Par Françoise Solliec
C’est à l’Hôtel des Invalides que les lauréats, en grande majorité des jeunes filles, disons-le bien fort, sont venus le 15 janvier recevoir leur prix, pour les travaux tout à fait remarquables, individuels ou collectifs, qu’ils ont effectués en mars dernier, dans le cadre du concours national de la résistance et de la déportation 2007, sur la thématique « le travail dans l’univers concentrationnaire nazi ».
Une thématique à résonance ethnique, rendue plus proche encore par les rencontres avec d’anciens résistants ou déportés
Sur cette thématique complexe, qui exigeait la compréhension de nombreux éléments relatifs aussi bien aux concepts de travail et de production dans l’Allemagne nazie qu’à la signification du travail et de l’exploitation concentrationnaire, plus de 46 000 élèves, provenant d’environ 800 lycées et 2 000 collèges, ont concouru, en réalisant une œuvre individuelle, sous forme d’épreuve écrite limitée dans le temps, ou des travaux collectifs.
Pour accompagner les élèves et leurs enseignants dans la réalisation des travaux, plusieurs dispositifs sont prévus. On citera tout d’abord les documents pédagogiques réalisés, avec le soutien des ministères de l’éducation nationale et de la défense, par les trois fondations de mémoire, la fondation de la résistance, la fondation de la mémoire et de la déportation et la fondation de la France libre. Ces documents comportent chaque année des éléments biblio et filmographiques et une brochure spécifique téléchargeable par exemple sur le site de la fondation de la résistance. A noter que cette fondation propose également des ateliers pédagogiques (lycées et collèges) de préparation du concours.
Il faut ensuite mentionner la possibilité de faire appel au musée national de la résistance qui, en collaboration avec le CDDP du Val de Marne, « dans le cadre de la convention qui le lie au Ministère de l’Education Nationale, depuis 1985, met à la disposition des élèves et des enseignants participant au Concours National de la Résistance et de la Déportation, des matériaux et des outils historiques, documentaires et pédagogiques », complémentaires aux ressources offertes par les fondations de mémoire.
Enfin, dans la grande diversité des sites traitant de cette thématique, il nous parait intéressant de signaler celui du Struthof (l’ancien camp de concentration de Natzweiler, qui abrite maintenant le centre européen du résistant déporté) et celui consacré à la mémoire des 2 guerres mondiales sur le site du CRDP de l’académie de Reims.
Mais ce qui rend le travail particulièrement intéressant pour les élèves, c’est de pouvoir bénéficier de la rencontre avec les passeurs de mémoire que sont les anciens déportés ou résistants. C’est ainsi que la rencontre avec Lucie Aubrac, venue inaugurer le collège qui porte son nom, a été parfaitement déterminante pour Kods Mahdhaoui, alors élève de collège à Champigny. « La rencontre, c’est touchant, cela change tout » nous confie cette élève, lauréate de la catégorie travaux individuels lycées, « pour une dissertation sur le travail dans le système concentrationnaire nazi, sous l’angle des moyens de production économique et celui des conséquences de répression dans la vie des camps ». Elle a été particulièrement intéressée par la thématique de cette année, qui résonnait de manière symbolique forte pour cette jeune fille issue de l’immigration. « Kods était très motivée, mais elle possédait aussi de solides bases historiques sur cette période depuis son passage au collège » ajoute son professeur, Nicolas Andrieux, qui chaque année propose à tous ses élèves de participer au concours, en emmène une partie au Struthof, en Alsace et bénéficie de la proximité du musée national de la résistance. Comme pour nombre de ses collègues, cette persévérance porte ses fruits et il a eu déjà le plaisir de voir plusieurs de ses élèves primés au niveau académique. « Il n’est pourtant pas facile de susciter des vocations » explique-t-il « d’autant que les modifications de programme qui renvoient l’étude de la seconde guerre mondiale au deuxième trimestre de 1ère n’aident pas ».
La cérémonie de remise des prix, à laquelle participaient Joëlle Dusseau, présidente du concours, Marie-Jose Chombart de Lauwe, présidente de la fondation pour la mémoire de la déportation, Jean-Louis Nembrini, directeur général de l’enseignement scolaire, représentant Xavier Darcos, empêché, et Alain Marleix, secrétaire d’Etat à la défense, chargé des anciens combattants, a été l’occasion de féliciter et de remercier chaleureusement les organisateurs, les lauréats et leurs enseignants. Ce fut aussi l’occasion de rendre hommage aux résistants et déportés présents ainsiqu’à plusieurs personnalités disparues récemment, notamment Lucie Aubrac, dont le mari Raymond était présent, qui participa activement à l’organisation du concours.
Mis en place en 1961, le concours national de la résistance et de la déportation « est plus que jamais d’actualité » estime Joëlle Dusseau, qui conclut « C’est un concours à part dans notre institution. C’est un travail de mémoire et d’histoire, c’est la rencontre d’un passé toujours brûlant et d’un avenir à construire. C’est pourquoi nous y sommes si fortement attachés. C’est pourquoi nous nous réjouissons que tant d’enseignants y donnent du temps et de l’énergie et que tant d’élèves de collège et de lycée s’y engagent ».