C’est la plus jeune des vieilles disciplines. Les Sciences économiques et sociales fêteront leurs 50 ans l’année prochaine et l’Association des professeurs de SES (APSES) prépare l’anniversaire. L’association a tenu son assemblée générale annuelle les 4 et 5 juin. Elle a désigné son président : Erwan Le Nader. Il fait le point sur les ambitions et les revendications de l’Apses.
Avec 1706 adhérents, l’Apses franchit un nouveau cap de représentativité. Un professeur des SES sur trois adhère à cette association professionnelle. Cette dynamique reflète aussi les tensions que connait cette discipline qui reste sous surveillance patronale…
Les SES auront 50 ans l’année prochaine. Que prépare l’Apses ?
C’est en 1966-1967 que sont apparues les premières secondes AB, devenues ensuite ES. Pour les 50 ans nous préparons un grand site de témoignages où s’exprimeront d’anciens élèves, des enseignants et aussi de grands témoins de la naissance de cette discipline. L’anniversaire sera aussi célébré lors de grands événements, comme les Journées de l’économie ou le Printemps de l’économie. Et notre association prépare des « balades économiques et sociales », ouvertes au public, dans plusieurs villes comme Paris, Nantes, Lyon et Grenoble.
Comment se portent les SES aujourd’hui ?
On est à l’âge de la maturité. On a vu les effectifs exploser en série SES et celle-ci répondre à une demande sociale : former les jeunes à l’analyse de problèmes économiques et sociaux en associant l’économie, les sciences sociales, les sciences politiques et l’histoire économique. C’est un bilan dont on peut être fier.
Les SES ont longtemps été critiquées par les milieux patronaux et le tout récent rapport d’orientation parle encore de s’opposer à « une promotion des entreprises ». Où en êtes vous ?
Les SES veulent analyser le monde contemporain. Elles ne veulent pas promouvoir la vision d’un acteur contre celle d’un autre acteur. Ceci dit, l’expérience nous a appris que régulièrement les SES étaient remises en cause. Ce fut le cas en 2010 avec les nouveaux programmes de lycée réécrits pour répondre aux critiques patronales.
Vous demandez la généralisation des SES en seconde. Mais n’est ce pas acquis ?
Actuellement 85% des élèves des secondes générales et technologiques suivent l’enseignement d’exploration de SES. Mais celui ci est réduit à 1h30, très souvent en classe entière. Or les SES ont besoin de temps car il faut mettre les élèves en activité. Les SES préparent les jeunes à la compréhension du monde. C’est quelque chose de fondamental. C’est pourquoi nous demandons que les SES soient une discipline du tronc commun.
Il faut aussi savoir que la filière ES est la moins bien dotée en heures de toutes les filières générales et technologiques selon le rapport de la Cour des comptes. Nous demandons l’égalité sur ce terrain là aussi et des moyens pour les dédoublements.
Récemment on a appris que le programme de seconde sera allégé. Qu’en est-il exactement ?
C’était une revendication de l’Apses soutenue par de nombreux syndicats. Le ministère a fait savoir qu’elle serait satisfaite à la rentrée prochaine. On passera de 8 chapitres , 5 obligatoires et 3 au choix, parmi les 10 chapitres du programme à 4 obligatoires et 2 au choix.
L’Apses s’est battue contre les programmes de 1ère et terminale. Pensez vous obtenir gain de cause ?
On a obtenu de Vincent Peillon des allègements. On demande une réécriture des programmes. On veut des programmes plus pluralistes, plus cohérents et moins encyclopédiques. Les programmes actuels nous semblent en contradiction avec ce que sont les ES. Par exemple l’épreuve d’épreuve composée demande de rédiger une démonstration. C’est très unilatéral. Ce n’est plus l’esprit des SES qui est un esprit critique et citoyen.
On retrouve cela dans ces programmes qui séparent l’économie des sciences sociales alors qu’en SES on devrait les confronter.
Vous demandez aussi le recrutement d’enseignants. Pourquoi ?
On est une discipline avec un taux très élevé de contractuels : 8%. Cela alors qu’on a beaucoup plus de candidats que de postes. Le concours est un des plus sélectifs de l’éducation nationale. On pourrait donc augmenter le nombre de titulaires en augmentant celui des postes. Puisque le ministère a du mal à recruter globalement des enseignants, les SES peuvent l’aider…
Les SES sont-elles restées une discipline très différente des autres ?
Elles l’étaient lors de la création des SES. L’enseignement à cette époque là était très magistral. Or les SES mettaient les tables en U, faisaient travailler les élèves sur des dossiers documentaires. Tout cela était innovant.
Ca l’est moins maintenant car les autres disciplines ont évolué. Mais l’esprit des origines, comprendre le monde d’aujourd’hui, est toujours là.
Propos recueillis par François Jarraud