« Si vous venez chercher des solutions pour avoir des pistes concrètes pour la mise en place du socle dans les classes, vous risquez d’être déçus. Nous en sommes encore, devant les grandes difficultés qu’il semble avoir à prendre forme concrètement, à reposer ensemble les questions qui n’ont toujours pas été résolues. » Cet avertissement d’un des organisateurs, en début de colloque, va tenir toutes ses promesses, et montrer que les « éclairages » de la recherche, s’ils sont essentiels, ne peuvent être que des projecteurs divergents braqués sur la « scène » essentielle, celle où des enseignants s’escriment à chercher les meilleurs moyens que leurs élèves apprennent.
Dans un contexte socio-politique où il n’est pas flagrant que les efforts des centres de décisions soient axés sur la réduction des inégalités, après plusieurs années de secousses sur les programmes, ou d’inquiétudes sur les moyens et sur la formation, c’est un euphémisme de penser que le Socle Commun voté par le Parlement n’est pas nécessairement ce qui vient à l’esprit en premier lorsqu’on parle d’Ecole ou d’éducation. Pourtant, le modèle éducatif français peut-il s’exonérer de questionnement, si on en juge par la fraction persistante de son public qui en sort peut outillée pour construire un avenir.
L’initiative prise, les 19 et 20 novembre 2009, par deux universités lyonnaises (Lyon I et Lyon II), l’IUFM et l’INRP, ne pouvait qu’être nécessaire, comme l’a prouvé l’affluence des participants, universitaires, formateurs, inspecteurs, enseignants… « Notre colloque veut être un lieu de circulation des savoirs, de confrontations de points de vue et de résultats de recherche, de mise en question d’évidences présumées. La dimension internationale nous permet de comprendre les proximités et les différences. Nous n’en sommes pas aux solutions, mais aux discussions. » ouvre Françoise Lantheaume. Question de mots ?Socle commun, ou culture commune ? Derrière les mots, quelles différences de conceptions ? C’est l’occasion pour André Robert, directeur adjoint de l’équipe EducPol (Lyon II / INRP), d’un vibrant hommage aux écrits de Jean-Claude Forquin, rédacteur en chef de la Revue Française de Pédagogie jusqu’en 2000, récemment disparu : « Le socle de la loi de 2005 est-il révolutionnaire ? Est-il une rupture ? Est-il seulement la forme contemporaine de la culture, comme le prétendent ses promoteurs ? Or, le sens du mot « culture » est pluriel, et nous devons tenir compte dans la pratique de l’Education. La culture n’est pas qu’un patrimoine ou une identité. Il faut penser les relations entre école et culture. Pour reprendre les mots de Forquin, « cet ordre humain de la culture n’existe nulle part comme un tissu uniforme et immuable, mais il se spécifie au contraire dans une diversité d’apparence et de formes selon les avatars de l’histoire et les divisions de la géographie. Il varie d’une société à l’autre, et d’un groupe à l’autre au sein d’une même société. Il ne s’impose jamais de façon certaine, incontestable et identique, pour tous les individus. Il est soumis aux aleas des rapports de forces symboliques et à de perpétuels conflits d’interprétation. Il est imparfait, laculaire, ambigu dans ses messages, inconstant dans ses prescriptions normatives, irrégulier dans ses formes, vulnérable dans ses modes de transmission et de perpétuation »… Acteurs, interprétations, traductions, nous sommes au cœur du problème… »
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