Le parcours de Jacques Nimier explique bien le regard singulier qu’il peut avoir sur l’enseignement. Enseignant de mathématiques en Lycée, il fut ensuite nommé à la chaire de psychologie clinique de l’Université de Reims, puis comme directeur adjoint à l’IUFM de Reims. Cette double compétence, sa pratique de l’enseignement et de la formation lui ont permis ce livre vivant et éclairant.
Vivant, car il s’appuie sur une collection d’entretiens avec élèves, professeurs et chercheurs en mathématiques, dialogues qui sont parfois drôles, parfois émouvants. À tout le moins, ces entretiens montrent bien que l’investissement affectif qui est placé dans les mathématiques n’a souvent rien d’anodin.
L’analyse croisée de ces témoignages a permis à l’auteur une typologie des représentations que l’on peut avoir des mathématiques. Votre mathématique est-elle : une loi structurante, un objet outil, un objet idéal, un autre monde, un mauvais objet ou un objet phobique ? En s’appuyant sur les entretiens, l’auteur fait une description et une analyse fine et convaincante de cette typologie.
Au gré de cet ouvrage au questionnement riche, l’auteur pointe le fait que la représentation que chacun peut avoir des mathématiques est (fortement) liée à son histoire personnelle, met en perspective les problèmes d’éducation avec le rôle croissant de l’imaginaire dans notre culture, aborde des pistes de remédiation (et les dangers qu’elles peuvent receler), parle de la dialectique communicante code – corps, de l’importance de l’écoute dans l’acte d’enseigner, de l’indispensable dédoublement qui fonde la formation…
Jacques Nimier donne des pistes à la fois pour comprendre ce qui est en jeu dans l’enseignement (et, singulièrement, dans celui des mathématiques), et pour l’améliorer (à travers par exemple le jeu ou l’appréhension de la dynamique des petits groupes). Il conclut par une dizaine de pages de perspective relativement à la formation initiale, puis à l’évolution du système éducatif.
Ce livre apporte un regard passionnant sur notre activité d’enseignement. Professeurs et formateurs y feront progresser leur connaissance de ce qui fonde leur travail : ils y trouveront aussi moult questions sans réponses immédiates… En cela, paradoxalement, il est pleinement éclairant.
(Didier Missenard)
Jacques Nimier, Camille a la haine et… Léo adore les maths. L’imaginaire dans l’enseignement, Paris, éditions Aléas, 2006.
http://perso.wanadoo.fr/jacques.nimier/livre.htm