Enseigner, ce n’est pas seulement « faire la classe ». Partant de cet a-priori, cet ouvrage propose d’explorer, au sein de l’établissement scolaire, les pratiques qui rompent avec l’unité classe/cours qui est la représentation dominante de l’activité professionnelle des enseignants. Cet ouvrage, basé sur le modèle de la compilation d’articles proposés à l’occasion d’un symposium, examine en premier lieu des pratiques enseignantes hors de la classe, puis les pratiques partenariales pour terminer en proposant un cadre d’analyse des pratiques professionnelles de l’enseignant.
Cet ouvrage tente de montrer qu’il n’est plus possible, désormais, d’étudier les pratiques enseignantes uniquement en se centrant sur l’activité habituelle de l’enseignant dans sa classe avec ses élèves. Ce simple constat suffit à montrer que ce métier a fortement évolué au cours des dernières années et qu’il comporte désormais un ensemble de prescriptions, mais aussi de pratiques non prescrites qui vont enrichir le métier lui-même. Les anciens penseront que ces pratiques ne sont pas nouvelles. Cependant on peut constater qu’elles s’étaient très largement raréfiées au cours des années 70 et que c’est à partir du milieu des années 80 que ces pratiques ont trouvé un écho qui débouchera sur des dispositifs comme les IDD ou les TPE à la fin des années 90. En primaire on peut de même évoquer l’apparition de la fameuse 27è heure consacrée à la concertation qui, aujourd’hui pose encore des problèmes à de nombreuses équipes. Dans le même temps, les enseignants des collèges et lycées appellent de leurs voeux ces heures de concertation qu’ils sont obligées de mettre en place, en plus de leur horaire habituel, pour mettre en place de nombreuses activités complémentaires à leur enseignement et de plus en plus rarement prises en compte dans les contingents horaires des rectorats.
Entre pratique individuelle hors de la classe, pratiques collectives et pratiques partenariales au sein de l’établissement cet ouvrage tente de montrer que ces pratiques sont génératrices de changements dans le métier et ont des conséquences sur l’efficacité de l’enseignement.
On pourra regretter le manque apparent d’unité de cet ouvrage. En fait elle se trouve dans le dernier chapitre qui propose d’analyser la profession enseignante en prenant en compte cette nouvelle façon d’envisager le métier. Les cadres théoriques qui se construisent ici visent à considérer le métier d’enseignant en environnant le coeur du métier d’une approche du système contextuel d’exercice du métier, sans perdre de vue la dimension temporelle de celui-ci. Ainsi la dimension processuelle, comme le rappel Marc Bru est-elle centrale pour analyser le métier.
Cet ouvrage essentiellement le fruit de travaux de recherche peut paraître peu accessible à des lecteurs n’ayant pas une habitude de fréquenter de tels écrits. Toutefois on peut dire que cet ouvrage apporte un regard essentiel et renouvelé de la profession et que de nombreux articles pourront interroger les actuels et les futurs enseignants sur le renouvellement du métier. La commission Thélot, qui vient de rendre son rapport, ne dit pas autre chose dans ses suggestions sur l’école de demain et le renouveau du métier d’enseignant. En effet à la suite de Claude Allègre et Philippe Meirieu à la fin des années 90, elle propose de ne plus décrire le métier d’enseignant par le seul temps de face à face d’enseignement avec les élèves, mais bien en prenant en compte les activités hors de la classe et les activités partenariales qu’elle invite à réintroduire dans le cahier des charges de ce métier et donc dans le définition de son horaire de travail.
Bruno Devauchelle
Marcel Jean François (sous la dir. de), Les pratiques enseignantes hors de la classe, L’Harmattan, Paris 2004