Par François Jarraud
Chaque année c’est pareil. L’élection des délégués des parents d’élèves, un événement qui concerne plus de 15 millions d’adultes et la seule où puisse s’exprimer les étrangers, bénéficie d’une campagne promotionnelle de la part de l’Etat réduite au strict minimum. Cela témoigne d’un fait bien connu : la difficulté qu’a l’école française à accepter les parents.
On comprend mieux le manque d’enthousiasme de l’Etat au vu du récent sondage d’opinion publié début octobre par la Peep. Les parents y jugent l’Ecole fourvoyée. Le chiffre le plus dur concerne les réformes entreprises par X Darcos. Une majorité des parents (51%) estime que les réformes engagées par le ministère ne vont pas dans l’intérêt des élèves. Seulement 34% défendent les réformes. Les parents sont particulièrement critiques sur la suppression des postes et les classes surchargées. Mais ils critiquent aussi un enseignement jugé de mauvaise qualité, avec des programmes trop lourds, trop de devoirs, un manque d’aide aux élèves. Ils demandent plus de remplaçants (64%) et un effort qualitatif pour l’enseignement (57%). Il montre aussi leurs inquiétudes. Est-il normal qu’un parent sur cinq craigne la violence scolaire ou le non-remplaçement des enseignants dans l’établissement de son propre enfant ? Est-il normal que l’opinion principale chez les parents c’est que leurs enfants vivront moins bien qu’eux ? (39% contre 27%) ?
C’est dire que les parents attendent beaucoup de l’Ecole. Celle-ci est-elle susceptible de les écouter ? En 2007, le rapport des inspecteurs généraux Alain Warzee et Gérard Lesage dénonçait » l’opacité du système éducatif » et reconnaissait que » la relation entre les parents et les enseignants est trop souvent faussée par des présupposés, des représentations mentales qui peuvent générer de l’agressivité, de la condescendance ou des comportements d’évitement ». Les rencontres entre parents et enseignants sont souvent frustrantes car le temps de dialogue est trop court, les locaux d’accueil sont souvent inadaptés, les horaires des réunions (comme les conseils de classe) inadéquats. L’information des familles est » insuffisante et mal conçue ». Cette situation pénalise les familles populaires qui ne savent comment orienter leur enfant.
Or, depuis 2006, rien n’a bougé concernant la place des parents à l’Ecole. Certes le texte de 2006 accorde le droit de vote aux deux parents. Il impose aux établissements d’organiser deux rencontres enseignants – parents par an. Mais il encadre les droits des associations de parents d’élèves en ce qui concerne leur communication, qui reste soumise au chef d’établissement, et le calendrier des conseils de classe, qui reste très souvent fixé sans concertation. Rappelons que F. Fillon avait réduit la représentation parentale dans les instances importantes comme les conseils de discipline et que Gilles de Robien les a exclus des nouvelles instances comme le conseil pédagogique. Si le ministre est à l’écoute sur la carte scolaire ou les rythmes scolaires au point de trancher la question du samedi matin de façon abrupte,peut-on dire que cela satisfait toutes les familles et pas seulement les plus aisées ?
Car la question de la place des parents à l’école est d’abord sociale. La démocratisation de l’Ecole demande une reconnaissance plus importante de leur place dans l’Ecole. Il s’agit d’aider ces parents à comprendre l’Ecole et à aider plus efficacement leur enfant. C’est nécessaire pour lutter là aussi contre les préjugés et les autocensures qui pénalisent l’orientation des enfants des milieux populaires. C’est pour ces raisons qu’il conviendrait d’accorder toute sa place à l’élection des 16 et 17 octobre.
Le Guide des parents 2009