Pour la première fois, l’Europe reconnait la compétence d’une région française en matière de lutte contre le décrochage. Ce succès de l’équipe de Jean-Paul Huchon est présenté le 25 septembre au conseil régional avec d’autres programmes dont celui des lycées. Avec la lutte contre le décrochage ou le budget de dotation des lycées, les propositions de Jean-Paul Huchon, président du conseil régional, et Henriette Zoughébi, vice présidente en charge des lycées, montrent une volonté de lutter contre les inégalités scolaires dans la région et d’accompagner les enseignants. Deux autres politiques font davantage débat : le développement de l’apprentissage et le Service public d’orientation.
De l’argent européen pour lutter contre le décrochage
« Notre premier sujet c’est la lutte contre les inégalités », explique d’emblée H Zoughébi. Dans une région où les inégalités sociales et scolaires sont très fortes, la région va pouvoir développer une nouvelle politique de lutte contre le décrochage grâce à des fonds européens. C’est près de 30 millions d’euros que la région Ile-de-France a obtenu du Fonds Social Européen pour lutter contre le décrochage. La Commission européenne a décidé de reconnaitre les compétences de la région en ce domaine, une première pour toutes les régions françaises. « Ca sera un gros chantier », explique H Zoughebi. La région associera les 3 académies franciliennes à la conception des programmes qui pourront être lancés avec cette somme. « Il faudra à la fois des infrastructures et des programmes éducatifs ».
La dotation de fonctionnement des lycées utilisée contre les inégalités
La dotation globale de fonctionnement des lycées est également utilisée pour affronter les inégalités. Ce sont près de 105 millions qui sont budgetés pour les lycées franciliens en hausse de 3% par rapport à 2014. L’engagement social de la région pour les lycées se marque par la revalorisation de la dotation de solidarité. Attribuée aux seuls lycées accueillant des élèves venus des publics les plus fragiles, soit 177 sur les 472 lycées franciliens, la dotation sert à financer des voyages scolaires, des projets citoyens ou culturels. Elle représente 5 millions d’euros, en hausse de 7% par rapport à 2014. Chaque lycée touchera 44,5 euros par élève.
« En 2014, la dotation de solidarité a permis de financer près de 480 projets pédagogiques », nous confie Henriette Zoughebi. « Dès lors qu’on donne la possibilité aux équipes de construire des projets, elles le font. Avec le programme Réussite pour tous, la région leur donne une base solide pour construire leur projet durant 3 ans. Il me semble important qu’il y ait cette durée car elle facilite la vie des équipes et il faut du temps pour que les projet se construisent et deviennent efficace ». Ainsi le lycée Voillaume d’Aulnay a pu monter un projet informatique au Mali grâce à ce fond et au programme Réussite pour tous. « Avec ce programme on développe l’autonomie des jeunes, leurs compétences informatiques , qui sont la base de leur formation, et des compétences sociales et culturelles. On accompagne une équipe pédagogique qui accompagne les jeunes les plus en difficulté sociale », explique H Zoughebi.
« On n’est pas seulement dans la compensation sociale. Il y a aussi une dimension éducative et territoriale dans ce programme ». Pour 42 lycées, très majoritairement des lycées professionnels, une nouvelle aide s’ajoutera. La région a décidé de soutenir ces petits lycées (moins de 500 élèves) confrontés à une baisse de leurs effectifs. Leur dotation globale est maintenue. Les autres dépenses de fonctionnement des lycées sont maintenues. Les dépenses pédagogiques augmentent de 2% pour atteindre 35 millions, soit 25,5 € par élève. Les dépenses d’entretien (35 millions) sont elles aussi en hausse de 2%.
Quelle place pour l’apprentissage dans les L.P. ?
Le développement de l’apprentissage, voulu par le nouveau plan Hollande, semble davantage diviser la majorité régionale. Comment mettre en place le plan alors que les syndicats d’enseignants des lycées professionnels sont contre ? Quel équilibre trouver entre les formations en apprentissage et en LP ? Faut-il mettre en place des formation mixtes scolaires et en apprentissage ? Participant à la Journée de l’apprentissage organisée par F Hollande, Jean-Paul Huchon se souvient que les syndicats étaient pour le développement de l’apprentissage, y compris FO et la CGT dont les branches scolaires sont plus hostiles. Il y a unanimité dans le bureau du conseil pour favoriser le développement de l’apprentissage aux niveaux CAP et bac. Sur les parcours mixtes, la majorité régionale semble plus nuancée. Pour Emmanuel Maurel, vice président en charge de la formation professionnelle, « il faut abattre les cloisonnements ». Henriette Zoughebi, vice présidente en charge des lycées, est plus réservée. « Les enseignants des LP scolarisent souvent dans les niveaux les plus bas les élèves les plus fragiles. Ce sont souvent des élèves dont les entreprises ne veulent pas en apprentissage. Il n’est pas question de les mettre en concurrence avec l’apprentissage », dit-elle. Mais elle est pour les parcours mixtes dans des classes séparés. Par exemple une première année d e bac pro sous statut scolaire et les deux années suivantes en apprentissage. « Il ne faut pas mélanger les élèves des deux statuts. Ca crée trop de difficultés d’emploi du temps. Mais aussi du fait de la rémunération des apprentis alors qu’une proportion importante de lycéens professionnels sont contraints de travailler ». L’important c’est que les jeunes « trouvent la formule qui leur convient ».
Orientation : quel devenir pour les CIO ?
Dernier projet qui fait des vagues : le service public régional de l’orientation (SPRO). La loi sur la formation professionnelle a confié aux régions tout ce qui n’est pas scolaire dans l’orientation. Mais elle a oublié de préciser le devenir des CIO. La région a signé avec els partenaires sociaux et les 3 académies une « Charte francilienne du service public de l’orientation » pour coordonner l’action des 800 structures qui interviennent en ce domaine. « Les CIO ne sont pas signataires mais restent associés » promet E Maurel. « Sur l’apprentissage sur ces questions il y a surtout des craintes syndicales », explique Henriette Zoughebi. « La bonne façon de les faire évoluer c’est de travailler ensemble ».
Le 24 septembre, le conseil régional a adopté 9 projets du dispositif Alycce – « Agir au lycée pour la culture et la citoyenneté des élèves » pour 15 000 euros. Parmi les réalisations ainsi soutenues : une expo photo baptisée « Le soleil des quartiers sombres » au lycée Jean-Baptiste-Corot de Savigny-sur-Orge (91), la mise en place d’un jardin biologique (comprenant un espace dédié à des ruches pédagogiques) au lycée Gustave-Eiffel à Ermont (95), la création et la vente d’un journal (« Le cancre prend l’air ») au lycée Jacques-Prévert de Boulogne (92) ou encore la tenue d’un « Challenge olympique des lycées du Val d’Oise » au lycée professionnel Jean-Mermoz à Montsoult.
François Jarraud