L’usage nous y appelle : ce premier numéro de l’année est pour le Café l’occasion de vous présenter nos vœux et aussi d’envisager dans cet éditorial l’année qui vient.
On le sait tous, 2008 va être l’année des réformes. Pour ne prendre que celles qui sont annoncées et qui sont commentées dans ce numéro, la liste est longue ! Prenons notre souffle : réforme du métier d’enseignant, du service minimum, de l’enseignement professionnel, de la maternelle, du primaire, de la série S et plus généralement des lycées, du calendrier du bac, de l’enseignement artistique, du B2i, des programmes du collège… Chacune avance de son côté sans qu’on sache bien comment le maître d’orchestre (oui, mais lequel ?), même juché sur un socle (commun !), pourra dégager de l’harmonie d’autant de partitions et de virtuoses…
Il est plus simple de débuter cette année par un instrument fondamental de l’Ecole : l’élève et sa relation avec le prof et le système éducatif. C’est elle qui est au cœur de ce numéro. Dix ans après la consultation Meirieu, nous sommes allés interroger des lycéens sur l’Ecole et leurs profs, avec le sentiment que sur bien des points, le temps n’avait fait qu’effleurer l’Ecole… Georges Felouzis, co-auteur du Peuple lycéen, Eric Favey, Gabriel Cohn-Bendit ont bien voulu réagir aux critiques et aux aspirations lycéennes.
Dans la longue liste des réformes attendues, peut-être manque-t-il la plus importante : celle qui débloquerait la nature des rapports profs – élèves, qui inviterait les deux stars trop souvent absentes des salles de classe, la confiance et la liberté, et qui permettrait de développer enfin une pédagogie positive. L’adjectif n’est pas là pour obéir à la mode, mais bien parce que c’est la seule issue pour l’Ecole.
Et puisqu’il faut quitter 2007, force est de reconnaître que la plus importante avancée de l’année nous la devons justement aux élèves, et plus particulièrement au mouvement étudiant et lycéen. Ils ont réussi à arracher les moyens permettant d’amorcer un véritable changement de l’université. En décembre, on a vu « l’orientation active », ce dispositif qui guette chaque lycéen de terminale et chaque étudiant, passer d’un outil de sélection à un véritable instrument d’orientation. L’écart entre les deux pèse 500 millions. Là où l’orientation active, imaginée par Robien, se limitait à éliminer les étudiants en difficulté, un nouveau dispositif leur offrira une première année moins spécialisée et donc favorable aux réorientations et aux aides méthodologiques. On est passé d’une logique d’exclusion à une reconnaissance de la nécessité de prendre en compte les étudiants réels. Un renversement somme toute très conforme à ce que doit être l’Ecole démocratique.
C’est cet état d’esprit que nous retrouvons également dans le dernier rapport sur la série S. Lui aussi repousse l’idée de la sélection précoce et propose des dispositifs pour que le jeune construise son choix d’orientation sur la durée. Il tient compte de la réalité des vœux et des situations des élèves et des familles. Et ce n’est pas par hasard qu’il préconise des pédagogies de type TPE et qu’il ose même regretter leur disparition en terminale. Ces mêmes TPE qu’on trouve encore cités en modèle par le rapport Gross sur l’éducation artistique.
Alors faut-il croire qu’après la glaciation robienne, l’éducation traverserait un printemps des possibles ? Difficile d’échapper aux vœux…
François Jarraud