Le détricotage c’est facile. Mais gare au retricotage. En proposant un nouveau décret déstructurant les EPI et incitant à rétablir les classes bilangues et les sections européennes, JM Banquer risque de relancer la compétition pour les moyens dans les établissements. Déjà plusieurs amendements au texte présenté le 8 juin au CSE sont proposés par le Snes et par l’Adeaf, association de professeurs d’allemand.
Le détricotage
Le projet de texte soumis au CSE le 8 juin déshabille la réforme du collège des EPI. Certes ils ne sont pas interdits. Mais le texte retire la liste des EPI et l’obligation d’en faire. Il remet à la disposition des établissements le volume horaire des EPI. Il y a toujours 3 heures d’enseignements complémentaires en 6ème et 4 heures de la 5ème à la 3ème. Et il n’y a plus de temps de référence pour l’AP ni de nombre d’EPI à faire. Les conseils d’administration des collèges doivent décider de leur répartition.
Le Snalc voudrait aller plus loin. Il annonce qu’il proposera des amendements pour « mettre définitivement un terme aux heures d’Accompagnement Personnalisé (AP) et aux Enseignements Pratiques Interdisciplinaires (EPI) ».
Le rapiéçage du Snes et de l’Adeaf
« On peut trouver positif d’assouplir les EPI », déclare le Snes à l’issue d’une rencontre avec le ministre le 6 juin. « Mais on a un problème pour les enseignements facultatifs et les bilangues . Il faut une dotation spécifique », déclare F Rolet. Le Snes devrait déposer un amendement en ce sens. Le syndicat demandera aussi le détricotage des horaires globaux en arts et en sciences.
Du coté des professeurs d’allemand, on juge que « le projet d’arrêté répond en grande partie aux demandes de l’ADEAF ». L’association souligne « la suppression de l’exigence de continuité pour l’apprentissage d’une autre langue que l’anglais en 6e, ce qui signifie la réouverture sans condition des bilangues, accessibles à tous, la possibilité d’un renforcement linguistique à partir de la 5e, donc le rétablissement de fait des sections européennes – et la possibilité d’enseigner une autre discipline en langue vivante dès la 5e ».
Mais l’ADEAF s’inquiète » d’une dotation horaire qui met en concurrence des enseignements facultatifs, notamment de langues vivantes et des dispositifs de soutien aux élèves ». L’ADEAF demande « des dotations horaires spécifiques distinctes pour ces différents enseignements » et une augmentation des horaires de langues. « Nous souhaitons donc que dans l’article 7 modifié la limite soit portée à 3 heures au lieu de 2 heures, et que dans l’annexe 1, l’horaire de l’enseignement obligatoire de langue vivante de 4 heures en 6e soit porté à 3 heures dès lors que l’enseignement facultatif dans une autre LV est de 3 heures ».
Et le ravaudage
A l’opposé le camp réformiste veut mener la bataille des EPI. Le Sgen Cfdt, le Se Unsa, la Fcpe, des organisations lycéennes (Unl, Sgl), les parents de la Fcpe, des associations complémentaires, demandent au ministre de ne pas « marginaliser les EPI ».
» Le projet de décret n’abroge pas les EPI, mais sous couvert d’autonomie et de « liberté » pédagogique, il envoie le signal aux enseignants que ce dispositif pourrait ne pas être pertinent, au moins pour certains élèves, alors qu’il s’agit d’une voie pourtant féconde et adaptée aux exigences de notre temps. Par ailleurs, la réintroduction de nombreux enseignements facultatifs va rendre plus difficile la mise en œuvre des EPI : en effet, ces options vont détourner au profit d’une minorité d’élèves une grande partie des marges horaires prévues pour fonctionner en petits groupes ou en co-intervention », note le communiqué.
» Avec les EPI, des compétences vraiment fondamentales sont développées, compétences indispensables à tous les élèves : capacité à travailler en groupes, à faire un exposé oral, à mener des recherches en vérifiant les informations… Certes, les EPI ne sont pas le seul temps où ces compétences sont travaillées, mais sont souvent un levier pour expérimenter des pratiques nouvelles dans toutes les disciplines, grâce en particulier au travail d’équipe entre enseignants… Nous demandons à monsieur le ministre… de ne pas mettre en péril une pièce maitresse de la rénovation de notre école, ce qui nous ramènerait au collège d’il y a cinq ans, lequel n’a nullement fait la preuve, lui, de son efficacité. Pour le moins, il faut maintenir l’obligation pour les établissements de mettre en œuvre des EPI à tous les niveaux d’enseignement, avec un horaire suffisant, en impliquant le maximum de disciplines et en gardant un cadrage, certes souple, mais effectif ».
F Jarraud