M. Sarkozy présente sa vision de l’Ecole
à Périgueux…
Le
15 février, le Président de la République a poursuivi à Périgueux les
annonces concernant l’Ecole primaire. Reprenons quelques unes de ses
déclarations sur les programmes à venir :
« En
quelques pages, dans un langage évitant tout jargon, l’ensemble d’un
cursus disciplinaire, désormais recentré sur le français et les
mathématiques ».
« Priorité absolue à la maîtrise de
notre langue : le vocabulaire est un instrument de liberté,
l’orthographe ce par quoi la langue se tient debout, la grammaire qui
est le commencement de toute pensée, qu’il faut débarrasser de
l’invraisemblable le charabia dans lequel on l’a enveloppée, et qui l’a
rendue presque autant incompréhensible pour les enfants que pour les
parents. »
« …Toutes ces disciplines seront
remises à l’honneur… Et sans sans parler du langage texto. Je suis
terrifié quand j’en reçois un. Il faut voir ce qu’est la langue texto
pour le français. Si on laisse faire, dans quelques années, on aura du
mal à se comprendre… »
« Ce n’est pas du tout un retour en
arrière. C’est un instrument de liberté pour le citoyens. Si on veut
donner une chance à nos enfants, il faut qu’ils sachent lire écrire et
compter. C’est le but de l’école primaire, et nous allons y arriver. »
De
même, « l’accent sera mis sur la mémorisation de connaissances et de
compétences clairement identifiées ». Car « la mémoire, ça se travaille »,
« l’effort ça s’apprend », « la rigueur, ça se développe ».
Le
président annonce sa volonté de revenir à l’enseignement de la « morale »
: règles de politesse, symboles de la Nation, dont la Marseillaise à
l’écoute de laquelle « ils devront se lever ». Rappelons qu’une heure
d’instruction civique figure dans les programmes 2002/2007, certes pas
tout à fait sur les mêmes objectifs…
Les
professeurs seront quant à eux « évalués tous les deux ans », au lieu de
tous les quatre ans en moyenne actuellement. L’évaluation « s’attachera
d’abord aux progrès des élèves et non au choix de telle ou telle
méthode pédagogique, que je veux laisser à l’appréciation de
l’enseignant », a précisé Nicolas Sarkozy, refusant les « débats sans fin
sur les mérites autoproclamés de telle ou telle méthode »
… Et M. Darcos présente ses priorités
aux IEN
M.
Darcos rencontre actuellement l’ensemble des IEN de France au cours de
trois réunions décentralisées. Il y expose son ambition de diviser par
trois les 15% d’élèves en grande difficulté à la fin du primaire et
d’agir contre les « déterminismes sociaux ». Le Café en profite pour
faire le point de ce qu’il y a présenté…
La maternelle :
Le
ministre rappelle sa position très dubitative sur le scolarisation des
deux ans, veut que la maternelle soit une « vraie école», dotée d’un
programme (?), et veut mettre en place une formation spécifique en
formation initiale.
commentaires
du Café : on sent très nettement la volonté de faire de la
maternelle la « première marche » du primaire, avec une exigence
affirmée de « rendement ». S’il ne mentionne à aucun moment le rapport
Bentolila dont les outrances semblent être enterrées, il rappelle sa
volonté de marginaliser la scolarisation des petits, semblant ignorer
l’apport des recherches sur la question.
Le
samedi matin et le temps scolaire
24
h par semaine, M. Darcos a pris la décision seul et l’assume. Il veut
du soutien pour de « petits groupes d’élèves en difficultés » où on
travaillera différemment qu’en classe. Le modèle du PPRE lui semble
pouvoir servir de cadre.
Le service des enseigants, maintenu a
27 heures, intégrerait donc 60 heures pour le travail en petits groupes
pour les élèves en difficulté. Les IEN valideraient les propositions
des écoles, avec la possibilité offerte d’utiliser les heures non
effectuées en soutien devant élèves pour la formation des enseignants.
Le
reste des 108 heures se décompose comme suit : 6 heures pour les
conseils d’école, 24 heures pour les travaux en équipe pédagogique, les
relations avec les familles, la mise en place de projets personnalisés
de scolarisation pour les élèves handicapés, et 18 heures pour des
animations pédagogiques.
Pendant les vacances, et dès les
congés de printemps 2008, des stages de remise à niveau seraient
proposés par les écoles, rémunérés aux enseignants volontaires en
heures supplémentaires.
Actuellement,
deux syndicats minoritaires (le SE-UNSA et le SGEN-CFDT) ont signé le
relevé de conclusion ministériel. Le SNUipp n’a pas voulu signer et
consulte les personnels.
commentaires du Café : si
les enseignants ne s’opposeront pas à la suppression du samedi matin,
au moins pour leur propre confort de vie, ils sont nombreux à faire
part des difficultés du dispositif. Ils sont de deux ordres :
–
les enseignants ne sont pas opposés sur le principe à l’aide des élèves
de leur classe ou de leur école, mais l’idée d’aller faire des heures
dans d’autres écoles est refusée. Ce problème concerne notamment les
maternelles. Dans les campagnes, les problèmes de transports scolaires
sont souvent évoqués.
–
Beaucoup sont réticents sur le fond, notamment sur le risque de
stigmatisation des élèves : faire revenir après l’école les élèves en
difficulté paraît une solution plus que discutable…
–
Les RASED brillent par leur abence. Ils ne sont jamais cités dans les
dispositifs pouvant concourir à la réussite des élèves. Si on relie
avec l’avenir plus qu’incertain des formations CAPASH (la circulaire
publiée habituellement en décembre-janvier n’arrive pas à sortir…), on
ne peut qu’être qu’inquiet sur l’avenir de ces personnels et de leurs
missions : tiraillés entre la MDPH et l’aide aux équipes, leur place
semble plus que jamais instable…
Sur
l’autre partie du dispositif (renforcement possible de la formation et
de l’accompagnement des personnels), on est dans le grand flou. Sur le
principe, le texte laisse la porte ouverte pour qu’une part des heures
libérées soient utilisées en formation. Mais cet aspect dépendra
étroitement de la capacité de mobilisation de ressources par les
départements. En l’état actuel de la charge de travail des conseillers
pédagogiques et des formateurs, il est à craindre que les dispositifs
d’accompagnement en restent à la portion congrue.
Pourtant,
ces heures libérées pourraient être l’occasion d’imaginer des
formations novatrices, par exemple en permettant à des groupes
d’enseignants volontaires d’être « accompagnés » plusieurs mercredis
dans l’année sur une thématique précise : langage au cycle I,
numération au cycle II, compréhension au cycle III, problèmes posés par
la scolarisation des élèves handicapés, groupes de projets en arts
visuels ou chorale, enseignement des sciences ou de l’histoire-géo,
liaisons école-collège…
Mais qui seront les « accompagnateurs
» seront-ils disponibles ?
Les
programmes
Le ministre annonce son ambition de
publier, au cours de février, un projet de programmes annuels « court,
précis, détaillé et compréhensible par tous ». La priorité sera donnée
au Français et aux Mathématiques, à l’entraînement systématique et aux
exercices. Nouveauté : l’histoire des arts en cycle III pour
20 heures par an.
Une demi-journée serait banalisée
pour que les écoles puissent les discuter, avant que les assemblées ne
les valident.
Commentaires du Café : les
modifications de programmes s’enchainent à un rythme plus que soutenu.
Avant même que les modifications précédentes soient digérées, on
réforme à nouveau. Cette impression de mouvement perpétuel est
extrêmement déstabilisatrice pour les équipes.
Sur
le fond, la mise au placard affichée des cycles, le recententrage sur
les fondamentaux et le regard appuyé vers le rétroviseur risquent de
renforcer le « retour aux méthodes qui (n’ont pas) fait leurs preuves
», au dépends des élèves en difficulté. La grande richesse des
documents d’application de 2002 (exigeants, difficiles à mettre en
œuvre mais finalement assez peu accompagnés) va-t-elle passer en pertes
et profits ?
Les
évaluations
Contrairement aux années précédentes,
les évaluation CE1 et CM2 se transformeraient en évaluation-bilan,
menées au milieu de l’année scolaire, avec communication des résultats
aux parents et publication des résultats de chaque école, « sauf les
plus petites ».
Les livrets de compétences seront
renseignés à partir des résultats de ces évaluations-bilans organisées
à chaque palier du socle commun.
Commentaires
du Café : « on a mis dix ans pour installer une culture
de l’évaluation, il faudra encore dix ans pour savoir s’en servir »
disait Claude Thélot. Manifestement, le ministre souhaite davantage
afficher du chiffre (et le communiquer aux familles dans le but de les
aider à choisir leur école…) qu’aider les enseignants à se servir de
l’évaluation à but diagnostic. Le travail mené depuis plusieurs années
autour des évaluations CE1 risque d’être très remis en cause par les
équipes d’école qui ne devraient pas être très volontaires pour tresser
la corde qui risque de les étrangler… (publication annoncée et
démagogique des résultats des écoles sur Internet)
Le
renforcement de la place des circonscriptions et des EPEP
Nouvelle
terminologie, la circonscription devient « l’Unité éducative de
référence ». On demande à l’IEN de devenir un véritable pilote
territorial, animateur pédagogique et analyste des résultats des
élèves. Le ministre annonce une augmentation de 50% du recrutement
d’IEN. La mise en place des EPEP (établissements publics de
l’Enseignement Primaire) est souhaitée, avec « un vrai directeur
responsable » et une dotation de 20000 euros pour chaque EPEP en
expérimentation (prévue par la loi de 2005).
Commentaires du Café : la
ligne est désormais affichée : comme pour le second degré avec la
contractualisation des établissements, le niveau départemental risque
de perdre de sa force. La circonscription devient le périmètre du «
pilotage » et de l’efficience dans l’utilisation des moyens, le statut
du futur chef d’établissement de l’EPEP se profile clairement.
Au-delà
des aspects idéologiques, cette réforme serait un véritable changement
de culture professionnelle dans le premier degré. Le manque criant de
cadres intermédiaires est évoqué à travers la perspective de
recrutement d’IEN, mais rien n’est dit sur les conseillers
pédagogiques, actuellement souvent bien seuls pour accompagner les
enseigants sur le terrain, débordés par l’inflation de débutants et de
listes complémentaires…
Service minimum ?
Selon
la fédération PEEP, plus de 110 enseignants non remplacés dans le
département du Val-De-Marne. « On ne peut pas parler dans les médias de
réussite des élèves si on ne peut pas assurer à chaque élève un
enseignant dans sa classe » estime la fédération de parents d’élèves.
Dans toute la France, la situation du remplacement est extrêment
tendue, notamment du fait du rajeunissement de la popuation
enseignante. Mécaniquement, l’importance numérique des départs à la
retraite, conjugué à la féminisation de la profession, entraîne une
augmentation des congés de maternité et des congés parentaux.
Parfois, la mobilisation exlusive de la brigade de remplacement sur ces
remplacements « maternité » ne permet plus de faire face aux congés de
dernière minute. Nombre de départements ont dû en conséquence supprimer
des actions de formation prévues pour basculer les remplaçants
« formation continue » vers le remplacement « maladie ».
Au
moment où se
préparent les créations et suppressions de postes à partir de la
dotation reçue du ministère par l’intermédiaire des rectorats, les
inspecteurs d’académie sont soumis à forte pression : supprimer des
classes pour créer des postes de remplaçants ?La dépêche AFP.