» La diversité des situations existantes sur le terrain tient principalement aux profils des élèves admis dans les classes de troisième à module de découverte professionnelle ; à la mobilisation des équipes autour d’une pédagogie de projet permettant aux élèves de construire de nouveaux apprentissages à partir de situations concrètes en relation avec le monde du travail ; à l’existence et à la nature des partenariats établis par les établissements avec leur environnement économique et social afin de mettre les élèves en contact avec des métiers relevant de plusieurs champs professionnels et de les aider à affiner progressivement leurs projets d’orientation… Force est de constater que, dans de nombreux établissements, la situation existante vis-à-vis de ces paramètres est significativement éloignée des orientations pédagogiques préconisées par l’arrêté du 14 février 2005« . Plus d’un an après leur généralisation, le rapport des inspecteurs généraux René Cahuzac, Raymond Riquier et Jacques Thierry, montre que les classes à module de découverte professionnelle (appelées couramment DP6 pour les distinguer des classes à option découverte professionnelle) s’éloignent des objectifs annoncés initialement.
Présentées comme un remède à l’échec scolaire par une orientation anticipée vers le lycée professionnel, les classes DP6 accueillent en fait, parmi leurs 32 000 élèves, à coté d’élèves scolairement fragiles et envisageant la voie professionnelle ou ayant un projet professionnel précis, des jeunes relevant de dispositifs spécifiques, des décrocheurs qui devraient bénéficier des dispositifs relais et des élèves perturbateurs exclus de leur collège. « Il faut bien admettre qu’une certaine confusion, quant au profil des élèves auxquels s’adressent les classes de troisième à module de découverte professionnelle, a pu exister sur le terrain lors de la préparation de rentrée 2005. L’arrêté du 2 juillet 2004, en effet, ne fait état pour ces classes que d’élèves en grande difficulté. C’est l’arrêté du 14 février 2005 qui positionne ces classes pour des élèves volontaires prêts à se remobiliser autour d’un projet de formation dans les voies professionnelle, générale ou technologique » rappelle le rapport
La filière sert également souvent de variable d’ajustement du service des enseignants ce qui conduit parfois à des organisations des enseignements aberrantes. Dans ces circonstances, le rapport souligne les difficultés de mise en place de projets pédagogiques spécifiques. » Le plus souvent, les projets pédagogiques des classes de troisième à module de découverte professionnelle se réduisent à un descriptif de la distribution des enseignements et des activités prévues ou à une collection de comptes rendus de réunions de l’équipe éducative« .
Les relations avec le monde professionnel semblent souvent superficielles alors qu’elles justifiaient au démarrage le projet. « L’implication des milieux professionnels dans le projet de formation peut être qualifiée d’extrêmement variable selon les établissements… Leur apport s’inscrit plus en juxtaposition des autres activités de découverte professionnelle qu’en véritable accompagnement de la construction du projet d’orientation des jeunes« . Enfin le rapport signale que l’intégration de ces classes dans les politiques territoriales n’a pas été pensée. « Une clarification urgente s’impose pour que ces classes implantées en lycée professionnel cessent d’être en « exterritorialité »« . Il s’agit en effet de classes de collège, relevant des conseils généraux, mais implantées en lycée professionnel, ceux-ci dépendant des conseils régionaux… Quelque soit l’implication forte des équipes éducatives, toutes ces contraintes structurelles jouent contre le dispositif.
Finalement le rapport ne souligne que deux faits positifs : un relatif succès de la prise de conscience de la problématique professionnelle dans l’orientation, les attentes des familles envers le système éducatif. Que reste-il de l’idée de départ ? Sans doute uniquement la question de la réussite de tous les élèves. En principe la solution apportée devait être trouvée dans le socle commun. Mais très vite on a vu F. Fillon, puis G. de Robien, abandonner l’idée du socle et même la scolarité obligatoire jusqu’à 16 ans. De fait les classes DP6 risquent fort de se transformer en espaces de relégation. Ce premier rapport doit alerter sur le maintien de ce dispositif.