– François Jarraud –
Au moment où le ministère souhaite lancer une nouvelle impulsion à l’utilisation des TICE dans l’enseignement, l’expérience du « cartable électronique landais » commence sa 3ème année. Elle semblait au départ bien hardie puisque le « cartable », un ordinateur portable, était distribué à chaque collégien de 3ème avec quelques rares logiciels. Le conseil général, à l’initiative du projet, attendait des enseignants qu’ils inventent les pratiques. Fabienne Saint-Germain et Jean-Michel Laubère, enseignants en collège, ont participé à cette expérience depuis le début.
FJ- Au bout de 2 années d’expérimentation, quel bilan faites-vous du cartable électronique ?
FSG- Tous les collègues n’utilisent pas le cartable. Mais au moins la moitié ce qui est un bon résultat.
FJ- Quel impact a-t-il eu sur vos pratiques ?
FSG- Elles ont beaucoup évolué. Sur le plan informatique, au début j’utilisais seulement Word et Powerpoint. Aujourd’hui je réalise des animations sous Flash qui sont incluses dans des questionnaires interactifs. J’ai développé de nombreuses ressources multimédia qui correspondent exactement à mes besoins. Du coup ma place en classe a changé : je ne suis plus derrière le bureau mais je circule dans la classe. Ce sont les élèves qui travaillent, principalement dans des activités d’écriture qui vont bien au-delà du QCM. J’utilise aussi le tableau interactif. Il a beaucoup de succès chez les élèves qui l’ont rebaptisé « tableau magique ». On peut y montrer des animations, des exercices , en pilotant un ordinateur depuis le tableau. Les élèves ne refusent plus de passer au tableau.
JML- Au début c’est difficile de supporter de voir les élèves derrière leur écran. Mais finalement on voit davantage individuellement les élèves. Ils viennent nous trouver plus facilement, discutent en fin de cours quand ils ferment leur portable. Personnellement je l’utilise surtout pour la gestion du travail des élèves. Il trouvent sur leur disque dur ou sur mon site personnel ( http://jml.prof.free.fr ) le travail à faire, un calendrier etc. Ils peuvent également me contacter par courriel. Quand ils rendent leur travail, l’ordinateur les amène à réfléchir aux règles de présentation des textes.
FSG- Il faut un gros investissement de temps pour réaliser tous ces supports mais ce n’est à faire qu’une fois et quelle récompense on a dans le regard des jeunes. Il y a un vrai changement dans leur comportement envers nous. Moins de chahut dans les couloirs, des échanges plus fréquents avec les professeurs. Je trouve qu’il a aussi amélioré les relations entre élèves faibles et forts et plutôt stimulé ceux-là.
FJ- Il n’encourage pas la fraude ?
FSG- Oui il y en a. Mais elle existait déjà avant et en général est facilement décelable.
FJ- Et pour les familles ?
FSG : Le cartable est souvent utilisé à la maison par les frères et soeurs. Les élèves ont eu du mal à le rendre en fin d’année : ils ont demandé et obtenu le droit de graver un cédérom qui conserve les cours enregistrés sur le portable. On est loin de la destruction des cahiers en fin d’année.
FJ- Comment expliquer ce quasi succès ? Suffit-il de mettre de nouvelles ressources à disposition pour que les enseignants changent leurs pratiques pédagogiques ?
FSG- Apparemment oui. On nous a offert ce matériel et cela a changé radicalement notre enseignement .
JML- Cela tient principalement au fait que rien n’a été imposé. On nous a offert des formations et l’on a reçu une assistance technique. On a totalement respecté notre liberté pédagogique.
FJ- Cette intrusion des élus locaux dans la pédagogie n’a pas choqué ?
FSG- Non car il n’y a pas eu intrusion. On nous a respecté. Nous restons maîtres de notre pédagogie.
Propos recueillis par F. Jarraud