L’actualité juridique propre à l’éducation nationale étant bien terne en ce moment, il me semble utile de mettre à profit ce temps disponible pour étudier l’organisation du Ministère de l’éducation nationale ainsi que des services dits déconcentrés.
Le ministère de l’Éducation nationale est compétent pour l’enseignement scolaire, qui comprend l’enseignement préélémentaire (école maternelle), l’enseignement élémentaire et l’enseignement secondaire (collège et lycée). Il prépare et met en œuvre la politique éducative du Gouvernement et assure l’égalité devant le service public d’éducation en répartissant les moyens sur le territoire national.
Le ministère est le responsable exclusif de l’élaboration et de la mise en œuvre du contenu des enseignements et des programmes scolaires, dont il contrôle l’application. Il définit l’organisation des cursus scolaires et des filières ainsi que les modalités de l’orientation des élèves, et en assure la gestion. Il définit et délivre les diplômes nationaux et détient le monopole de la collation des grades et diplômes universitaires.
Il joue un rôle important d’évaluation et de contrôle des établissements d’enseignement scolaire publics et privés. Il passe contrat avec certains établissements « concourant au service public de l’enseignement » et leur apporte un soutien financier.
Si l’État assume le recrutement, la rémunération et la gestion de la carrière des personnels enseignants et assimilés, le ministère répartie les investissements entre les niveaux d’enseignement, règle les dépenses de fonctionnement pédagogiques des écoles, collèges et lycées, intervient dans l’orientation scolaire et assume un certain nombre de compétences à caractère social telles l’attribution de bourses ou l’action sociale et sanitaire en milieu scolaire.
Les diverses lois de décentralisation ont transféré aux collectivités territoriales les compétences relatives aux locaux et aux personnels ouvriers et techniques qu’elles financent. En application de ce transfert de compétences, et sous le contrôle du recteur d’Académie, les communes gèrent le primaire, les départements les collèges, et les régions les lycées et les centres de formation d’apprentis.
Le ministère de l’Éducation nationale est installé au 110 de la rue de Grenelle à Paris (75007). C’est là que sont installés le cabinet du Ministre, ainsi que la plupart des directions et services de l’administration centrale, les autres services étant situés au 34, rue de Châteaudun (75009).
A) L’organisation du Ministère
Le ministère se compose de trois grandes entités : le Cabinet, l’administration centrale et les Inspections générales
1) Le Cabinet
C’est le cœur politique du ministère où s’élaborent l’action ministérielle dans le respect des lignes directrices fixées par le Premier Ministre. Le rôle du Cabinet consiste à préparer les dossiers du Ministre.
Il est composé :
· Du Directeur de Cabinet, qui dirige la vie administrative du Cabinet, s’assure de son bon fonctionnement, et est en charge des relations entre celui-ci et les différentes administrations du ministère.
· Du Chef de Cabinet qui est le plus proche collaborateur politique du Ministre et qui épaule ce dernier dans ses choix politiques. Il est aussi chargé des relations avec le Secrétariat général du gouvernement à Matignon, les autres ministères et les médias.
· Des divers conseillers et conseillers techniques choisis par le Ministre pour lui apporter les compétences nécessaires à ses prises de décisions dans les différents domaines relevant de son ministère.
2) L’administration centrale
Contrairement au Cabinet, composé de membres choisis par le Ministre, l’administration centrale est composée uniquement de fonctionnaires ou de contractuels chargés de faire fonctionner le service public éducatif (finances, administration, etc.) et d’appliquer les décisions réglementaires ou législatives en matière éducative.
Si cette organisation a le mérite de garantir une continuité et une grande expérience dans la gestion des dossiers, sa grande stabilité fait qu’elle développe parfois sa propre conception de la politique à mener. Associée à une force d’inertie et à une résistance à la contrainte conséquente, cela fait d’elle un redoutable obstacle aux politiques éducatives trop audacieuses. Quand Claude Allègre parlait du Mammouth, c’est d’abord à ces fonctionnaires qu’il devait faire allusion.
L’administration centrale est ainsi composée :
a) Le Secrétariat général
Le secrétariat général regroupe différentes Directions :
· la Direction générale des ressources humaines (DGRH) gère le personnel du ministère et intègre la Direction de l’encadrement (DE) qui procède au recrutement, à la formation et à la gestion des personnels d’encadrement supérieur des services centraux, des services déconcentrés et des établissements publics relevant du ministère. Elle met aussi en œuvre la gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences de ces personnels (dite GPEEC)
· la Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) met en œuvre le dispositif d’évaluation du système éducatif prévu par la Loi Organique relative aux Lois de Finance (LOLF) et contribue à l’évaluation des politiques du ministère. Elle est chargée de la prévision à court et moyen termes et, en relation avec les organismes de recherche, de la prévision à long terme. Elle prépare les systèmes d’aide à l’évaluation, au pilotage et à la décision et gère les bases de données du ministère.
· la Direction des affaires financières (DAF) est en charge de la gestion financière et comptable du ministère. Pour ce faire, elle prépare le budget du ministère, en suit l’exécution et en tient la comptabilité centrale ; elle gère les crédits de personnels de l’enseignement scolaire et de l’enseignement supérieur, assure le contrôle budgétaire des emplois et traite des problèmes de pensions de l’ensemble des personnels.
· la Direction des affaires juridiques (DAJ) exerce une fonction de conseil auprès de l’administration centrale du ministère, des services déconcentrés et des établissements. Elle est consultée sur les projets de textes législatifs ou réglementaires et assure le suivi des procédures d’adoption de ces textes. Enfin, elle représente le Ministre devant les diverses Juridictions.
· la Direction des relations européennes et internationales et de la coopération (DREIC) coordonne le développement des échanges et de la coopération avec les systèmes scolaires, universitaires et de recherche étrangers.
· la Délégation à la communication est chargée de la communication interne et externe et des relations avec les médias.
· le Service de l’action administrative et de la modernisation est en charge du développement de l’administration électronique des personnels et des moyens de l’administration centrale, du contrôle de gestion et des archives du ministère.
b) La Direction générale de l’enseignement scolaire (DGESCO)
· Elabore et met en œuvre la politique relative aux écoles, aux collèges, aux lycées, y compris professionnels, définit la politique des zones d’éducation prioritaire, de vie scolaire, et d’action sanitaire et sociale, assure la tutelle pédagogique des établissements français à l’étranger et des établissements privés sous contrat de l’enseignement scolaire, gère les politiques de formation professionnelle initiale et continue dans les établissements du second degré et, enfin, conduit les actions en matière d’intégration des élèves et d’éducation spécialisée.
· Attribue aux autorités déconcentrées les dotations en personnel et en crédits destinés aux établissements scolaires et élabore la réglementation relative au fonctionnement de ces derniers.
· Définit les orientations générales de la politique de formation continue des enseignants du premier et du second degré et contribue à la définition des orientations de leur formation initiale et à leur mise en œuvre.
c) Les autres services
· Le haut fonctionnaire de défense et de sécurité et le médiateur de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur sont communs au ministère de l’Éducation nationale et à celui de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.
· Le Ministre de l’Éducation nationale dispose également des compétences de la Direction générale de l’enseignement supérieur (DGES) qui lui permet de gérer la formation des maîtres des enseignements primaire et secondaire, d’orientation des lycéens, d’organisation des classes post-baccalauréat de lycée telles les classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE) et les sections de techniciens supérieurs (STS), etc.
· Enfin, le Ministre peut faire appel à la délégation aux usages de l’Internet pour développer l’utilisation de ce dernier.
3) Les Inspections Générales
· l’Inspection générale de l’Éducation nationale (IGEN) exerce auprès du Ministre des fonctions d’expertise (avis et propositions sur la mise en œuvre de la politique éducative), d’encadrement (recrutement, formation, coordination pédagogique, évaluation et contrôle des personnels d’inspection, de direction, d’enseignement, d’éducation et d’orientation de l’enseignement primaire et secondaire) et d’évaluation (types de formation, contenus d’enseignement, programmes, méthodes pédagogiques, procédures et moyens mis en œuvre).
· l’Inspection générale de l’administration de l’Éducation nationale et de la recherche (IGANER) exerce des missions d’expertise, d’évaluation, de contrôle et de conseil des personnes et des structures du service public d’éducation nationale et de recherche.
B) L’administration déconcentrée
Lorsqu’un Ministre délègue ses pouvoirs à une autorité déconcentrée compétente, les Recteurs en l’occurrence, il institue à l’intérieur de son administration une répartition de compétences nouvelle, permanente et exclusive de la répartition antérieure et modifie ainsi l’organisation du service public.
Une telle délégation ne peut donc être autorisée que par l’autorité qui a qualité pour organiser le service public et fixer les attributions des Ministres ; ainsi, elle ne peut être prévue que par un décret ayant au moins la même nature juridique que l’acte ayant conféré au Ministre lesdits pouvoirs.
C’est pourquoi, les délégations de pouvoirs en matière de gestion des personnels ont nécessité un décret en Conseil d’Etat pris sur le rapport du Ministre intéressé, du Ministre d’Etat, Ministre de la Fonction publique et des Réformes administratives, et du Ministre délégué au Budget
Les actes qui ont été déconcentrés sont ceux qui s’imposent à l’Administration ou relèvent, en vertu des textes réglementaires, de la compétence des seuls chefs de service et les actes nécessitant la consultation d’une commission administrative paritaire, y compris ceux impliquant une appréciation relative de la manière de servir et de la valeur professionnelle, soit :
· Recrutements, nominations, titularisations à l’issue du stage ;
· Avancements ;
· Mouvements intra-académique ;
· Congés et autorisations d’absence ;
· Discipline ;
· Cessations de fonctions.
Les deux niveaux de déconcentration sont :
1) Le rectorat
Le Recteur à la tête d’une académie, détermine, met en œuvre et contrôle l’ensemble de la politique académique dans le respect des directives du Ministre auquel il rend compte.
Pour ce faire, le Recteur :
· Arrête la structure pédagogique générale des établissements d’enseignement secondaire et la carte scolaire en tenant compte du schéma prévisionnel des formations des lycées et des collèges.
· Répartit entre ceux-ci les moyens d’enseignement (personnel), les crédits d’équipement et les crédits d’actions pédagogiques.
· Exerce un contrôle pédagogique sur les personnels et contrôle les conditions dans lesquelles sont utilisées les ressources attribuées aux établissements.
· Participe avec les collectivités territoriales à la mise au point des programmes prévisionnels d’investissements définissant la localisation des établissements, leur capacité d’accueil et le mode d’hébergement des élèves et en exerce, conjointement avec le Conseil Général pour les collèges et le Conseil Régional pour les lycées, le contrôle administratif et financier
· Note, inspecte, et gère les carrières ainsi que la formation continue des personnels affectés dans son académie.
· Organise la plupart des examens et concours, choisit les épreuves quand celles ci relèvent de sa compétence, nomme les jurys académiques, vise les diplômes nationaux.
· Organise les actions de formation continue avec l’aide de la délégation académique à la formation continue (DAFCO) et en assure la coordination avec la formation initiale.
· Préside, souvent par délégation, les diverses assemblées ou conseils consultatifs (ex : CAEN) qui donnent des avis ainsi que les commissions et comités (ex : CAPA, CTPA).
· Exerce un contrôle a posteriori des établissements d’enseignement supérieur dont il vise les diplômes en qualité de chancelier des universités. Il préside aussi le conseil d’administration du centre régional des œuvres universitaires et scolaires (CROUS).
Le Recteur est secondé par le Secrétaire général de l’académie, chargé, sous son autorité, de l’administration générale de l’académie.
2) L’Inspection Académique
Représentant du Recteur d’académie dans le département, l’Inspecteur d’Académie, dirige les services départementaux de l’Éducation nationale (c’est pour cela qu’il est appelé IA-DSDEN).
Pour ce faire, l’Inspecteur d’académie :
· Dirige administrativement l’ensemble des services d’éducation de son département.
· Informe, conseille, aide dans leurs initiatives les Directeurs d’école, les Chefs d’établissement et les Inspecteurs de l’Éducation nationale et assure la coordination de l’ensemble des actions éducatives pédagogiques
· Note, inspecte, et gère les carrières ainsi que la formation continue des instituteurs et des professeurs des écoles.
· Inspecte les établissements de l’enseignement secondaire, contrôle leur gestion administrative et financière, surveille leurs méthodes pédagogiques et donne son avis sur leurs projets de budget et comptes financiers avant de les transmettre au recteur.
· A compétence sur les activités péri-scolaires, le sport à l’école, la formation permanente, la santé des élèves, les constructions et les transports scolaires.
· Compose les jurys des divers examens et préside la plupart d’entre eux.
· A la responsabilité des actions d’information et d’orientation dans son département
Il est assisté d’un inspecteur de l’Éducation nationale qui coordonne les IEN (inspecteurs de l’Éducation nationale chargés de l’inspection des maîtres du premier degré) du département, et dans les départements les plus importants, d’un ou de plusieurs inspecteurs d’académie adjoints.
C) L’administration dans les collectivités d’outre-mer
L’organisation est quelque peu différente puisque :
· A Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna le ministère est représenté par Un Vice-recteur, dont les pouvoirs, sont proches de ceux d’un recteur et de ceux d’un inspecteur d’académie.
· A Saint-Pierre-et-Miquelon, le ministère est représenté par un service de l’éducation, rattaché administrativement à l’Académie de Caen.
Laurent Piau
Laurent Piau, juriste, est l’auteur de l’ouvrage Le Guide juridique des enseignants aux éditions ESF
Sur cet ouvrage :
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