Qu’est-ce qui rend un lycée plus efficace qu’un autre ? Sous la direction de Brigitte Bajou, Fabienne Paulin‐Moulard et Thierry Bossard, l’Inspection générale va vérifier la validité des indicateurs mis au point par la Depp. Mais le rapport est surtout l’occasion d’une étude plus générale sur les valeurs du lycée où entrent l’architecture, les relations entre les adultes, les travaux donnés par les enseignants et un peu, quand même, les moyens.
« La valeur ajoutée, positive ou négative, ne peut jamais être imputée à un seul élément déterminant », préviennent d’emblée les inspecteurs. Mais les facteurs sont les mêmes d’un lycée à l’autre , qu’il soit général ou professionnel.
Entre le chef et les moyens
D’emblée le rapport creuse l’importance du chef d’établissement et pèse celle des moyens. « Une analyse des dotations des lycées ne permet pas davantage d’établir une corrélation entre les moyens et le niveau de valeur ajoutée », affirme d’emblée le rapport, même s’il reconnait que « de fait, les lycées à valeurs ajoutées positives de l’échantillon ont en majorité des dotations un peu supérieures aux moyennes mais cela vaut aussi pour beaucoup d’autres lycées qui n’atteignent pas ces résultats ». Pour l’inspection il s’agit d’abord d’une question de choix. « Nombre des lycées à fortes valeurs ajoutées savent faire de tels choix dans la gestion optimale des moyens et l’organisation des enseignements : choix de donner une forte priorité à la classe de seconde en consacrant des moyens à l’accompagnement personnalisé organisé réellement en petits groupes, choix d’organiser des dispositifs d’aide, de tutorat, de remise à niveau, choix d’avoir une division supplémentaire de seconde quitte à réduire l’offre d’options, acceptation de limiter les dédoublements pour pouvoir renforcer l’accompagnement personnalisé dont l’organisation constitue une ligne de partage assez nette entre les lycées aux valeurs ajoutées inverses ».
L’effet chef d’établissement semble plus assuré aux inspecteurs. « La façon de diriger un établissement a une influence, souvent déterminante, sur son fonctionnement. Toutefois, les situations que la mission a pu observer se sont révélées variées et nuancent ce qu’il est usuel de désigner par « l’effet chef d’établissement ». » Le rapport souligne les effets à long terme des pilotages négatifs mais aussi d’un déficit de chef.
Le mail plus que le conseil pédagogique
L’architecture joue-t-elle un rôle ? Le rapport fait quelques remarques sur son impact sur la qualité de vie. Il s’intéresse davantage au travail en commun des enseignants. « Il semblerait que, à l’instar de l’équipe de direction, l’effet « équipe de professeurs » eût des retombées plus bénéfiques que des actions isolées », écrit le rapport. « Les élèves du reste ne s’y trompent pas. « Ici, tout se sait, et tout de suite ». Les équipes soudées, qui s’informent mutuellement, se soutiennent , montent des projets en commun, se trouvent en grande majorité dans les établissements à valeurs ajoutées positives. Il faut souligner le caractère souvent très informel du travail en commun et de la communication entre les enseignants. Parfois ressenties comme lourdes et peu réactives, les instances prévues à cet effet telles que le conseil pédagogique semblent moins porteuses que les communications par courriel, une salle des professeurs accueillante, des emplois du temps qui rendent possibles des temps d’échange impromptus, comme, par exemple, une pause méridienne suffisante, au moins une fois par semaine ».
Là on commence à toucher une qualité que l’inspection souligne :la cohérence dans les actions des adultes, entre les principes affichées et la réalité.
Le travail des élèves
Derniers facteurs développés par le rapport, les inspecteurs soulignent le sérieux dans le travail. Le succès d’un lycée tient aussi au contrôle des absences. Il tient au travail scolaire donné par les enseignants. » Les devoirs en temps limité, surveillés, organisés régulièrement, inscrits dans l’emploi du temps sont un élément de cadrage et d’entraînement efficace des élèves dans plusieurs lycées à valeur ajoutée positive, notamment en zone difficile ».
En conclusion
« Les lycées à forte valeur ajoutée sont ceux qui.. parviennent d’abord à se construire en tant qu’ensemble uni autour d’un projet pédagogique », affirme le rapport. « Le rôle déterminant de la direction et l’engagement d’équipes fédérées autour d’un projet, qu’elles se sont approprié et qu’elles font vivre, se traduisent par une réelle cohésion interne à l’établissement. La valeur ajoutée y résulte d’une volonté affirmée de prendre en compte les difficultés des élèves et d’y apporter concrètement des réponses par le recours à une variété de formes d’accompagnement des lycéens. La réalité et la régularité du travail donné aux élèves se conjuguent avec un degré d’exigence affirmé ».
Le rapport introduit d’autres facteurs. « Deux autres facteurs structurels favorisent également la valeur ajoutée des lycées, la polyvalence et, évidemment, la gamme des formations qu’ils offrent jointe à l’attractivité qu’elle engendre. Cette analyse globale confirme que d’autres facteurs, s’ils ne sont pas les plus systématiquement relevés, marquent néanmoins une très nette ligne de partage entre lycées à valeur ajoutée positive et lycées à valeur ajoutée négative. C’est le cas de la préparation au post‐baccalauréat, particulièrement en LEGT, de la place de l’innovation et des expérimentations ».