Par François Jarraud et Patrick Picard
Xavier Darcos est le nouveau ministre de l’Education. Gageons que c’est donc, selon la philosophie de M. Sarkozy, le « meilleur » pour faire le job. Une chose est certaine, il connaît la maison : agrégé, docteur en lettres et sciences humaines, inspecteur général depuis 1992, directeur de cabinet de F. Bayrou en 1993, puis conseiller pour l’éducation et la culture du Premier Ministre (A. Juppé), ministre de l’enseignement scolaire du gouvernement Raffarin en 2002. C’est aussi un politique qui s’assume, membre fondateur et dirigeant de l’UMP, maire, député, sénateur…
Plutôt que de s’en remettre à des commentaires plus ou moins flatteurs sur l’homme, quelques éléments extraits de deux sources permettent de mieux connaître son programme et sa pensée.
Sur le premier point nous faisons appel au rapport remis par X. Darcos à Nicolas Sarkozy, « Propositions sur la situation morale et matérielle des professeurs en France », en pleine campagne électorale le 10 mars 2007. Le texte de rapport est consultable à http://www.lalettredeleducation.fr/IMG/doc/Rapport_Darcos.doc .
Sur le second point on fera appel à son blog qu’il tient depuis 2005. Il était encore accessible le 20 mai 2007 mais le ministre y faisait ses adieux. On peut le consulter : http://xavierdarcos.blogspirit.com/ .
Un programme : le rapport de mars 2007
A propos des décharges supprimées par Robien
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« Ce qui est fâcheux dans cette affaire, c’est que cette décision assez brutale, qui est prévue pour s’appliquer dès septembre prochain, frappe presque exclusivement les meilleurs de nos professeurs, ceux qui enseignent en terminale ou dans certaines classes préparatoires (type BTS). Ils correspondent exactement à ce que vous avez souhaité dans vos discours d’Angers et de Maison-Alfort : ils font partie de ceux qui s’engagent, qui ont du mérite, qui assument des tâches supplémentaires. Il était normal qu’ils soient mieux rémunérés que ceux qui préfèrent simplement assurer leur service minimum. Vous devrez donc laisser entendre que vous reviendrez sur la décision prise par Gilles de Robien. Car il ne s’agit pas corriger – à la marge et unilatéralement – les services des enseignants, en les pénalisant tous à la fois, mais de remettre à plat les circulaires qui règlent les obligations de service et de redessiner le métier de professeur aujourd’hui, lors d’une table ronde globale qui pourrait se tenir avant l’été, à l’initiative du Gouvernement ».
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« Une table ronde avant l’été pour redéfinir les ORS (obligations réglementaires de service) des enseignants et pour remplacer les décrets de 1950.
Dans l’attente, proposer un moratoire ou une suspension du décret de Robien du 14 février 2007 sur la suppression des décharges pour responsabilités exceptionnelles. Ce décret cristallise toutes les oppositions car il supprime 45 000 heures à la rentrée 2007, soit 2 800 équivalents temps plein 1″.
Sur les salaires : comment revaloriser sans augmenter le budget…
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« Des marges de manœuvre et de négociations existent : encore environ 20 000 ETP [équivalents temps plein] de décharges et MAD [mises à disposition] sont récupérables. De même, la population scolaire du 2nd degré a diminué de 15 % en dix ans, ce qui allège certaines charges. Des marges de manœuvre existent aussi sur les grilles horaires, en particulier en lycée, où la France se distingue par l’abondance de son offre d’enseignement. Ces marges de manœuvre seront bien utiles pour financer d’une part la revalorisation liée au « travailler autrement ». Récemment, trois « audits de modernisation », commandés par le Budget, sur la gestion des moyens (en collège, lycée et lycée professionnel) sont venus démontrer qu’un effort de rationalisation est possible. Mais, à ce stade, il est probablement difficile d’en faire un usage rapide. Sachons simplement que nous disposons d’une dose de redéploiement possible ».
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« On pourrait par exemple décider que tous les cours inscrits à l’emploi du temps sont dus aux élèves, quoi qu’il arrive – encore un droit « opposable », en quelque sorte – et charger l’établissement d’y pourvoir : les H.S. [heures supplémentaires] en seraient sensiblement augmentées. Il est également possible d’augmenter les rémunérations en qualifiant en H. S. les actes réalisés dans le champ éducatif : études surveillés, soutien, tutorat, réalisation de documents d’accompagnement en ligne, encadrement d’activités diverses.
De nouvelles fonctions – rémunératrices – peuvent aussi être créées ou revalorisées. D’abord, l’organisation du « soutien scolaire », assuré par les enseignants volontaires et rémunéré en heures supplémentaires, offrira des perspectives intéressantes.
Mais d’autres activités sont possibles. Donnons quelques exemples :
– responsable ou coordonnateur de département (langues, sciences, etc.), sorte d’équivalent du « chef de travaux » pour les séries professionnelles ;
– maître formateur (à créer dans le second degré) ;
– adjoint au chef d’établissement (dans le cadre d’une réforme du statut des personnels de direction) ;
– responsable de projet éducatif (à l’échelle d’un bassin) ;
– formateur d’adultes ;
– « Prag » (professeur agrégé mis à disposition de l’enseignement supérieur) ; etc. «
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Les esprits sont mûrs pour que soit valorisé, dans tous les sens du terme, le soutien scolaire. Un récent sondage a montré que 79% des professeurs seraient prêts à consacrer du temps de travail supplémentaire au soutien scolaire en échange d’un supplément de rémunération. Il y a là une piste intéressante politiquement, non seulement pour alimenter le new deal proposé ici, mais aussi pour développer le thème de l’égalité des chances. Dans les zones et quartiers difficiles, il ne serait pas anormal que la puissance publique offre aux élèves, de manière plus organisée et plus systématique, un soutien scolaire gratuit à tous les élèves qui en ont besoin.
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Créer une prime de métier, selon du typologie des métiers à lister lors de la table ronde générale.
Augmenter le stock des H.S. (heures supplémentaires) mises à la disposition de l’établissement et abroger le décret du 30/07/98 réduisant de 17 % le taux des H.S. par rapport à l’heure normale.
Prévoir la rémunération, pour les volontaires, de travaux de soutien scolaire de toute nature.
Sur le métier d’enseignant
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« Il est désormais impossible d’accepter la façon dont se calcule le temps de travail des enseignants : il est défini exclusivement par une obligation horaire de cours à donner ».
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« Définir une « typologie » des métiers de l’enseignement aujourd’hui. Il faudra distinguer les diverses situations professionnelles, lesquelles n’existaient pas en 1950. Par exemple : professeur de collège dans un quartier sensible ; professeur de lycée des métiers ; professeur de BTS ou de classes préparatoires ; formateur ; conseiller pédagogique ; professeur principal ; responsable d’un projet éducatif ; professeur dans un IME [Institut médico-éducatif], etc. Cette typologie comprendrait une description des « actes professionnels » afférents à ces métiers. Les obligations réglementaires de service et les rémunérations principales et indemnitaires seraient établies sur cette base fonctionnelle ».
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« Le moment est venu par exemple de poser la question de l’annualisation des services d’enseignement, et donc de l’annualisation des horaires eux-mêmes. Une garantie pourrait ainsi être donnée aux familles que, quoi qu’il arrive, l’horaire annuel prévu sera assuré (ce qui permettrait peut-être, au vu du constat que toutes les heures ne sont pas faites aujourd’hui, de justifier son allègement, notamment et en lycée) ».
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« L’évaluation des professeurs devra être complètement revue. Les résultats et performances de l’établissement seraient rendus publics tous les ans. Les professeurs dont les élèves auront progressé ou réussi leurs examens ou certifications, les professeurs qui auront conduit avec succès à leur terme des projets pédagogiques ou éducatifs pourront bénéficier de primes. Le chef d’établissement serait dans ce cadre le principal évaluateur des personnels. Les corps d’inspection n’interviendraient dans l’évaluation de personnels que dans quelques cas précis : manquement graves, excellence et promotion ».
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« Affecter les agrégés conformément à leur statut (lycée, classes préparatoires) ».
Un tableau annexe présente les heures effectuées parles enseignants en Europe (heures de cours et de présence) : France 648 à 540, Danemark et Suède 1480, Espagne 1200, Royaume-Uni 1265.
Sur les établissements
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« L’école ne se refondera pas par la nostalgie et le retour aux blouses grises. Au contraire, il faut que les établissements respirent à leur rythme, disposent d’une plus grande autonomie, se sentent responsables et incités à l’initiative. La gestion centralisée et l’injection massive de moyens venus d’en haut ne produisent pas les résultats escomptés, comme on l’a vu pour les ZEP. C’est aux établissements de choisir leurs moyens, notamment pédagogiques, d’atteindre aux objectifs nationaux. Dotés d’un contingent horaire complémentaire spécial, ils doivent organiser librement leur politique éducative et notamment rétribuer des séquences pour les élèves en situation difficile ».
Sur les parents
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« Le milieu éducatif considère d’ailleurs, à juste titre, qu’on ne peut traiter du statut des professeurs sans exiger le retour dans les classes de la discipline, du savoir-vivre, de la politesse élémentaire. Pour légitimer le professeur, il convient de commencer par le respect qui lui est dû de la part les élèves. Il en va de même pour les familles, quand elles contestent par exemple des décisions de redoublement ou des avis donnés par des Conseils de classe ».
Sur la pédagogie
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« On s’est trop fié à l’autonomie de l’enfant, à son propre projet, à ses sensations immédiates. La liberté n’est pas un point de départ mais d’arrivée, ce qui suppose de l’effort et des exigences ».
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« La relation professeur/élève est organisée dans un groupe, dans une classe. Aujourd’hui la constitution de ces classes ne permet pas toujours de construire positivement cette relation du fait d’un certain nombre d’élèves en difficulté qui empêchent le fonctionnement normal. Le dogme de la classe hétérogène, facteur d’inégalité des chances, doit être abandonné au profit d’une conception plus réaliste du groupe – classe ».
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« De l’avis général, dans les collèges, un petit nombre d’élèves, le plus souvent des garçons, pas plus de deux ou trois par classe, perturbent gravement son fonctionnement. Par idéologie, faiblesse de l’institution, blocages divers, les chefs d’établissement et les professeurs sont désarmés pour casser le phénomène qui, au contraire, s’accentue. L’égalité des chances offerte à tous les élèves est ainsi gravement compromise. La mise en place de classes de remotivation pourrait être de nature à résoudre ce problème. Il s’agit de regrouper une dizaine d’élèves venant de plusieurs établissements et solidement encadrés avec un programme centré sur les éléments fondamentaux susceptibles de donner une confiance nouvelle à l’élève ».
Une pensée sur l’Ecole : extraits du blog de X. Darcos
Sur la Mission de l’Ecole : « souviens-toi de te méfier ». A méditer…
A lire avec attention, et éventuellement entre les lignes : devant quel spectacle médiatique M. Darcos nous demande-t-il d’apprendre la vigilance aux élèves ?
« Regardons ce qui se passe dans nos écoles, tout simplement : parce qu’il est soumis au despotisme de l’actuel, où la culture, au sens classique, a peu de poids, l’enseignement tend à moraliser plus qu’à instruire. Obsédé par l’éveil des consciences, il évolue dans l’incertitude de sa mission, doute de la vérité de ce qu’il doit inculquer, se sent invité à repousser toute hiérarchie des savoirs. C’est alors la société du spectacle qui infuse ici ses manies et son vocabulaire, ses coups de cœur et son aphasique grandiloquence. Pourtant l’école a un devoir exactement inverse : celui de résister à la puissance de l’opinion, de délivrer les jeunes des subordinations culturelles du moment, des idéologies girouettes ou des médiatisations dominantes. Ennemie du préjugé, de la mode, de l’inconstance événementielle, des versatiles sondages liés aux audiences ou à la popularité, l’école, loin d’épouser toutes les causes emphatiques et tous les prêchi-prêcha du moment, devrait faire sienne la devise de Mérimée : « souviens-toi de te méfier ». Car c’est moins la liberté d’opinion qui est ici menacée que l’aptitude à penser. Pour former des esprits libres et aptes à la critique, il convient auparavant de les mettre à distance de ce qu’ils perçoivent et reçoivent, de les protéger des purs impératifs d’un jour, de l’arbitraire et du relatif. Ils apprendront ainsi à gérer leur futur statut de personne juridiquement libre, civiquement responsable, moralement structurée. Ils sauront qu’une vraie tolérance suppose d’abord une difficile adaptation à l’inconnu, à l’incompris, à l’autre, et non une adhésion dogmatique à l’amour universel. Face au culte de la sensation et de l’émotion, l’enseignement est un contre-pouvoir. Certes, il rappelle l’interdépendance des êtres, dans le présent comme dans la chaîne des temps, mais il récuse le préjugé. »
Sur l’Ecole et la Culture
« Dans le domaine des politiques culturelles, la vraie priorité, ce sera toujours l’enseignement artistique. Car c’est avec les jeunes que tout se joue. Si on ne leur donne pas le goût de la lecture, si on ne les rend pas curieux de ce qui est beau, si on ne les met pas en contact avec les grandes œuvres de la sensibilité et de l’esprit humain, si on ne leur transmet pas une culture commune, on les privera d’un trésor inestimable. (…)
Dans cette action culturelle, l’école a beaucoup à donner aux territoires. Qu’elle soit un lieu ouvert, un lieu de ressource à l’usage de toute la population, à l’image de ce qu’est aujourd’hui une bibliothèque, un centre culturel, ou un équipement associatif. Il est dans la mission de l’école républicaine d’être une maison du citoyen, pour que n’importe lequel des citoyens puisse utiliser le CDI, les équipements, et mieux encore partager avec la communauté éducative le goût pour le savoir, l’innovation et la culture.(…) Il faut travailler à cette nouvelle donne. Les projets d’établissements, les contrats éducatifs locaux, ne sont en rien contradictoires dans leur principe avec une plus large place faite aux exigences éducatives territoriales.
Ce que nous voulons donc, c’est la culture à l’école et une école plus proche, plus ouverte à la population. Nous voulons lui donner toute sa dimension de chose publique, de maison républicaine, de maison de la « culture » dans toute la pluralité du mot. Voilà un beau projet pour le quinquennat !
Sur les missions de l’Ecole et les « pédagogistes » prédicateurs…
« L’enquête devient sans fin ni direction, ce qui fait les choux-gras des inféconds chercheurs en sciences de l’éducation. On doit ensuite se demander pourquoi l’appropriation du savoir, dès l’école, devrait privilégier la concurrence individuelle et la compétition, au détriment des formes de travail en équipes et de coopération entre les élèves ; pourquoi même le professeur devrait détenir un niveau universitaire élevé, qu’il n’a guère l’occasion de mobiliser au quotidien ; pourquoi enfin ne pas se contenter d’une formation professionnelle, initiale et continue ; ou même la réduire à des stages répétés dans les établissements « sensibles » ou dans les zones dites « prioritaires » (cruels euphémismes), pour qu’ils s’accoutument à la doctrine minimale et à l’école des pauvres. Autant dire qu’il faut tout lâcher, pour aboutir à l’inverse de ce que nous croyons être la mission de l’école.
C’est au carrefour de ces inusables casse-tête que se place le discours sur la pédagogie, synthèse d’une capacité disciplinaire et d’un art de faire partager le savoir. Mais ne nous leurrons pas : le primat de la nécessaire transmission des connaissances n’est discuté que par les seconds couteaux ou par les commentateurs professionnels des officines exclusivement « pédagogistes ». La seule question qui vaille, une fois qu’on a ergoté et tournicoté autour de faux problèmes, est celle-ci : pourquoi l’armada éducative produit-elle tant d’ignorants, d’illettrés, et de jeunes dégoûtés du savoir ou infantilisés ? À quoi sert l’assemblée foisonnante et bavarde des experts, des évaluateurs, des réformateurs, des prêcheurs ou des inquisiteurs ? Car l’élève ne semble pas être mieux traité que naguère, malgré l’armée des prédicateurs : il meurt en bonne santé ».
L’enseignant, la classe
« Chacun des 1 100 000 agents de l’éducation nationale a son rôle. Mais le succès de l’ensemble repose sur le professeur dans sa classe. C’est lui seul qui constitue le point fort de notre système éducatif, la cellule de base d’où tout procède. Changez les théoriciens de la pédagogie, les sociologues de tout acabit, les commentateurs avisés, les illisibles docimologues, les professionnels du cours théorique, les énarques de l’administration centrale, les pondeurs de circulaires, les harceleurs textuels, les ministres de passage : vous ne toucherez pas l’essentiel. Installez un mauvais professeur dans une classe : tout s’écroule. D’ailleurs les utilisateurs de l’école ne s’y trompent pas : la qualité des maîtres est généralement reconnue. Mais, dans un monde où les résultats mesurables et comptables dominent de plus en plus la représentation sociale, cette image favorable n’est pas acquise une fois pour toute. Il suffit de se rappeler la facilité avec laquelle Claude Allègre avait construit sa notoriété sur la dénonciation du « professeur fainéant et/ou absent ». Ségolène Royal véhicule encore le même insultant préjugé, en invitant les enseignants à « faire leurs 35 heures ». »
Professeurs : respect et respiration…
« La question centrale qui se pose est celle-ci : comment replacer, mieux qu’aujourd’hui, la relation enseignant/enseigné dans une dynamique de confiance et de succès, donc comment revaloriser matériellement et moralement la fonction enseignante ? Les professeurs ont besoin de respect et de respiration. Pour des raisons démographiques, la moitié des professeurs devra être remplacée dans les dix années qui viennent. L’attente de ces nouvelles générations fait que l’Etat doit être en mesure de leur proposer plus d’ouverture dans leurs perspectives professionnelles. Il est souhaitable de leur offrir par contrat la possibilité de passer une année complète en dehors de leur établissement, de voyager, d’échanger. Une formation universitaire en France ou à l’étranger, un travail dans une collectivité locale, une entreprise, une association, une organisation internationale etc. peuvent constituer dans une carrière un élément important de consolidation ou de nouvelle orientation. »
Salaires
« La politique quantitative a atteint ses limites : ni l’économie ni la démographie de notre pays ne demandent d’augmenter le nombre de professeurs. Le recrutement nécessaire au remplacement des départs massifs en retraite sera d’ailleurs difficile. Mais il ne faut plus éluder la question des salaires : est-il normal qu’un professeur certifié, qui a passé un concours de bon niveau scientifique avec une chance sur 10 ou 20 d’y être admis, commence avec un salaire qui équivaut à 1,3 Smic ? Je ne le crois pas. »
Carte scolaire
« Nous savons tous que le système de la carte scolaire ne fonctionne plus. Conçue comme un outil de mixité sociale lors de sa création, elle produit aujourd’hui les conditions de la ségrégation sociale.
Il n’y a de sectorisation que pour ceux qui ne savent pas comment on peut la contourner. Les stratégies d’évitement se raffinent d’année en année. L’achat immobilier, le choix des options, ou l’inscription dans un établissement privé par exemple sont des moyens qui ne peuvent être déployés que par les familles aisées ou diplômées.
(…) Il faut remplacer la carte scolaire par une multitude de solutions adaptées aux besoins locaux. Car le problème de l’évitement ne se pose pas de la même façon dans une petite ville ou à Paris. A Périgueux, ville où je suis maire, la carte scolaire n’est pas un problème. Je pourrais même m’en passer car les demandes s’autorégulent. Ce n’est pas le cas dans les grandes villes.
Aujourd’hui, la carte scolaire n’offre pas de seconde chance aux parents, soit ils doivent la contourner, soit si ça ne marche pas ils partent vers des établissements privés. Il faut casser de façon radicale cette illusion de règle générale. »
Bibliographie récente de Xavier Darcos :
L’Art d’apprendre à ignorer, Plon 2000
Selon l’éditeur : « un livre d’humeur et d’humour, mais fondé sur des données objectives, sur les méthodes et les résultats de l’idéologie scolaire française. »
Deux voix pour une école, avec P. Meirieu, Desclée de Brouwer, 2003
« Issus de familles politiques opposées, partisans de méthodes d’enseignement radicalement différentes, les deux hommes se retrouvent cependant autour d’un même attachement à l’Ecole de la République et à ses idéaux fondateurs. »
L’Ecole de Jules Ferry (2005, Hachette)
Une relecture de l’Ecole de la République et de ses idéaux
L’Etat et les Eglises (2006)
Selon l’éditeur, « Xavier Darcos popose une histoire de la laïcité à la française qui permet de replacer dans son contexte ce pilier de la République, et trace les contours de ce que devrait être aujourd’hui une France laïque moderne, ferme sur ses principes mais ouverte à la diversité. »
Tacite, ses vérités sont les nôtres, Plon, 2007
Selon l’éditeur, « Tacite est le témoin passionné et complexe d’une période « déchirée et féroce », où l’idéal républicain est une cause déjà perdue. Face au déclin, il essaie de comprendre ce qui s’est passé et où tout cela conduit, développant de larges réflexions morales autour du passé qu’il ressuscite, interrogeant la notion de citoyenneté et le poids de l’Histoire, confrontant le pouvoir et la barbarie. «