Par François Jarraud
C’est le chantier de tous les dangers. Nécessaire pour améliorer le système éducatif, indispensable pour équilibrer le budget, la réforme du lycée navigue entre contrainte budgétaire et utopie pédagogique. Oui mais quel est le but : une rénovation ou une réduction ?
Xavier Darcos a fait connaître le 17 juillet à la fois le calendrier et les orientations de sa réforme du lycée.
Le calendrier est très serré : la nouvelle seconde est attendue à la rentrée 2009, la première à celle de 2010, puis suivront la terminale et un nouveau bac en juin 2012. La réforme s’articule autour de 6 points principaux.
La seconde restera un cycle de détermination. » A l’âge souvent sensible auquel les collégiens abordent le lycée, un temps d’adaptation et de transition parait nécessaire » note le ministre. Mais » Il importe d’établir une autre organisation des enseignements qui rende crédible et efficace en matière d’orientation ce temps du choix, qui laisse aux élèves une vraie possibilité d’explorer des domaines qui leur sont inconnus ou qu’ils n’ont abordés que d’une manière peu adaptée à l’importance du choix à faire ».
Pour faciliter cette détermination et permettre « un choix réel esquissant un parcours ultérieur d’études supérieures », l’enseignement de la seconde à la terminale, sera diversifié et organisé en trois blocs principaux. Ce « triptyque » comprendra des enseignements généraux « en part moins importante qu’au collège », des enseignements complémentaires « visant (en seconde) soit l’exploration de nouveaux domaines, soit un approfondissement et/ou une meilleure maîtrise des fondamentaux ; visant (en cycle terminal) la spécialisation », des enseignements et activités d’accompagnement « visant une plus grande individualisation des parcours ». Selon X. Darcos, » en seconde, la répartition du temps-élève pourrait être de 60% pour les enseignements fondamentaux, 25% pour les modules d’exploration et d’approfondissement, 15% pour les enseignements et activités d’accompagnement. En cycle terminal, elle pourrait être respectivement de 45%, 45% et 10% ».
Les enseignements seront organisés selon une forme modulaire « inspirée de nombreux exemple étrangers ». L’année sera décomposée en une suite de modules d’enseignement de 3 heures sur la moitié de l’année (soit environ 50 heures). » L’organisation modulaire ouvre un champ nouveau au développement de l’autonomie de l’établissement ».
L’autonomie des lycéens et des établissements est une valeur revendiquée par ce projet. Il laissera davantage de choix à chaque lycéen qui pourra construire un « parcours guidé ». Les établissements eux auront à proposer des parcours modulaires en fonction du projet d’établissement.
L’accompagnement individuel des lycéens est « une innovation majeure du nouveau lycée ». Il sera donc intégré dans les parcours lycéens. Cela implique une réforme en parallèle du métier enseignant. Cela implique aussi que ceux-ci aient les moyens matériels d’exercer cet accompagnement. « Tout laisse à penser que la mise en place dans les lycées d’espaces numériques de travail serait un outil puissant au service de cet accompagnement » estime X. Darcos. Certes , mais un bureau pour recevoir les élèves sera sans doute nécessaire.
Le projet nécessite une réforme des programmes pour les adapter à cet enseignement modulaire. Elle s’accompagnera d’une réduction des horaires. Le ministre annonce « une semaine lycéenne d’amplitude plus raisonnable ».
Le point sur la réforme (document MEN)
http://cafepedagogique.net/lexpresso/Documents/docsjoints[…]
Le calendrier de la réforme (document MEN)
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Sur le Café, la réforme du lycée
http://cafepedagogique.net/lemensuel/lesysteme/Pages/2008/94_[…]
Un lycée pour Noël
Volonté d’en finir avec des filières hiérarchisées, autonomie des lycéens et des établissements, parcours diversifiés et personnels, accompagnement des élèves, référence aux systèmes éducatifs étrangers : sur bien des points la réforme des lycées lancée par Xavier Darcos parait bien partie. Mais à quelles conditions ?
Le diagnostic effectué, pour une fois, par le ministre semble imposer la nécessité d’un vrai changement. Il en ressort « l’image et la réalité d’un lycée dont la conception date principalement du XIXème siècle ou de la première moitié du XXème c’est à dire d’une époque où la démocratisation de l’enseignement secondaire ne pouvait pas être à l’ordre du jour et où la question de l’accès à l’enseignement supérieur se posait dans des termes radicalement différents ». Le document ministériel évoque également « des séries ou filières de cycle terminal qui ne correspondent pas (ou correspondent mal) à leurs finalités explicites et dont l’horizon est davantage défini par rapport au baccalauréat que par rapport à un trajet ultérieur dans l’enseignement supérieur » et « un lycée dont ni l’architecture générale ni les modes de travail et de fonctionnement ne préparent vraiment à l’enseignement supérieur et à ses exigences quant à l’autonomie des étudiants ».
Ce diagnostic, les mesures envisagées sont de nature à construire un lycée totalement nouveau en France, mais « largement inspiré » des établissements secondaires étrangers. Le lycée Darcos tournerait la page du lycée napoléonien. Il nous rapprocherait des standards internationaux et romprait le cercle français de l’élitisme et de la sélection. Pourtant des questions viennent freiner l’emballement devant ces annonces.
Peut-on éviter la hiérarchisation des filières ?
Le projet Darcos souhaite en finir avec la hiérarchisation des filières et propose comme solution l’individualisation des parcours entre des modules d’enseignement dont à peu près la moitié serait laissée au choix du lycéen. Si cette mesure est probablement très favorable au climat d’établissement, permet-elle d’éviter la hiérarchisation ? On peut en douter. On a vu par exemple, comment au saint des saints, la filière S, la hiérarchisation s’est introduite tout naturellement entre les options de S, la S math s’imposant aux autres branches. Pourquoi cette puissante loi sociale serait-elle affaiblie par la diversification des parcours ?
Bien au contraire, la liberté offerte aux lycéens devrait spontanément accroître cette hiérarchisation. Entre les enfants des « bonnes » familles parfaitement informés des modules à choisir pour intégrer telle ou telle prépa et les autres, le fossé devrait se creuser. Ajoutons qu’une modularité couvrant environ la moitié des programmes entraînera également un bac modularisé à l’infini, c’est à dire un diplôme d’établissement. Il y a bien une solution. On sait qu’en Finlande, où les jeunes ont ainsi le choix de leurs modules, des personnels spécialisés et nombreux assistant les élèves dans le choix de leurs modules. On doute que le contexte budgétaire actuel entraîne Darcos sur ce chemin.
Quelle pédagogie pour cette réforme ?
Autonomie des lycéens, accompagnement des élèves, objectifs annoncés de davantage de réussite, travaux interdisciplinaires, enseignements modulaires : tous ces éléments poussent les enseignants du lycée à changer de pratiques pédagogiques, à affronter, par exemple, l’hétérogénéité des parcours, des temps de formation. Cela suppose une formation des enseignants. Mais aussi un autre discours sur le métier.
Or Xavier Darcos n’a pu se retenir cette semaine encore de donner un nouveau gage aux traditionalistes en dénonçant dans une tribune du Monde, les « pédagogistes », l’élève au centre, et l’effondrement du prestige du maître. Or, comme le souligne P. Meirieu dans Les Echos, « il semble que la formation des maîtres ne soit plus une priorité » au moment où Darcos flingue les IUFM.
Après avoir donné aux courants les plus réactionnaires une réforme du primaire conforme à leurs vues, Xavier Darcos brandit une réforme du lycée capable de séduire l’autre camp. Cet exercice d’équilibre ne fait que rendre plus sensible le manque d’un ingrédient nécessaire à toute réforme de l’éducation : la confiance de ceux qui ont la charge de l’appliquer.
Sur le lycée finlandais et les autres…
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Meirieu dans Les Echos
http://www.lesechos.fr/info/france/4753164—la-reforme-suppose-u[…]
Ballet de signatures pour une réforme du lycée
Trois organisations lycéennes, l’UNL, la FIDL et l’Uni Lycée, ont signé le 2 juillet le documents portant des « points de convergence » sur le lycée. Cet acte associe donc les organisations lycéennes à la discussion sur la réforme du lycée. Sept syndicats (SNES et SNEP F.S.U, SGEN C.F.D.T, SNALC CSEN, SE UNSA, S.N.P.D.E.N, I.D. FAEN) avaient déjà signé le texte.
Pour l’UNL, le texte « reprend certaines orientations portées depuis longtemps par l’UNL, comme la mise en place d’un vrai service public d’orientation, une meilleure préparation à l’enseignement supérieur ou encore une revalorisation des instances de la Démocratie Lycéenne et de la place du lycéen au sein de l’établissement ». Mais l’UNL craint que le contexte budgétaire détourne la réforme de ses objectifs. « L’UNL répète que les objectifs généraux définis jusqu’ici pour la réforme peuvent déboucher sur le meilleur comme sur le pire dans leur traduction concrète ».
Les points de convergence
http://media.education.gouv.fr/file/07_juillet/72/9/Reforme_lyc[…]
Sur le Café, le dossier sur la réforme du lycée
http://cafepedagogique.net/lemensuel/lesysteme/Pages/2008/94[…]
Communiqué UNL
http://www.unl-fr.org/actu_view.php?id=336
Les réserves du Snes
» A chaque fois qu’un ministre annonce la nécessité de « travailler différemment », c’est pour alourdir la charge de travail des personnels ! » met en garde le Snes et le Snep dans un communiqué. Signataires des « points de convergence » en juin, ils estiment que « les propositions ministérielles vont bien au-delà de ce qui a été évoqué » et estiment que « le calendrier de mise en œuvre n’est pas acceptable ».
Communiqué
http://www.snes.edu/spip.php?article15268
Fillon promet « l’allègement scolaire »
« Le lycée français est le plus coûteux des pays de l’OCDE, sans être le plus performant… Une réforme s’impose, une réforme qui passe par la personnalisation de l’enseignement et par l’allégement scolaire ». Selon AP, en visite à Saint-Valery en Caux le 2 septembre, le premier ministre a promis « une Education nationale qui sache répondre devant la nation du bon usage des ressources immenses qui lui sont consacrées ».
Communiqué
http://fr.news.yahoo.com/ap/20080902/tfr-education-fillon-refor[…]l
Reconquête du mois de juin : Le SNPDEN marque les limites
« L’expérience de « reconquête du mois de juin » dans les lycées dans plusieurs académies et départements est à apprécier de manière positive, mais le bilan est mitigé et des améliorations sont nécessaires » affirme le SNPDEN, premier syndicat des chefs d’établissement. Tirant un premier bilan de la « reconquête du mois de juin », le dispositif ministériel visant à maintenir les cours au mois de juin malgré les examens, le syndicat constate que « dans les conditions actuelles, sans simplification des examens et sans rationalisation des procédures d’orientation et d’affectation, il est apparu qu’au-delà du 13 juin les effets négatifs, retards et risques d’erreur se sont dangereusement multipliés… Les familles ne comprendraient pas, si l’on allait trop loin dans cette voie par excès de zèle, l’impossibilité de disposer, fin juin et avant les congés d’été, des informations concernant l’inscription de leurs enfants, ni le retour prévisible aux rentrées perturbées par les affectations tardives d’enseignants ». Le SNPDEN demande des discussions pour parfaire le dispositif qui doit être étendu cette année.
Le Snpden
Communiqué
http://www.education.gouv.fr/cid21720/xavier-darcos-dresse-un-pr[…]
Communiqué Snes
http://www.snes.edu/spip.php?article15248
Sur le Café, les profs de philo vont-ils bloquer le bac ?
http://cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2008/06/26062008Accueil.aspx