Voilà plus d’un an que la mobilisation se poursuit contre la fermeture annoncée du collège Fernand Puech de Laval (Mayenne). Les parents veulent sauver leur petit collège, le seul public du centre-ville. Ils dénoncent une décision unilatérale du département, sans consultation. Une protestation qui illustre le fossé qui s’est creusé entre les politiques et les citoyens. Des parents d’élèves racontent.
Le collège Fernand Puech était juqu’à peu un établissement sans histoires. Avec guère plus de 300 élèves, c’est le plus petit collège public de Laval. C’est aussi le seul dans le centre-ville. Face à lui, se trouve l’Immaculéé Conception – » l’Immac » -, imposant établissement catholique qui scolarise 1 200 élèves de la maternelle au BTS.
Le collège Puech accueille 40% d’enfants lavallois, le reste venant de deux communes de la périphérie. On retrouve cette diversité dans l’origine sociale des élèves, plutôt équilibrée, avec une bonne proportion d’enfants d’ouvriers et d’employés. Une petite particularité à Puech : une section » Foot salle « .
Il y a quelques années, on a bien assité à une valse des principaux, ce qui a inquiété les parents. Mais le principal en place depuis deux ans a ramené la sérénité. Le taux de réussite au brevet a atteint les 90% en 2016. L’équipe enseignante, elle, est restée stable.
Abasourdis
Le drame s’est noué en avril 2016. Le 25 avril, la presse locale publie une brève : selon un élu municipal de l’opposition, le collège Puech va fermer en 2017. Les enseignants, les parents, le principal, sont abasourdis. Ils n’en ont jamais entendu parler.
Le 29 avril, lors d’une conférence de presse, le président du Conseil départemental de la Mayenne, Olivier Richefou (UDI), confirme la nouvelle : Puech fermera ses portes à la rentrée 2017. La décision est irrévocable.
A l’appui, il explique que des travaux coûteux sont indispensables – pour la sécurisation de l’établissement et pour l’accès aux personnes en situation de handicap -, et que le département ne peut les assumer. Il ajoute que l’établissement, petit, est loin d’être plein. Or sur l’ensemble des collèges publics lavallois, on compterait un millier de places vacantes.
Parole
On apprend par ailleurs que l’Education nationale – en l’occurrence le Rectorat, très discret dans l’affaire – a été mise au courant du projet de fermeture du département. Et qu’elle a donné son aval.
La mobilisation est immédiate. Les parents, les enseignants sont outrés d’être informés par la presse. Comme s’ils ne comptaient pour rien, qu’ils n’avaient rien à apporter face à une vision perçue comme avant tout comptable.
Les arguments des élus ne convainquent pas. » Personne n’a compris, souligne Gilles Brun, de l’Association des parents et amis du collège public Fernand Puech, d’importants travaux ont été faits ces dernières années et lors de ses passages, le comité de sécurité n’a rien relevé de grave. »
Coeur
A la pointe du combat, l’Association des parents et amis du collège public Fernand Puech qui compte 115 adhérents. Non-partisane et apolitique, elle se veut une expression civique et spontanée. La FCPE soutient la mobilisation, ainsi que deux collectifs de parents et les syndicats enseignants.
Très vite une pétition est lancée contre la fermeture : elle recueillera 4 811 signatures. Suivent des manifestations, des interventions durant des réunions du Conseil départemental, des tractages sur les marchés, la création d’un logo, un gros coeur rouge qui bat pour le collège Puech….
Le 17 mai 2016, lorsqu’Olivier Richefou vient au collège pour une réunion d’information, le porte-parole de l’Association, Marc-Henri Pamiseux, l’accueille en dénonçant » le déni de démocratie « . Puis il réclame l’annulation de la fermeture. Devant la fin de non recevoir, les parents sortent poursuivre les débats dans la cour.
Pause
Fin juin 2016, face à l’ébullition, le Conseil départemental décrète une pause. La décision de fermeture est suspendue. Le collège ouvrira ses portes à la rentrée 2017 mais la suite reste des plus incertaine.
Un comité de pilotage, où vont siéger des parents d’élèves, est créé. Il doit commander et suivre des études – sur les travaux nécessaires dans le collège, sur les prévisions démographiques… Les résultats seront décisifs dans la décision finale sur le sort de Puech.
» Ils sont surpris, ils ne pensaient pas qu’on allait suivre et bosser comme ça dans le comité de pilotage, on remet en cause des choses, on fournit des compléments « , se félicitent les parents d’élèves.
Humaines
» Nous voulons sauver ce petit collège, explique Gilles Brun dont l’enfant, scolarisé à l’école voisine Jacques Prévert, devrait aller ensuite à Puech. Les relations sont plus humaines, les enseignants connaissent davantage les élèves. Et la qualité de l’enseignement est tout aussi bonne. Avec trois classes par niveau, cela permet une émulation entre élèves. »
Pour les parents mobilisés, s’il y a un manque d’effectifs dans les collèges lavallois, pourquoi condamner ce petit établissement qui fonctionne bien ? » La solution serait plutôt de lancer une réflexion sur la carte scolaire « , assure Marc-Henri Pamiseux.
Entre temps, le doute s’est insinué sur les motivations du département. En janvier 2017, une fuite dans la presse a évoqué un accord immobilier entre la ville, le département et la SNCF : dans le cadre de la rénovation du quartier tout proche de la gare, la SNCF perd le bâtiment qui abrite son comité d’établissement. Elle rachèterait le gymnase de Puech… L’information a été démentie.
Eté
Les parents d’élèves ont une autre inquiétude, elle, bien vérifiable. Puech fermé, il ne resterait plus qu’un établissement privé dans le centre ville, » l’Immac « . » Sans être contre le privé, cela signifie qu’il n’y aura plus le choix pour les habitants, ce qui n’est pas acceptable « , déplore Marc-Henri Pamiseux.
La mobilisation survivra-telle à la pause estivale ? » On a déjà passé plusieurs vacances et elle n’a pas fléchi. Alors… « , assurent les parents, confiants.
Un bon signe selon eux : le nombre délèves inscrits à la rentrée est resté stable en dépit de tous les soubresauts qui auraient pu faire peur. Marc-Henri Pamiseux et Gilles Brun sont sûrs d’une chose : l’Association des parents et des amis du collège public Fernand Puech n’a pas dit son dernier mot.
Véronique Soulé
L’annonce de la fermeture par voie de presse
La pétition contre la fermeture
Un prof de français de Puech réagit à l’annonce de la fermeture