Participer aux jurys des examens et concours
A l’approche de la fin d’année, nous allons étudier, ce mois, les dispositions relatives aux examens et concours.
I) Une charge normale d’emploi
L’obligation pour les enseignants de participer aux jurys des examens et concours est posée par le décret du 17 décembre 1933 :
Article premier « Est considérée comme une charge normale d’emploi, l’obligation pour les personnels des établissements d’enseignement relevant du ministère de l’Education nationale, de participer aux jurys des examens et concours pour lesquels ils sont qualifiés par leurs titres ou emplois.»
Ainsi donc, sauf cas de force majeure, le fait, pour un enseignement appelé à participer à un jury d’examen, de ne pas accomplir normalement toutes les tâches résultant de cette fonction est juridiquement assimilable à un acte de grève ou une absence injustifiée et peut entraîner une retenue sur traitement.
Vous êtes soumis aux mêmes obligations en ce qui concerne votre participation à des jurys d’examens ou de concours organisés par d’autres administrations ou par des collectivités locales puisqu’elles sont considérées comme une activité accessoire normale. Sachez toutefois que, dans ce cas, votre autorité hiérarchique doit donner un accord préalable explicite et que la convocation des enseignants à ces jurys doit se faire sous son couvert.
Enfin, au delà des corrections de copies, interrogations orales et délibérations, rappelez-vous que la participation aux examens et concours implique la participation aux réunions d’entente et d’harmonisation qui ont pour but de poser les principes communs de notation et de réviser certaines notes après les corrections.
La notion de service non fait, telle qu’elle est définie par la jurisprudence, est très large.
Ainsi, la non remise de note d’examen ou la non participation à une réunion de coordination est assimilée à une absence de service fait et justifie de ce fait une retenue de traitement.
Et de fait, en l’absence de service fait, le traitement de l’intéressé sera automatiquement retenu selon la règle du 30ème.
Mais, plus grave, au delà de cette retenue, il sera aussi loisible à l’administration d’engager une procédure disciplinaire en cas de refus manifeste et non motivé de se plier à cette obligation de service qu’est la participation aux jurys d’examens et concours…
Un conseil donc : surveillez vos convocations qui normalement doivent vous être remises en mains propres.
II) Les grèves durant les examens
Si l’usage du droit de grève durant les examens ne peut vous être contesté, il pose immanquablement le problème de la réquisition des fonctionnaires que l’utilisation d’une sémantique administrative travaillée n’éclaircit pas.
Dans les faits, la « réquisition » de fonctionnaires par un Chef de service ne peut intervenir que lorsque la nation est en danger et après décision d’ouverture de ce droit de réquisition en Conseil des Ministres.
En revanche, la jurisprudence permet de « requérir » un agent gréviste par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise en main propre contre signature en cas de besoin urgent d’ordre ou de sécurité publique.
Il est fort probable que ce n’est pas le cas des examens, ce qui explique sans doute pourquoi, jusqu’à présent, aucun ordre de réquisition formel n’a jamais été utilisé par l’administration à l’encontre des professeurs grévistes durant ces périodes.
Mais, en application de l’article 28 de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, un fonctionnaire doit se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique, sauf dans le cas où l’ordre donné est manifestement illégal et de nature à compromettre gravement un intérêt public.
Ces deux conditions étant cumulatives, vous ne pourrez donc, si vous recevez une décision de votre Chef de service adressée en lettre recommandée avec accusé de réception ou remise en main propre contre signature, de vous « requérir », refuser d’obéir à cet ordre.
En effet, si cet ordre est manifestement illégal pour les raisons que nous venons d’évoquer, il ne compromettra pas gravement un intérêt public et vous ne pourrez donc refuser d’y obéir.
Cela étant, ce caractère illégal vous permettra, par la suite, de le faire annuler par le Tribunal administratif et d’exercer un recours indemnitaire auprès du même tribunal.
III) Une charge de service qui doit être défrayée
Les modalités de remboursement des frais afférents aux examens sont fixées par le décret n°2006-781 du 3 juillet 2006 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements temporaires des personnels civils de l’État.
On retiendra :
· Qu’un agent en mission est un agent muni d’un ordre de mission qui se déplace, pour l’exécution du service, hors de sa résidence administrative et hors de sa résidence familiale ;
· Que la Résidence administrative est le territoire de la commune sur lequel se situe le service où l’agent est affecté ou l’école où il effectue sa scolarité. Lorsqu’il est fait mention de la résidence de l’agent, sans autre précision, cette résidence est sa résidence administrative ;
· Que la résidence familiale est la commune sur lequel se situe le domicile de l’agent ;
· Que constitue une seule et même commune, toute commune et les communes limitrophes, desservies par des moyens de transports publics de voyageurs (sauf quelques rares situations particulières)
- Qu’il n’y a pas de remboursement sans ordre de mission.
- Que l’ordre de mission vous couvre en cas d’accidents ou maladies qui pourraient survenir durant ces périodes de service en dehors de l’établissement ou sur les trajets pour vous y rendre…
La mission commence à l’heure de départ de la résidence administrative ou de la résidence personnelle et se termine à l’heure de retour à cette même résidence, le choix entre la résidence administrative ou personnelle correspondant au lieu du départ effectif.
Cette durée de mission est forfaitairement augmentée d’une demi-heure avant l’heure de départ et après l’heure de retour si vous utilisez les transports en commun.
L’article 3 du décret précité dispose que lorsque l’agent se déplace pour les besoins du service hors de sa résidence administrative et hors de sa résidence familiale à l’occasion d’une mission, il peut prétendre :
· A la prise en charge de ses frais de transport sur production des justificatifs de paiement auprès du seul ordonnateur ;
· A des indemnités de mission qui ouvrent droit, cumulativement ou séparément, selon les cas, au remboursement forfaitaire des frais supplémentaires de repas et au remboursement forfaitaire des frais d’hébergement.
A) Les frais de transport
L’article 4 précise du décret précité dispose que :« Lorsque l’agent se déplace à l’intérieur du territoire de la commune de résidence administrative, de la commune où s’effectue le déplacement temporaire, ou de la commune de résidence familiale, ses frais de transport peuvent être pris en charge sur décision de l’autorité administrative lorsque la commune considérée est dotée d’un service régulier de transport public de voyageurs.
Cette prise en charge est effectuée dans la limite du tarif, ou pour l’agent qui se déplace fréquemment, de l’abonnement le moins onéreux du transport en commun le mieux adapté au déplacement.
Ces modes d’indemnisation ne sont pas cumulables entre eux ni avec d’autres indemnités ayant le même objet. »
Ce qui implique que vous serez nécessairement remboursé au tarif transport en commun et non au tarif véhicule personnel en cas de déplacement à l’intérieur des trois communes citées.
Si vous préférez votre véhicule personnel, cela sera à vos frais.
L’article 9 du même décret dispose : « Le service qui autorise le déplacement choisit le moyen de transport au tarif le moins onéreux et, lorsque l’intérêt du service l’exige, le plus adapté à la nature du déplacement.
Les déplacements effectués par l’agent entre son domicile et son lieu de travail ne donnent lieu, sous réserve des dispositions des décrets des 18 octobre 1982 et 1er juillet 1983 susvisés, à aucun remboursement. »
Ainsi donc, vous n’êtes donc pas habilité à choisir le mode de déplacement et son tarif et vous ne serez pas remboursé de vos frais de déplacement entre votre domicile et votre établissement d’affectation.
Attention : tout changement du mode ou du tarif de déplacement choisi par le service pourrait non seulement vous exposer à un refus de remboursement, mais aussi à une absence de couverture en cas de maladie ou d’accident de service survenant durant un déplacement effectué par un moyen de transport non autorisé.
L’article 10 du décret précité pose les conditions d’utilisation du véhicule personnel : « Les agents peuvent utiliser leur véhicule terrestre à moteur, sur autorisation de leur Chef de service, quand l’intérêt du service le justifie.
En métropole et outre-mer, l’agent autorisé à utiliser son véhicule terrestre à moteur pour les besoins du service est indemnisé de ses frais de transport soit sur la base du tarif de transport public de voyageurs le moins onéreux, soit sur la base d’indemnités kilométriques, dont les taux sont fixés par un arrêté conjoint du Ministre chargé de la fonction publique, du Ministre chargé du budget et du Ministre chargé de l’outre-mer.
L’agent en poste à l’étranger, autorisé à utiliser son véhicule terrestre à moteur pour les besoins du service, est indemnisé de ses frais de transport sur la base d’une indemnité kilométrique forfaitaire calculée selon une formule fixée par un arrêté conjoint du Ministre chargé des affaires étrangères, du Ministre chargé de la fonction publique et du Ministre chargé du budget.
L’agent qui utilise son véhicule terrestre à moteur n’a pas droit au remboursement des impôts, taxes et assurances qu’il acquitte pour son véhicule.
Il doit avoir souscrit au préalable une police d’assurance garantissant d’une manière illimitée sa responsabilité au titre de tous les dommages qui seraient causés par l’utilisation de son véhicule à des fins professionnelles.
L’agent qui a utilisé son véhicule personnel est remboursé, sur autorisation du Chef de service, des frais d’utilisation de parcs de stationnement et de péage d’autoroute sur présentation des pièces justificatives au seul ordonnateur, quand l’intérêt du service le justifie et dès lors que ces frais n’ont pas été pris en charge au titre du 2° de l’article 3.
En toute occurrence, l’agent n’a droit à aucune indemnisation pour les dommages subis par son véhicule. »
Voilà qui a le mérite d’être clair : si vous utilisez votre véhicule personnel lors de vos missions ou convocations, vous ne pourrez en aucun cas être remboursé de votre franchise d’assurance ou des dégâts subis par votre véhicule.
D’autant plus, qu’aucun texte ne vous oblige à utiliser votre véhicule personnel pour remplir des missions pour le compte de l’Etat.
Aussi, quand vous ne pouvez pas faire autrement que d’utiliser un véhicule à moteur pour exécuter la mission qui vous est confiée, demandez au Chef d’établissement l’autorisation d’utiliser le véhicule de l’établissement, ou bien demandez-lui de souscrire une police d’assurance couvrant les enseignants qui utilisent leur véhicule personnel lors de leurs déplacements professionnels.
Cette dernière solution, actuellement en usage dans de nombreux établissements publics, est de loin la meilleure et la plus souple.
Mais attention aux dispositions de l’article 11 : « Lorsque l’agent a utilisé un véhicule personnel, autre qu’un véhicule mentionné à l’article 10, un taxi, ou un véhicule de location, il est remboursé des frais occasionnés sur autorisation du Chef de service, sur présentation des pièces justificatives au seul ordonnateur, quand l’intérêt du service le justifie, et dès lors que ces frais n’ont pas été pris en charge au titre du 2° de l’article 3. »
De fait, vous ne serez remboursé que si vous avez eu l’autorisation préalable de votre Chef de service pour engager ces frais.
B) Les frais de repas et d’hébergement
Vous avez droit au remboursement forfaitaire des frais supplémentaires de repas lorsque vous vous êtes en mission entre 11 et 14 heures pour le déjeuner et entre 18 et 21 heures pour le dîner et au remboursement des frais de chambre et le petit-déjeuner lorsque vous êtes en mission entre minuit et cinq heures.
Attention à la mention sur « la possibilité de se rendre dans un restaurant administratif ou d’être hébergé dans une structure dépendant de l’administration moyennant participation » : si une telle possibilité vous est offerte l’administration ne vous remboursera pas les repas ou l’hôtel en intégralité.
Sachez enfin que des avances pourront vous être consenties si vous en faites la demande dans la limite de 75 % des sommes présumées dues à la fin de la mission.
IV) Les incidences sur le traitement
Si l’agent en mission continue à percevoir le traitement, les suppléments pour charges de famille et les indemnités attachées à son emploi au lieu de sa résidence administrative, les indemnités de mission ou de stage ne peuvent se cumuler avec d’autres indemnités ayant le même objet.
Ainsi, elles ne sont pas cumulables avec l’indemnité journalière de sujétions prévue par le décret du 15 octobre 2004 susvisé, ni avec l’indemnité de résidence attribuée en application du quatrième alinéa de l’article 5 du décret du 28 mars 1967 susvisé.
Mais, comme il y a fort à parier que ce non-cumul va créer quelques difficultés à l’administration et risque de se révéler quelque peu difficile à mettre en œuvre, il n’y a guère de raison de s’inquiéter. Enfin pour l’instant.
Le deuxième alinéa de l’article premier du décret du 17 décembre 1933 dispose que : « Il ne peut être accordé de rémunération particulière, dans les conditions et d’après les modalités qui seront fixées ultérieurement par décrets contresignés par le Ministre du Budget, que pour les jurys de certains examens ou concours limitativement énumérés, et pour la correction des compositions écrites entraînant un dépassement de la durée normale du travail, par suite de l’obligation où se trouvent les intéressés d’effectuer cette correction dans des délais limités. »
De fait, seules des indemnité pour travaux supplémentaires et des indemnités de membres de jury dont les montants varient selon le type d’épreuve et le niveau de celles ci, peuvent être payées.
Et comme, dans le même temps, toute journée de participation rémunérée à un jury entraîne une retenue de 1/270ème par HSA versée, le gain peut donc être inexistant.
Cela étant, dans certains cas, le paiement d’heures supplémentaires pourra être demandé à l’administration.
En effet, un enseignant ayant une obligation de service de 18 heures de cours, soit 39 heures normales par semaine, les heures de surveillance d’examen qui n’ouvrent pas droit à rémunération doivent être rémunérées en heures supplémentaires lorsque le total heures de cours coefficientées + heures de surveillances d’examen dépasse ce maxima de 39 heures normales.
Ainsi, un enseignant qui surveille des examens un mercredi pendant six heures, alors que son emploi du temps fixe son service les lundis, mardis, jeudis et vendredis, pourra prétendre à six heures supplémentaires normales (et non d’enseignement).
Alors, à vos calculatrices…
Laurent Piau
Laurent Piau, juriste, est l’auteur de l’ouvrage Le Guide juridique des enseignants aux éditions ESF
Sur cet ouvrage :
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Pour commander :
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