… et tente de rassurer les élèves et les professeurs de langues anciennes.
Luc Ferry est intervenu le 1er mars dernier, dans une déclaration à la presse. La position ministérielle repose sur un paradoxe apparent : le latin et le grec doivent en effet être « justifiés par eux-mêmes », et non « par l’utilité qu'[ils peuvent] avoir ». L’utilitarisme, ce serait la justification (périmée ?) de l’acquisition des langues anciennes par la facilitation de l’acquisition du lexique et de la grammaire en français (article du 4 mars dans Le Figaro).
Il en reste néanmoins que le « message » des lettres grecques et latines est « important pour nous aujourd’hui » ; et ce « message » serait de nature essentiellement philosophique. Ces études seraient donc bel et bien « utiles », mais pour la philosophie, et non pas pour le français.
D’autre part, l’organisation de cet enseignement ne saurait mettre de côté tout souci de « rentabilité » : « les sections de latin ou grec à très petits effectifs dans certains lycées ne sont rentables ni sur le plan économique ni sur le plan pédagogique. »
Il s’agit donc bien, en bout de course, de justifier l’utilité de cet enseignement. Et les chiffres sont clairs : notre enseignement n’est, en effet, statistiquement pas « rentable ». Si, en effet, « Contrairement à ce que l’on croit, nous n’avons jamais eu autant de jeunes gens qui choisissent le latin en cinquième », en revanche, « Le problème est qu’en classe de seconde, ils ne sont plus que 18.000 et en terminale 10.000 […] Pour le grec, 14.000 élèves choisissent de l’étudier en troisième. Ils ne sont plus que 5.000 en seconde et 2.000 en terminale. »
Dans son article du Figaro daté du 4 mars dernier, Luc Ferry répond directement à l’appel lancé par Jacqueline de Romilly. Il annonce le gel provisoire des fermetures de sections pour la rentrée prochaine. Mais selon lui, « les faits sont têtus » : on ne peut maintenir les options de langues anciennes dans leur situation actuelle, car celles-ci ont perdu de leur légitimité aux yeux des usagers du collège et du lycée. Il faut donc à la fois que l’administration en tienne compte, et conférer à cet enseignement une nouvelle légitimité, que le ministre situe de nouveau du côté de la philosophie, sans justifier les raisons pour lesquelles les autres aspects (linguistique, poétique, artistique, scientifique, historique, etc.) lui paraissent secondaires.
Le ministre conclut sa tribune par trois propositions :
– une proposition pédagogique : « C’est par leur intérêt intrinsèque qu’il faut légitimer les études grecques et latines. »
– éviter l' »éparpillement, avec la dispersion de groupes optionnels trop réduits, peu stimulants sur le plan pédagogique et fragiles à terme en gestion ».
– Enfin, rendre tout son sens à la série L.
Dans l’immédiat, Luc Ferry annonce la création d’une université d’été sur le sujet. Le débat est ouvert ; c’est à chacun d’entre nous de se saisir de cette occasion. La café pédagogique s’en fera volontiers l’écho.
Appel de Jacqueline de Romilly, de l’Académie française :
http://www.librarius.net/appel.htm
Une pétition lancée par huit associations, dont la CNARELA, l’APLAES, SEL…:
http://www.cnarela.asso.fr/page_50.htm#2
Motion de l’APPEP (Association des professeurs de philosophie de l’enseignement public) :
http://www.appep.net/motlatgrec.html
Réponses de Luc Ferry :
http://perso.wanadoo.fr/yves.touchefeu/ferry.htm
http://www.lefigaro.fr/debats/20040304.FIG0263.html