Par François Jarraud
« Force est de constater que la confiance qu’accordent la société civile et les milieux politiques à la professionnalité enseignante se lézarde ». Ce constat pousse à la multiplication des évaluations et des contrôles, expliquent Alain Bouvier et Philippe Duval, dans l’introduction au n°48 de la Revue internationale d’éducation de Sèvres qui est dédié à « l’école et son contrôle ». Un numéro particulièrement bienvenu alors que l’on annonce la mise en place en France de nouveaux modes d’évaluation.
L’évaluation s’est généralisée, notent-ils, « mais dans une diversité considérable de pratiques ». Et la revue nous emmène visiter de près 7 systèmes éducatifs : l’Angleterre, le Chili, la Pologne, la Chine, le Pays basque, la Suisse et la France.
En Angleterre les lois de 1988 et 1997 ont abouti à un système multi contrôlé ce qui n’est pas sans poser la question de la transparence et de la démocratie. En Suisse, la montée des contrôles amène Matthis Behrens à poser la question de leur efficacité : on contrôle ce qui est facile mais peu utile. « Les tests basés sur les standards finissent par conditionner les curricula et l’enseignement » ce qui fait craindre leur diminution, selon un phénomène observé aussi aux Etats-Unis. Nathalie Mons, au terme d’une étude comparative sur 29 pays montre qu’un « accroissement du contrôle du travail enseignant se dessine progressivement sur les deux dernières décennies ». Ces évaluations portent plus sur les résultats que sur les processus aussi bien au niveau de l’école (how good is my school ?) que des enseignants. Au total, ce New Public Management « a fait progresser la reddition des comptes qui s’impose désormais aux enseignants » avec de forts enjeux de promotion à la clé. L’établissement scolaire devient donc un élément clé du pilotage et de son évaluation.
Pour Alain Bouvier, la question des modes et des acteurs de l’évaluation ne saurait faire oublier ce qui devrait être la préoccupation principale : celle des finalités de l’éducation. Ainsi en Suisse, note M Behrens « le contrôle du système se réduit à évaluer le rapport de conformité en termes d’efficacité et d’efficience des performances, Il n’est plus besoin de redéfinir le mandat sociétal de l’école. L’institution est immuable ». Est-ce l’objectif recherché ?
Revue internationale d’éducation de Sèvres, n°48, septembre 2008, CIEP.