Par François Jarraud
« Loin des bruyantes réformes, l’histoire de cet alinéa ressemble à un coup en douce » écrit Libération. C’est que le Sénat a adopté le 9 avril un projet de loi sur les discriminations qui précise que n’est pas discriminatoire « l’organisation d’enseignements par regroupement des élèves en fonction de leur sexe ». Depuis le gouvernement est soupçonné des pires choses. «
On peut attendre des demandes pour des séances séparées de piscine – notamment de communautés religieuses intégristes; certains peuvent aussi réclamer des cours de maths séparés car les garçons sont déconcentrés par les filles » déclare la sénatrice communiste Annie David.
La suppression de la mixité va-t-elle (re)devenir un cheval de bataille de la droite ? On se rappelle à quel point celle-ci avait été hostile au développement de l’enseignement secondaire des filles sous la IIIème République. Surtout la mixité pose bien problème et son maintien est contesté dans la plupart des pays développés.
Ainsi, dans une tribune donnée au café, JL Auduc relevait un écart croissant entre filles et garçons face à l’échec scolaire. « Un garçon sur cinq se trouve dans cette situation de sortir du système éducatif sans CAP, ni BEP, ni Baccalauréat, alors que cela ne concerne qu’une fille sur sept » écrivait-il. « Toutes ces statistiques montrent que la « fracture sexuée » a atteint de tels écarts (entre 10 et 14 points) pour certains indicateurs (compétences en lecture, % d’une classe d’âge réussissant le baccalauréat) qu’elle apparaît pour ces items aussi, voire plus importante que la fracture sociale. Ainsi, les filles issues de catégories sociales classées comme défavorisées réussissent nationalement aussi bien ou mieux en lecture ou au baccalauréat que des garçons issus de catégories sociales caractérisées comme favorisées ».
Mais, relevait JL Auduc, « toutes les études menées dans les pays anglo-saxons concernant les classes séparées garçons –filles pour l’ensemble des apprentissages scolaires montrent qu’elles n’améliorent en rien les résultats scolaires des garçons et ne diminue pas leur décrochage scolaire. Ces classes séparées renforcent les stéréotypes sexuels , encouragent l’ignorance et le préjudice envers l’autre sexe, accentuent les différences dans l’éducation… Gérer la mixité, ce n’est pas seulement mettre des garçons et des filles ensemble, mais réfléchir aux stratégies appropriées pour mieux faire réussir et vivre ensemble filles et garçons ».
Devant cette difficulté et face à l’attirance pour l’école la plus rétrograde, la tentation pourrait croître sur les bancs de la majorité d’instaurer l’apartheid des genres dans le système éducatif. Au ministère on s’efforce de désamorcer l’affaire. « Le principe organisateur de l’enseignement dans les établissements publics reste donc naturellement celui de la mixité » affirme X. Darcos.
Projet de loi
http://ameli.senat.fr/publication_pl/2007-2008/241.html
Tribune de JL Auduc
http://cafepedagogique.net/lemensuel/larecherche/Pages/2006/b[…]
La commission
http://www.education.gouv.fr/pid495/commission-sur-evolution-met[…]
En débat, vraiment ?
« S’il s’agit de permettre ponctuellement des enseignements séparés dans certaines disciplines, en conservant l’objectif d’une éducation commune aux deux genres, nous pouvons en discuter. Mais l’exemple, donné par le gouvernement pour justifier sa loi de l’école non mixte de la Légion d’honneur, démontre que ce texte pourrait servir de base à l’installation de structures complètes d’enseignement non mixte (classes, établissement). » Dans un communiqué, le Sgen-CFDT « s’interroge » sur les objectifs de la loi contre les discriminations du 15 mai qui autorise des regroupements séparés des filles et des garçons. Le Sgen s’oppose à cette éventualité.
C’est que le débat rebondit aussi dans les médias. Ainsi L’Express donne la parle à Marie Duru-Bellat qui estime que si la non-mixité « crée des « bulles » d’apprentissage confortables », à long terme « elle n’arme pas (les filles) suffisamment pour batailler dans un univers social, qui, lui, est mixte ». L’hebdomadaire ouvre une longue tribune au sociologue Michel Fize qui se fait l’apôtre de la séparation des genres. « Dans les pays anglo-saxons », écrit-il, « les jeunes filles de milieu populaire scolarisées dans des établissements non mixtes réussissent beaucoup mieux que les autres. Ce qui prouve que l’apprentissage séparé agit sur les résultats ». Et il envisage des classes optionnelles au niveau du collège et des lycées professionnelles.
Une proposition qui pourrait séduire l’électorat conservateur. Le ministre lui-même serait il hostile à l’idée de séparer filles et garçons dans les quartiers difficiles ? Nous croyons savoir que non…
Article de L’Express
http://www.lexpress.fr/actualite/societe/education/la-mixite-n-[…]
Article de L’Express
http://www.lexpress.fr/actualite/societe/education/je-ne-pense-[…]
Communiqué Sgen
http://www.sgen-cfdt.org/actu/article1673.html
Sur le Café, éditorial du 23 mai
http://cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2008/05/2305200[…]
Pourquoi les filles battent les garçons
« Les filles auraient-elles des prédispositions innées à la réussite scolaire ? » interroge Martine Laronche, dans un bel article du Monde. La journaliste interroge la neurobiologiste Catherine Vidal qui affirme que « les capacités biologiques cérébrales sont identiques pour les deux sexes, et garçons et filles ont les mêmes aptitudes. Pour expliquer les différences, il faut se référer aux stéréotypes socioculturels et aux comportements qui en découlent. »
C’est alors vers la sociologue Catherine Marry que se tourne la journaliste. Pour elle, « les filles sont conscientes du fait que les études sont le vecteur principal de leur émancipation. Leur réussite est également le fait d’une dynamique historique et d’une évolution de la société ».
Mais en fait peut-on parler de réussite scolaire des filles ? Rien n’est moins sûr. Si en 2005, 82,3 % des filles ont obtenu le brevet et seulement 75,6 % des garçons, si elles réussissent le baccalauréat à près de 82 % contre 77,7 % de garçons, au bout du compte elles optent pour les filières les moins valorisées. Il n’y a qu’un quart de filles en prépas scientifiques.
L’exemple vient d’en haut. Au sein même de l’éducation nationale, alors que la profession est très majoritairement féminisée, la place des femmes diminue avec le niveau hiérarchique. Au sommet seulement 28% des inspecteurs généraux sont des inspectrices.
L’article de M. Laronche
http://www.lemonde.fr/aujourd-hui/article/2008/05/27/ecole-pour[…]
La parité dans l’éducation nationale
http://www.education.gouv.fr/cid4006/egalite-des-filles-et-des[…]
Grossesses, mariages forcés et scolarisation des filles au Sénégal
« Chaque mois de mai, mes camarades et moi vivons la hantise des mariages précoces. C’est la période choisie par nos parents pour nous marier à des hommes que nous n’aimons pas souvent… C’est pourquoi nous demandons à nos parents de nous épargner ce supplice et de nous permettre de poursuivre nos études jusqu’à l’obtention du Bac ». Dans le quotidien Wal Fadjri, Adama Baldé, élève de 3ème, montre l’impact de la tradition sur la scolarisation des filles.
Les grossesses précoces sont un autre facteur de décrochage. Selon le président du tribunal local, elles résulteraient souvent des enseignants. Mais ce sont les parents qu’accuse l’un d’eux. « Dire que les enseignants sont les auteurs de ces grossesses est exagéré. C’est un mauvais procès que l’on nous fait. Les responsabilités sont partagées. Et la faute revient aux parents qui n’éduquent pas leurs enfants qui s’habillent manière trop sexy, provoquent leurs profs, etc. Elles s’exposent ainsi aux actes délictueux d’adultes inconscients qui oublient leur rôle et se laissent aller à des comportements irresponsables ».
Article Wal Fadjri
http://fr.allafrica.com/stories/200805280721.html
Article Wal Fadjri
http://fr.allafrica.com/stories/200805280696.html
L’école « afrocentriste » au risque du ghetto
Après Toronto, où l’école ouvrira en 2009, la communauté noire de Montréal (Québec) a demandé l’ouverture d’une école afrocentriste. L’établissement ferait la promotion du patrimoine africain dans son cursus.
Pour justifier cette ouverture, la communauté met en avant le racisme existant dans le système éducatif et ses conséquences scolaires pour les jeunes Noirs ainsi que l’échec du système scolaire universaliste français. Les détracteurs du projet évoquent de leur coté le risque de ghettoïsation. En Angleterre le président de la Commission pour l’égalité raciale avait recommandé l’ouverture de lycées pour noirs.
Ecole afrocentriste
http://www.ledevoir.com/2008/02/06/174886.html
Ecole afrocentriste
http://www.radio-canada.ca/regions/Montreal/2008/05/27/015-CSEM[…]
Sur le Café en Angleterre…
http://cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2005/03/index08030[…]