« On aimerait que le ministre prenne la mesure de la situation ». Le 26 novembre, le collectif Urgence Amiante Ecoles, avec 11 associations ou mouvements (Fsu, Cgt, Fcpe, Sud, Unl, Andeva, Ava, etc.), a tiré la sonnette d’alarme. Rapport officiels à l’appui, le collectif montre que le risque d’exposition à l’amiante est très sous estimé dans l’éducation nationale. Il n’y a pas de suivi des personnes exposées et seulement la moitié des écoles dispose d’un dossier technique amiante pourtant légalement exigible. Le collectif demande un diagnostic public accessible sur Internet, un suivi médical des personnels et des investissements pour l’éradication du risque.
60 enseignants malades de l’amiante par an
« Il est possible d’être malade du fait de l’amiante dans un établissement et d’en mourir », rappelle Cyril Verlingue, enseignant et président du collectif Urgence Amiante Ecoles. D’après un rapport de Santé Publique France de juin 2019, on compterait 60 cas de malades enseignants par an sur la période 1998-2017. En l’absence de suivi médical sérieux des enseignants, ce chiffre a été calculé par Santé Publique France par extrapolation.
Amiante dégradée dans une école sur cinq
Des données sur l’amiante dans les écoles, le collectif peut en donner d’autres. Il cite le rapport 2016 de l’Observatoire national de la securité et de l’accessibilité des établissements d’enseignement. Selon ce rapport 85% des établissements scolaires ont été construits avant 1997 et sont susceptibles de contenir de l’amiante. Un pourcentage important des écoles et établissements n’a toujours pas de Dossier Technique Amiante (DTA), particulièrement dans le privé. Dans ces établissements les personnels et les élèves peuvent être exposés à des risques graves.
Parmi les établissements ayant un DTA, 38% des écoles publiques mentionnent la présence d’amiante, 73% des collèges et 77% des lycées. Cela monte à 80% des L.P. publics.
Un rapport des inspecteurs santé et sécurité au travail de l’Education nationale, encore retenu par le ministère mais publié par Le Monde, montre que quand le DTA existe, les personnels en ignorent l’existence dans la moitié des cas. Dans une école sur cinq (22%) les matériaux contenant de l’amiante sont dégradés et donc particulièrement dangereux. Dans 8% des écoles le registre snaté et sécurité au travail mentionne l’exposition à l’amiante.
Omerta dans l’administration
Le rapport donne aussi des exemples que les inspecteurs ont repéré d’enseignants exposés à l’amiante. Il relève aussi que « la surveillance médicale de l’exposition à l’amiante n’est aps assurée pour la plupart des enseignants exposés » , en fait pour 90ù d’entre eux.
Ces rapports sont enrichis par le collectif qui a une expérience du terrain. Cyril Verlingue enseigne dans un lycée, G Brassens à Villeneuve le Roi, où les enseignants et les parents se sont mobilisés pour faire bouger l’administration. Claudine Buzol, qui siège au CHSCT de l’académie de Versailles pour la Fsu raconte comment l’administration « ne se donne pas les moyens » de faire son travail réglementaire de recensement et de réalisation des DTA. « Dans aucun département l’administration n ‘a les moyens de le faire », lui a-t-on répondu. Elle déplore aussi l’absence de transparence dans le suivi médical des agents.
A croire que l’omerta règne encore sur cette question dans l’Education nationale. Pour C Buzol les autorités académiques, les Dasen pratiquent trop souvent l’obstruction face aux demandes syndicales. Soulever la question de l’amiante c’est remettre en question les bonnes relations avec les responsables politiques locaux , propriétaires des locaux scolaires, dont l’Education nationale a besoin. Pour Sud Education, faire réaliser les DTA c’est prendre le risque de voir des enseignants malades déclarés en maladie professionnelle et de voir la responsabilité de l’Education nationale engagée face à des élèves malades.
Pour le collectif, il est urgent de réaliser les DTA manquants et de mettre à jour les plus anciens. Il demande une base de données accessible à tous donnant un état des lieux des locaux scolaires et une formation des personnels au risque amiante. Selon lui 400 personnels de l’éducation nationale sont morts à cause de l’amiante depuis 1998.
François Jarraud
Le site du collectif Urgence Amiante Ecoles