« Notre choix c’est de ne pas avoir de mesure singulière pour les bacheliers professionnels à l’université ». B Vallaud-Belkacem a enterré le 8 décembre le projet de Brevet professionnel supérieur lancé par G Fioraso et repris par le rapport Stranes. Elle annonce son intention d’appliquer réellement les quotas de bacheliers professionnels en STS.
L’explosion des bacs pros
Depuis 2000, la part des bacheliers pros qui poursuivent dans le supérieur est passée de 16 à 34% (2013). Comme le dit Aziz Jellab dans la revue Formation Emploi de septembre 2015, » le baccalauréat professionnel a vu évoluer ses missions, et redéfinir les priorités qui lui sont assignées : de diplôme censé former des futurs ouvriers et employés qualifiés pour alimenter prioritairement le marché du travail, la poursuite d’études étant une possibilité offerte à une minorité, c’est plutôt la tendance inverse qui tend à s’affirmer aujourd’hui ». C’est une véritable mutation culturelle qui s’est produite chez les jeunes bacheliers pros. Et le bac pro en 3 ans a accentué cette évolution en rajeunissant les bacheliers professionnels.
La tentation du parking
La question du devenir de ces jeunes se pose de façon urgente. On est passé d’environ 20 000 jeunes allant vers le supérieur en 2000 à près de 100 000 aujourd’hui sans que l’offre de BTS suive cette demande. La loi de 2013 a pourtant prévu des quotas de bacheliers professionnels en STS. Mais G Fioraso , la précédente ministre de l’enseignement supérieur, était contre. Elle envisageait de parquer les bacs pros dans une filière supérieure spécifique. Une idée reprise par le rapport Stranes remis cette année et bien reçu par l’Elysée.
En novembre 2014, la députée S Doucet n’avait même pas pu avoir communication des fameux quotas prévus par la loi. Le nouveau rapport de Michel Lugnier et Alain Plaud éclaire cette question. Il révèle qu’en IUT, l’application de la loi s’est traduite par un changement homéopathique. » Les parts respectives des bacheliers professionnels en STS et des bacheliers technologiques en IUT ont augmenté mais de manière très modérée (respectivement +0.6 et +1.6%). Pour le rapport la loi ne semble pas avoir constitué une rupture de nature à créer une dynamique nouvelle ».
Application des quotas
Le ministère annonce avoir changé d’avis. « Le bac professionnel s’ouvre de plus en plus vers le supérieur et on doit l’accompagner de façon plus précise », déclare Thierry Mandon le 8 décembre. Le ministère promet « une meilleure cohérence entre l’offre de formation professionnelle et les STS », et donc de nouvelles STS dans les académies.
La mesure la plus importante est annoncée par N Vallaud-Belkacem. « Il faut faire en sorte que la loi de 2013 donnant la priorité aux bacheliers professionnels et technologiques dans l’accès aux STS et IUT soit appliquée. Des consignes claires sont données aux recteurs pour que des quotas soient fixés ».
« Une pédagogie spécifique » est promise par le ministère. Interrogée, la ministre nous explique qu’il s’agit de « renforcer la période de stage en entreprise » et « d’avoir un accompagnement plus personnalisé des élèves », deux formules qui restent bien vagues. Les bacheliers professionnels pourront faire une année de détermination en université sous statut étudiant. Cette meilleure connaissance de l’université pourrait déboucher sur des ECTS et les guidera dans leur choix. Elle promet aussi du tutorat. Deux mesures qui ne seront pas réservés aux bacs pros.
En 2014, sur 173 671 élèves de terminale pro, seulement 69 295 ont demandé une STS. Et seulement 35 534 y ont obtenu une place : un élève sur cinq. Et pour achever de brosser le portrait soulignons que sur la période on comptait 21% de places vides en STS. Quelques chiffres qui donnent une idée des pas à faire…
François Jarraud