Interrogé par la commission d’évaluation des politiques publiques de l’Assemblée nationale le 3 juin, le ministre de l’éducation nationale a surtout répondu à des questions sur son budget. Mais il s’est laissé aller à des annonces. La plus importante est une réforme du diplôme du brevet pour 2021. Le ministre a aussi promis que l’Observatoire de la rémunération des professeurs verrait le jour « avant la fin de cette année ».
Une énième réforme du brevet
Durant deux heures, le 3 juin, JM Blanquer a répondu aux questions des députés de la commission d’évaluation des politiques publiques sur l’exécution du budget 2018. Répondant à une question du socialiste Régis Juanico, JM Blanquer a confirmé son intention, dans la perspective du SNU, de « favoriser l’engagement des élèves pour des causes altruistes » au collège. Si la Dgesco a écarté le projet de « livret citoyen » lancé en 2016 c’est perce qu’il est jugé « un peu lourd ». Mais le ministre annonce que cette question « sera discutée pour l’évolution du brevet pour juin 2021 qui prendra en compte les enjeux civiques ».
Ainsi une énième réforme du brevet (la 3ème en 4 ans ?) est annoncée pour la même année que la réforme du bac.
L’échec de la réforme de 2017
Cette annonce intervient juste après la publication par la Depp (division des études du ministère) des résultats définitifs du brevet 2018. La Depp signale une baisse du taux de réussite pour la première fois depuis plus de 10 ans. Alors que le brevet devrait confirmer la maitrise du socle commun on voit son taux de réussite baisser de 2% juste après la réforme apportée par JM Blanquer en 2017.
On peut ajouter un second échec. Le diplôme du brevet est inégalitaire. Il y a un fort écart de taux de réussite important entre le brevet général et le professionnel. Surtout « 97 % des enfants issus d’un milieu très favorisé réussissent leur examen contre 79 % des enfants issus d’un milieu défavorisé, soit près de 20 points d’écart », affirme la Depp.
Troisième problème : on ne sait pas exactement ce qui est évalué vraiment au brevet. Le ministre n’a pas su trancher entre la formule de l’examen final national et celle de la validation du socle commun. Résultat il a additionné les deux en renforçant, c’était le but de sa réforme de 2017, la poids de l’examen final.
Un examen qui se borne à écraser les faibles
Dans la formule actuelle qui réunit deux modes d’évaluation totalement différents, on assiste à des incongruités : si les candidats recalés à l’examen final se voient aussi refuser l’évaluation du socle, il n’empêche qu’il y a un écart très important entre l’évaluation de l’examen final et celle du socle. Autrement dit, à l’issue du brevet personne ne peut dire vraiment quel est le niveau des candidats !
L’examen final n’a un impact réel que sur les élèves faibles lors de l’évaluation du socle. Pour ces élèves, peut-être les seuls pour qui le brevet serait peut-être le dernier diplôme, l’examen final est un couperet qui ne leur lance aucune chance. Pour les autres c’est une simple formalité. Ajoutons que cet examen qui pèse sur les élèves ne décide pas de leur orientation et délivre un diplôme qui n’est pas reconnu hors de l’école.
Petit ou grand chantier ?
Pour ces raisons, réformer le brevet semble incontournable. JM Blanquer tire au moins les conséquences de la réforme ratée de 2017. Mais il ouvre un chantier dont on ne sait pas encore s’il sera petit ou grand.
Petit chantier si le ministre envisage juste de modifier à nouveau le calcul de points pour pencher une peu plus vers l’évaluation du socle ou vers l’examen final.
Grand chantier si la réforme du brevet est l’occasion de poser la question de ce qu’on évalue vraiment à la fin de l’enseignement obligatoire. Le débat avec R Juanico était parti de la question de la formation citoyenne et de l’engagement des jeunes. C’est amener le débat là où il doit être sur les finalités des années collège. JM Blanquer est-il capable de mener ce projet là avec les enseignants ? C’est encore une autre question.
Les indicateurs insincères du budget
Alors que le ministre vient de publier des « attendus » pour chaque classe de l’école et du collège, les questions des députés ont porté aussi sur les objectifs pédagogiques de l’éducation nationale et leur sincérité. La loi de finances présente des indicateurs de performance pour l’éducation comme pour les autres ministères. Sabine Rubin (LFI) et Charles de Courson (centriste) ont mis en doute des indicateurs ministériels.
« Pour le pourcentage d’élèves maitrisant les objectifs en fin de Ce2 en Rep+ on trouve 60% en 2017 et 80% en 2020. On est sur de ne pas les atteindre », relève C de Courson. « Le taux de couverture des notifications en Ulis est en baisse continue alors que vous le fixez à 98% en 2020. On ne l’atteindra pas ». « Sur la maitrise du socle, vous annoncez ramener de 10 points l’écart entre les Rep en Rep+ qui est actuellement de 22%. Mais comment augmenter de 10% le taux d’élèves maitrisant le socle ? », interroge S Rubin. Elle est dubitative sur les évaluations réalisées par Blanquer. Le ministre « ne partage pas ce pessimisme doublé de soupçons » et promet que les obectifs seront atteint sans jouer sur les indicateurs. « Le volontarisme du dédoublement est là pour réussir cet objectif… Les premières indications sont encourageantes » affirme le ministre alors que ses évaluations sont jugées peu fiables.
Et l’Observatoire
Elsa Focillon (PC) demande au ministre quand l’Observatoire de la rémunération des professeurs verra le jour et quand seront versés les 1000 euros de salaire en plus annoncés eux aussi depuis longtemps. « Je ferai avant la fin de l’année une première réunion avec les syndicats pour présneter l’observatoire », promet JM Blanquer. Quand aux 1000€ annuels « ce sera visible dès 2021 » promet JM Blanquer. Mais qui sera ministre de l’éducation en 2021 ?
François Jarraud