primaire comptait 41 contre et 6 pour. Une majorité s’est dégagée au CSE pour que la réforme se fasse. Retour sur cette réforme pas ordinaire.
La réforme de Luc Chatel
L’organisation générale du lycée est modifiée par la définition précise du conseil pédagogique. Ses membres sont désignés par le chef d’établissement sur la base du volontariat. Il comprend un professeur principal de chaque niveau d’enseignement et un professeur par champ disciplinaire (éventuellement ces deux fonctions conjuguées en une seule personne), le CPE, le chef de travaux, sous la présidence du chef d’établissement. Le conseil est consulté sur « la coordination des enseignements (par exemple la répartition du volant d’heures de mi-groupe), l’organisation de l’accompagnement personnalisé, les modalités de changement d’orientation. Car celui-ci est l’autre innovation forte de la réforme : sur demande écrite des responsables légaux de l’élève, un changement d’orientation peut être accordé par le chef d’établissement après avis du conseil de classe. Elle peut être liée à une remise à niveau. Enfin les décrets reconnaissent un rôle au professeur principal dans l’organisation de l’accompagnement personnalisé.
Orientation. Le ministre souhaite assurer « une meilleure orientation » et faire de la seconde une « vraie classe de détermination ». Cela passe par le choix en seconde de deux enseignements de spécialité d’1h30 hebdomadaire, l’un au moins doit être S.E.S. ou économie gestion. Les programmes seront ajustés. Certaines disciplines (LV3, langues anciennes, EPS, arts du cirque) seront maintenues au format actuel. L’information des élèves sera améliorée grâce à l’accompagnement personnalisé. Des stages en entreprise pourront avoir lieu dans l’année scolaire. Enfin la réorientation en première sera possible grâce à un tronc commun d’enseignement qui atteindra 60% de l’horaire. Il comprendra français, histoire-géo, LV1 et LV2, EPS et ECJS. Des stages passerelle permettront de changer d’orientation.
Accompagnement spécialisé. Chaque élève disposera de deux heures hebdomadaires d’accompagnement personnalisé de la 2de à la Tale. Il comprendra de l’aide, du perfectionnement ou des travaux en autonomie (mais les TPE sont aussi maintenus en 1ère) et aura lieu en petits groupes. Ce qui est nouveau c’est sa conception : l’équipe pédagogique définira un projet d’utilisation des 2 heures. En 2de et 1ère, l’accompagnement « est organisé de manière transversale ». En terminale il est mis en œuvre dans les enseignements de spécialisation. Un tutorat est proposé aux élèves volontaires. Il est assuré par des profs volontaires, des CPE ou des documentalistes.
Les langues. Les horaires de LV1 et LV2 sont globalisés pour faciliter l’enseignement par groupes de compétences. La série L devient « série de l’excellence linguistique ». L’enseignement est « complété par une approche plus culturelle des langues avec un enseignement de littérature étrangère en langue étrangère ». Possibilité d’apprendre 3 langues. Chaque établissement doit nouer un partenariat avec un établissement étranger.
La culture est « dynamisée » dans l’établissement. Un « référent culture » est choisi dans le lycée. Un enseignement d’histoire des arts a lieu dans tous les niveaux du lycée avec l’aide de tous les enseignants. Chaque établissement est invité à nouer des liens avec les établissements culturels.
La classe de seconde bénéficie de ces choix. Les élèves gardent une semaine bien chargée avec 23h30 de cours et 10h30 d’heures en groupe, soit 4h de français, 6 d’histoire-géo, 5h30 de langues (volume unique pour les deux langues), 4 de maths, 3 de physique-chimie, 1h30 de SVT, 2h d’EPS, 0,30 d’ECJS. A cela s’ajoutent 2 h d’accompagnement personnalisé et 2 x 1h30 d’enseignements d’exploration (dont au moins SES ou éco-gestion). Les autres enseignements d’exploration sont les SMS, biotechnologies, physique et chimie d laboratoire, littérature et monde contemporain, sciences de l’ingénieur, méthodes et pratiques scientifiques, conception d eproduits industriels, arts (danse etc.). Total 28h30.
En première le tronc commun atteint 60% de l’horaire. On a donc les mêmes horaires en français (4h), histoire-géo (4h), LV1 et 2 (4h30), EPS (2h), ECJS (0,30). En ES, l’enseignement de spécialisation concerne les maths (3h), les sciences (1h30) et les SES (5h). En S le niveau en sciences est renforcé, c’est ce qui explique que les maths ne font pas partie du tronc commun. On trouve 4h de maths, 6h de sciences. A cela s’ajoutent les TPE (1h) et , avec l’accompagnement on atteint 28h. En L, il y a 1h30 de sciences, 2h de littérature, 2h de littérature étrangère en langue étrangère, 3h à choisir entre arts, arts du cirque,maths, LV3, approfondissements langues, langues anciennes. Total 26h30.
La terminale voit un enseignement différencié. En S, on trouve 3h de philosophie, 4 de langues, 2 d’eps, 0h30 d’ecjs, 6h de maths, 5h de physique, 3h30 de SVT ou sc de l’ingénieur, 2 h de spécialité (maths, physique, svt, informatique et sciences du numérique). L’histoire géo est optionelle (2h). En ES, la philo passe à 4h, l’histoire géo garde 4h; LV1 et 2 4h, EPS 2h, Ecjs 0,30, maths 4h. L’enseignement de spécialité (1h30) concerne maths appliquées, sciences sociales. En série L, la philosophie passe à 78h, histore 4h, LV 1 et 2 en 4 h, eps 2h, ecjs 0,30, littérature 2h, littérature étrangère 1h30. Suivent 3h d’enseignement de spécilaité : arts, maths, approfondissement de langues, droit et grands enjeux du monde contemporain.
Qui y perd et qui y gagne ? L’histoire-géographie perd son enseignement obligatoire en terminale S (une option subsiste) ce qui fait grincer l’APHG mais l’enveloppe horaire a été augmentée en 1ère S de façon équivalente. Plus qu’une réduction horaire, c’est un éclatement que vivent les sciences économiques. La place de l’économie est renforcée mais pas forcément les SES et la sociologie est nettement mise à part en terminale. La baisse des horaires scientifiques en S, qui mobilise l’APBG, est réelle : 3,5 heures disparaissent en première. Mais c’est compensable par utilisation des heures de groupes globalisées qui sont plus importantes dans cette section.
C’est dire que l’opposition ou le soutien au projet de réforme se décide par rapport à deux questions plus profondes que des variations horaires inexistantes. La réforme considère que l’accompagnement personnalisé des élèves fait partie des missions des enseignants. Elle leur demande de développer leur professionnalité. Mais c’est surtout l’autonomie accordée aux établissements dans la gestion des moyens qui oppose partisans et adversaires. Elle permettra aux établissements de mieux adapter l’offre éducative aux besoins des élèves. Au risque de faire la différence.
Arrêté 2de
http://www.snes.edu/IMG/pdf/arrete-seconde-2.pdf
Arrêté terminale
http://www.snes.edu/IMG/pdf/cycle_terminal-2.pdf
Grille horaire
http://www.snes.edu/IMG/pdf/grilles-2.pdf
L’EPLE
http://www.snes.edu/IMG/pdf/ProjetEPLE-2.pdf
L’orientation
http://www.snes.edu/IMG/pdf/Projetorientation-2.pdf
Dossier : Réformer le lycée
http://cafepedagogique.studio-thil.com/lesdossiers/Pages/2008/2008_Ly[…]
Le nouveau lycée
http://www.education.gouv.fr/cid49667/vers-un-nouveau-[…]
Les modifications apportées par le CSE
Les votes se sont établis ainsi le 10 décembre au CSE. Le décret sur l’organisation du lycée (décret EPLE) a été adopté par 32 voix pour et 26 contre (12 abstentions et refus de vote). Le décret sur l’orientation a été adopté par 35 vois pour , 20 contre (13 abstentions). L’arrêté sur les horaires de 2de a eu 32 voix pour, 19 contre. L’arrêté sur les horaires de terminale et première a eu 22 voix pour et 22 contre (13 abstentions et 7 refus de vote).
Parmi les modifications apportées aux textes originaux nous soulignons celles-ci. Dans le décret EPLE, l’article 4, sur la procédure du vote de la répartition de la dotation horaire en conseil d’administration (CA), renforce le rôle du CA. La nouvelle rédaction stipule que « dans l’hypothèse où la première proposition relative à l’emploi des dotations en heures est rejetée par le conseil d’administration, la commission permanente procède à une nouvelle instruction avant qu’une nouvelle proposition soit soumise au vote du conseil d’administration. Le second vote du conseil d’administration doit intervenir dans un délai de 10 jours suivant le premier vote. Dans le cas où le conseil d’administration rejette la seconde proposition relative à l’emploi des dotations en heures qui lui est soumise, le chef d’établissement en qualité de représentant de l’Etat en arrête l’emploi ». Par rapport à la rédaction originale le poids du CA et de la commission permanente sont affermis. Pour le conseil pédagogique, la nomination en revient toujours au chef d’établissement mais il doit consulter les équipes pédagogiques : les profs auront leur mot à dire. Les délégués lycéens au CVL seront élus au suffrage universel.
Dans le décret sur l’orientation, l’accompagnement individualisé a été modifié à la demande de la FCPE. La nouvelle rédaction précise que l’accompagnement personnalisé prend la forme « d’activités de soutien, d’approfondissement et d’aide à l’orientation et d’aide méthodologique dans des conditions définies par arrêté du ministre chargé de l’éducation nationale et, le cas échéant, du ministre chargé de l’agriculture. Il prend notamment la forme de travaux interdisciplinaires ». Sont ajoutés « l’aide méthodologique » et les travaux interdisciplinaires, ce qui ouvre la voie à des travaux de type TPE en 2de et terminale. Le décret fixe un délai d’un mois au chef d’établissement pour motiver sa décision concernant une réorientation d’un élève.
Par ailleurs le tutorat « est proposé à tous les élèves pour les aider à construire leur parcours de formation et d’orientation ». La rédaction initiale prévoyait seulement « les élèves qui le souhaitent peuvent bénéficier d’un dispositif de tutorat ».
Les arrêtés sur les horaires de seconde, première et terminale, consolident les heures globalisées. L’enveloppe horaire laissée à disposition des établissements pour assurer des enseignements en groupe à effectif réduit est « arrêté par les recteurs sur une base (…) par semaine et par division, ce volume pouvant être abondé en fonction des spécificités pédagogiques de l’établissement ». La rédaction initiale prévoyait « une base moyenne (…) pouvant être modulée… « . Concrètement cela oblige le chef d’établissement à donner à chaque division (classe) son volume horaire et le rectorat à donner les moyens aux établissements qui perdent des élèves.
La particularité de cette réforme , c’est que Luc Chatel a réussi à obtenir le soutien critique d’une majorité des acteurs de l’Ecole : lycéens, parents mais aussi enseignants.
Une alliance parents – syndicats favorable à la réforme du lycée
C’est un événement important qui s’est produit le 27 novembre. Deux syndicats, le Sgen-Cfdt et le Se-Unsa, respectivement deuxième et troisième syndicat du secondaire, s’associent avec la première association de parents d’élèves pour soutenir, sous conditions, une réforme ministérielle.
Dans un communiqué, les trois organisations déclarent que « les annonces sur la réforme du lycée ouvrent des perspectives encourageantes pour les lycéens« . Ils citent notamment l’accompagnement personnalisé, qui « représente une réelle opportunité pour une meilleure prise en compte des besoins (des lycéens) », précisant qu’il se fait « sans augmentation de l’horaire des élèves, ce qui est dans l’intérêt des lycéens français, dont on connaît la très lourde charge de cours et de travail ». Autre point salué, « les enseignements d’exploration prévus en classe de seconde, si les programmes sont redéfinis dans le même esprit, devraient permettre aux élèves de mieux construire leur parcours ultérieur, dans un esprit de découverte et de curiosité, sans les enfermer dans une pré-orientation ». Ils sont en accord avec la mise en place du tronc commun en première : « sa création devrait permettre un décloisonnement des savoirs et des élèves. » Enfin ils estiment que « la possibilité offerte aux établissements, dans un cadre national fort et garanti à tous, de définir un projet pédagogique au service de la réussite de leurs élèves, est porteuse de dynamisme et de créativité ».
Fcpe et syndicats l’assortissent de réserves. Ils demandent « la tenue de journées banalisées dans tous les lycées rassemblant personnels, parents et élèves, dès janvier prochain, pour préparer la rentrée 2010 », la garantie du maintien des moyens attribués au lycée, des effectifs réduits pour les groupes de compétences en langues vivantes, un plan de formation des enseignants « cohérent avec les nouvelles missions que la réforme leur attribue ». Ces prises de position sont en rupture avec les autres syndicats sur de nombreux points : la priorité donnée aux lycéens, la croyance dans l’effet positif d’une certaine autonomie des établissements, l’acceptation de nouvelles missions par les enseignants.
Au même moment 7 syndicats se coalisaient contre la réforme dans une étrange alliance regroupant dans une opposition commune des organisations d’extrême gauche et de droite. Le Snes, le Snalc, le Snep, Sud, la CGT, F.O. et le Sncl Faen publiaient un communiqué commun estimant que la réforme est « inacceptable ». Ils récusaient l’autonomie des établissements estimant qu’elle conduirait « au développement des inégalités et à la concurrence entre les disciplines, voire entre les établissements », l’accompagnement personnalisé parce qu’il réduit les horaires disciplinaires, le tronc commun qui « permettrait l’augmentation des effectifs dans les classes ». Ils annoncent dès maintenant qu’ils se tournent vers les lycéens pour s’opposer à la réforme. L’échec répété des réformes du lycée a donc amené à cet éclatement du front syndical, que Xavier Darcos n’avait pas réussi à générer, dont les prémisses avaient été posées lors du vote sur la formation des enseignants cet été, et la confirmation donnée le 24 novembre.
Communiqué Sgen Se-Unsa Fcpe
http://www.cfdt.fr/rewrite/article/22886/zoom-sur/com[…]
Communiqué Snes, Snep, Cgt, FO, etc.
http://www.snes.edu/Le-projet-de-reforme-du-lycee-du.html
Parents et lycéens en soutien critique à la réforme du lycée
« Les lycéens ne sont pas intéressés par les débats purement disciplinaires ». Ces propos de l’UNL illustrent la position prise par les deux mouvements lycéens à un moment particulièrement critique pour la réforme de Luc Chatel.
Dans une déclaration commune, la Fcpe, l’UNL et la FIDL mettent en avant la dimension pédagogique. « Pour nous, la réforme doit être pédagogique » écrivent-ils. « En ce sens, l’instauration de deux heures d’accompagnement nous intéresse dans la mesure où elles ne se résument pas à de simples heures de soutien mais contiennent des accompagnements méthodologiques, de l’aide à la construction du projet d’orientation et des heures permettant des approches, projets et enseignements pluridisciplinaires type TPE.. . En outre, il reste indispensable d’affirmer que la pédagogie doit évoluer au lycée. Il ne doit pas être envisagé que les deux heures servent de « réparation » à la situation actuelle mais qu’elles soient bien une des manières de faire évoluer la pédagogie au lycée ».
A cette ambition, ils ajoutent d’autres vœux : associer les parents et les élèves à la réforme à travers le Conseil d’Administration des établissements, développer la démocratie lycéens, une promesse d’ailleurs de R Descoings. « Vos réponses à nos demandes seront de nature à préciser nos positions » terminent-ils. Ce qui laisse dans l’immédiat de l’air à Luc CHatel. L’UNL a fait savoir qu’elle serait présente au rassemblement organisé le 10 décembre, jour du vote de la réforme au CSE, « afin de demander au ministre de revenir sur la politique de suppression de postes… ainsi que sur la réforme de la formation des enseignants ». L’UNL ne soutient pas les anti-réforme.
La Peep est également gagnée par l’esprit pédagogique de la réforme. L’association « condamne les coporatismes disciplinaires » et demande « une refonte totale du système d’évaluation des élèves basé sur les compétences acquises et non plus sur les résultats ».
Lettre commune
http://www.unl-fr.org/index.php?option=com_content&v[…]
Communiqué UNL
http://www.unl-fr.org/index.php?option=com_content[…]
Pour le Se-Unsa, « on avance »
« Pour le SE-UNSA, qui milite depuis longtemps pour l’affirmation d’une logique de parcours en lieu et place de l’actuel cloisonnement des voies et séries, ces mesures dessinent de nouveaux horizons pour les lycéens. Pour peu qu’on y mette les moyens, le lycée pourrait enfin connaître des évolutions significatives. A tout le moins dans la voie générale, puisque le projet demeure muet sur la réorganisation des formations technologiques ».
« Des mesures positives » pour le Sgen
« Cette réforme n’est pas la nôtre mais elle comporte cependant quelques mesures positives même si elles sont trop partielles » déclare le Sgen-Cfdt. Le syndicat cite par exemple « la mise en place et la généralisation de l’accompagnement personnalisé, la mise en place du tutorat…, le développement de l’autonomie des établissements et la globalisation de certains horaires de groupes dans le respect d’un cadre national répondent à la diversité des publics, le renforcement des missions du conseil pédagogique ».
Le Sgen dénonce la réintroduction d’une option d’histoire-géographie en terminale S qui « ruine totalement le rééquilibrage affiché des filières… Dans l’esprit du ministère la filière S reste bien la seule filière d’excellence, la filière la plus généraliste avec le plus d’heures de cours et offrant le plus de débouchés ».
Communiqué Sgen
http://www.cfdt.fr/rewrite/article/23298/actualites/r[…]
Le SNPDEN « accueille favorablement » la réforme
« Le recours à l’initiative et à la créativité des acteurs locaux est enfin rendu possible » se réjouit le Snpden, principal syndicat de chefs d’établissement. « Il pourra se développer durablement dans le cadre d’une part de grilles nationales précises de ce qui est dû à chaque élève et d’autre part, d’une garantie, plusieurs fois réaffirmée, des ressources attribuées aux établissements… Même si certains aspects plus techniques de la réforme peuvent soulever des difficultés ponctuelles d’application, cette approche qui associe les garanties qu’apporte un service public à la souplesse d’application nécessitée par la diversité des conditions rejoint les attentes du SNPDEN ».
La question de l’histoire-géo en terminale S
Après l’UdPPC, l’APBG, l’Apses, voilà les historiens géographes au premier rang de la contestation anti-réforme. C’est d’abord un appel lancé par des historiens (Azéma, Kaspi, Rioux, Tulard, Stora, Winock etc.) avec A. Finkielkraut contre la suppression de l’histoire-géographie en terminale de la série S. « Au moment où le président de la République et son gouvernement jugent urgent de lancer un grand débat sur l’identité nationale qui doit mobiliser le pays, cette mesure va priver une partie de la jeunesse française des moyens de se faire de la question une opinion raisonnée grâce à une approche scientifique et critique, ouvrant ainsi la voie aux réactions épidermiques et aux jugements sommaires » écrivent-ils.
Luc Chatel se défend en rappelant que la suppression horaire en terminale est compensée par l’augmentation des horaires en première S et l’ouverture de deux options en L et… en terminale S. L’Histoire-géo reste au bac S mais l’épreuve est avancée en première. « L’histoire-géo va garder la place éminente qui a toujours été la sienne » affirme-t-il. L’histoire-géographie était absente des programmes de terminale scientifique (série C) avant 1976. Elle est aujourd’hui absente dans plusieurs séries technologiques.
Une voix s’élève pour dénoncer une « désinformation » ; celle du SE-Unsa, sous la plume de Claire Krepper. Elle estime que « l’histoire-géographie sort confortée du projet de réforme » compte tenu de la hausse de l’horaire en 1ère S et de la création d’une nouvelle option en terminale S.
Alors, si les horaires ne sont pas le problème c’est qu’il y a un autre enjeu. « La question sous-jacente, c’est celle de la place de la série S dans la formation » poursuit Clare Krepper. « Doit-elle rester la formation d’excellence polyvalente dont le programme de formation doit continuer à coloniser la totalité des formations du supérieur ? » interroge le Se-Unsa. « Ce qui se joue là, c’est la question de la formation des élites. Elites qui se projettent et défendent ce qu’elles jugent bon pour leurs enfants au détriment du bien commun et qui disposent des relais médiatiques pour le faire ». C’est peut-être pour cela que ceux-là même qui s’indignent de l’absence d’histoire-géo en terminale S n’ont jamais protesté contre son absence dans plusieurs séries technologiques.
L’argumentaire du Se-Unsa
http://www.se-unsa.org/spip.php?article1969
L’appel
http://www.lejdd.fr/Societe/Education/Actualite/Il-est-im[…]
Du côté des opposants…
Pour le Snes, « le ministre Luc Chatel fait le choix idéologique d’une transformation radicale de l’organisation du lycée général et technologique et des enseignements en voulant confier la gestion de plus du tiers des horaires aux établissements… De fait, à l’issue d’un simulacre de discussions, le ministre confirme les trois axes de son projet : autonomie, réduction des horaires disciplinaires, fusion partielle des séries générales dans un tronc commun ignorant par ailleurs superbement des pans entiers de la culture et ne résolvant pas la question essentielle des effectifs par classe ». Le Snes appelle à la grève le 24 novembre.
http://www.snes.edu/Reforme-du-lycee-pas-ca.html
La montée des lobbys disciplinaires
L’APMEP demande… davantage de mathématiques
« L’APMEP demande que, dans toutes les séries de toutes les voies, des dédoublements soient mis en place pour qu’une formation mathématique, intégrant l’utilisation des TICE, soit possible ». Dans un communiqué sur la réforme du lycée, l’Association des professeurs de mathématiques de l’enseignement public (APMEP) demande au ministre de renforcer les horaires de maths. En seconde, l’Apmep demande le maintien de 4 heures hebdomadaires « dont une dédoublée » (il s’agit en fait du module !) mais aussi « un des enseignements d’exploration », soit en fait un horaire augmenté d’une heure trente. En première, l’association souhaite que les horaires augmentent en S et en L et que les contenus ne soient pas uniformes d’une série à l’autre. Du coup, l’Apmep se dresse contre les heures d’accompagnement qui pourraient par exemple « être l’objet d’activités mathématiques ».
L’UDPPC juge la réforme Chatel « désastreuse »
« Le projet ne prévoit pas d’enseignement de culture scientifique pour tous et remplace en seconde des enseignements de détermination scientifiques et technologiques de 3h par un seul enseignement d’exploration de 1,5h » déplore l’UDPPC, association .d’enseignants de physique – chimie. « La structure proposée en première scientifique entraîne la perte de 4,5h d’enseignement scientifique : 1,5h en sciences physiques et chimiques (33 % de l’horaire actuel), 1h en sciences de la vie et de la Terre (25 %), 1h en mathématiques (20 %) et 1h de travaux personnels encadrés (50 %) » juge l’UDPPC. L’association déplore que « afin de permettre quelques réorientations marginales en première, le projet réduit la formation scientifique pour tous ».
Différencier les filières sans établir de hiérarchie : le HCE juge la réforme du lycée
Le 10 décembre, le Haut Conseil de l’Education a remis des « observations » sur la réforme du lycée. Parmi les idées avancées , la définition de compétences propres aux filières du lycée et une charge en règle contre les SES. Bruno Racine s’en explique.
« Une bonne articulation entre les différents maillons du système éducatif est essentielle pour le Haut Conseil. En amont, le socle commun définit les compétences attendues d’un élève à la fin de la scolarité obligatoire. Le Haut Conseil préconise que soient publiées les compétences dont le lycée permet la maîtrise ». C’est sans doute l’apport le plus important des observations du HCE que cette approche par compétences du lycée. « À ces compétences correspondraient des parcours dans l’enseignement supérieur, afin de diminuer les taux d’échec élevés constatés au cours des deux premières années » ajoute le HCE. » Le principal avantage de l’approche par compétences réside dans le fait qu’elle permettrait de différencier les filières les unes des autres, sans pour autant établir de hiérarchie entre elles » précise Bruno Racine, président du HCE, dans l’entretien qu’il nous a accordé.
Seconde idée forte de ce texte, le rappel de la nécessité de formaliser les passerelles entre enseignement professionnel et technologique. « La mise en place de ces passerelles est clairement affirmée par la rénovation de la voie professionnelle, notamment dans le cadre du lycée des métiers dont elles constituent l’un des objectifs majeurs ».
Mais ce sont les SES et , à un moindre titre, l’ECJS, qui sont dans le collimateur du Haut conseil. Il « approuve la mesure qui dissocie l’économie des sciences sociales et préconise que soient fixés, dans chacune de ces deux disciplines, des objectifs en termes de compétences à acquérir, ce qui rendra nécessaire la révision des programmes de SES et le remaniement des supports pédagogiques utilisés. Pour l’économie comme pour les sciences sociales, l’enseignement doit se concentrer sur l’apprentissage des fondamentaux, c’est-à-dire des outils conceptuels et analytiques qui en constituent le socle, afin de donner aux élèves une vision plus scientifique de ces disciplines et d’instaurer dans ces domaines une continuité avec l’enseignement supérieur qui n’existe pas aujourd’hui ». On ne saurait démolir davantage cet enseignement, invité à se recadrer ou à accepter de voir ses supports pédagogiques « remaniés ». Quant à l’ECJS, le HCE souhaite « qu’en classe de première et de terminale, la demi-heure hebdomadaire consacrée à l’ECJS (éducation civique, juridique et sociale) (soit) intégrée aux autres enseignements ». Au risque de la voir disparaître…
Bientôt le collège. Dans l’entretien qu’il nous a accordé, Bruno Racine annonce que le HCE remettra en 2010 un rapport sur le collège. Aussi tranchant ?
L’avis du HCE
http://www.hce.education.fr/gallery_files/site/20/55.pdf
Lisez l’entretien avec Bruno Racine
http://cafepedagogique.studio-thil.com/lexpresso/Pages/2009/12/20[…]
Rénover le lycée : Le discours programme de Philippe Meirieu
Candidat aux élections régionales en Rhône-Alpes, Philippe Meirieu signe avec Cécile Duflot et Marie-Christine Blandin une tribune qui sonne comme le programme éducatif d’Europe Ecologie et qui pourrait séduire les pédagogues.
« La société française a mal à son lycée et peur de ses lycéens » affirment les trois auteurs. Mal à un lycée « qui, loin de combler la fracture sociale, l’accroît… Elle maintient un baccalauréat final qui favorise le bachotage et où, contre tout bon sens et toute véritable exigence, un treize en mathématiques peut rattraper un sept en français… ou vice versa ! Elle propose la mise en place de deux heures d' »accompagnement » hebdomadaires sans toucher à l’organisation traditionnelle « une heure, une classe, un professeur, une discipline, une note »… Le pire est à craindre car cet « accompagnement individualisé » risque d’encourager un système de déversoirs successifs vers des soutiens-prothèses de toutes sortes ».
Cette pique envers la réforme Chatel les conduit à vouloir « changer de logiciel scolaire… Il faut être résolument ambitieux et, dans les perspectives ouvertes par Condorcet et Jean Zay, faire des lycées de véritables « maisons des savoirs, de la citoyenneté et de la formation tout au long de la vie ». Une collaboration étroite entre l’éducation nationale et les régions s’impose pour cela. Elles doivent travailler ensemble au décloisonnement entre la formation initiale et la formation continue, inventer des passerelles entre elles pour que nul ne soit jamais assigné à l’échec. Sans une articulation étroite entre ces deux dimensions gérées aujourd’hui de manière complètement étanche, l’orientation restera un système de tri plus ou moins sélectif et les élèves exclus continueront à se vivre comme des déchets ».
La tribune
http://www.lemonde.fr/opinions/article/2009/12/11/lyce[…]
Luc Chatel lance la réforme du lycée technologique
La réforme des séries STL et STI sera bouclée en mars 2010 a annoncé Luc Chatel le 10 décembre 2009. « Les enseignements généraux y seront renforcés, tout en maintenant bien sûr un fort ancrage des enseignements technologiques qui font la spécificité et la réussite de ces séries. Les élèves suivront deux langues vivantes, contre une seule aujourd’hui. Tous les élèves bénéficieront d’un accompagnement personnalisé, de deux heures par semaine, comme dans la voie générale ».
Mais c’est aussi le découpage disciplinaire qui sera revu. « Les spécialités seront entièrement repensées » ajoute Luc Chatel. « Aujourd’hui, les séries STI et STL sont éclatées entre dix-sept spécialités ou options et enferment les élèves dans des trajectoires souvent irréversibles, dès la classe de première. Cette spécialisation excessive tend à brouiller la distinction entre les séries technologiques et les formations offertes dans le cadre de la voie professionnelle rénovée… Les formations qui seront dispensées devront être davantage polyvalentes et permettre aux élèves d’aborder plusieurs grands champs technologiques. Un tronc commun d’enseignements sera mis en place afin de donner une plus grande cohérence entre les différents parcours et faciliter l’accès aux études supérieures. Les enseignements utiliseront davantage les outils numériques de simulation ».
D’après le ministre, « quatre ou cinq spécialités pourraient être proposées dans la filière STI, construites autour de grandes thématiques attractives et porteuses de sens comme par exemple : l’énergie et le développement durable ; les systèmes d’information et le numérique ; l’architecture et la construction ; l’innovation technologique et l’éco-conception ; les arts appliqués. La future série STL, quant à elle, serait consacrée aux sciences appliquées en laboratoire (biotechnologies, biochimie, sciences physiques et chimiques) ».
Ces propos arrivent au moment où un début de mobilisation se fait dans ces filières autour des nouveaux horaires de seconde, jugés insuffisants.
Discours de Luc Chatel