Comment renouveler l’étude des contes ? Et pourquoi pas par la réalisation d’un jeu vidéo ? Telle est la « quête » pédagogique qu’a dû accomplir une classe de 6ème à Saint-Jean-de-Luz. Pour créer ce jeu de rôles en ligne, Olivia Braun, professeure-documentaliste, et Laurent Etchechoury, professeur de français, ont amené les élèves à mobiliser des compétences très diverses : lecture, écriture longue, maîtrise d’outils numériques … Après un travail de lecture, d’analyse et de recherches, les enseignants ont métamorphosé leurs élèves en auteurs et scénaristes. Ceux-ci ont surmonté les « épreuves », développé leur maîtrise technique, appris à travailler en groupes. Olivia Braun livre ici sa merveilleuse recette.
En quoi consiste ce projet de voyage au pays des contes ?
Il s’agit d’un jeu vidéo entièrement réalisé par une classe de 6ème grâce à l’aide du logiciel RPG Maker. L’idée est de proposer au joueur un voyage au pays des contes en suivant le Petit Poucet. L’histoire démarre telle que nous la connaissons tous, mais lorsque le petit Poucet échange les bonnets de ses frères contre les couronnes des filles de l’ogre, une des filles se réveille et procède au changement inverse. Le lendemain matin, lorsque Poucet se réveille, il se rend compte que ses frères ont été emmenés par l’ogre chez la méchante sorcière d’Hansel et Gretel. Dès lors, il va se mettre à leur recherche et rencontrera plusieurs personnages de contes dont le Petit chaperon rouge, Peau d’Ane ou encore le Chat botté, qu’il devra aider s’il veut poursuivre son chemin et retrouver ses frères… Le jeu se termine lorsque Poucet arrive à retrouver et à délivrer ses frères.
Quels objectifs visiez-vous ?
L’univers des contes est très vaste, et les versions sont nombreuses et peuvent différer d’un auteur à l’autre. Même si les élèves connaissent en général ces histoires qui ont bercé leur enfance et font partie de notre patrimoine culturel, ils ont en revanche du mal à s’y retrouver dans le schéma narratif. Ainsi, comprendre ce schéma, connaître les contes et savoir situer les personnages, les attributs et les actions, être en mesure de connaître et situer des auteurs dans leur contexte tout comme être en mesure de débattre d’une idée, argumenter et justifier son choix, étaient les principaux objectifs poursuivis au cours de ce projet. D’autre part, grâce à la formation au logiciel dont ont bénéficié les élèves, cela leur a permis également de maitriser les TICE. Enfin, et c’est là le principal atout de ce projet, il a fallu que les élèves soient capables d’écrire un scénario et des dialogues construits, logiques et structurés, de même que de s’adapter aux changements d’histoires que le jeu vidéo imposait, et ils s’en sont remarquablement bien sortis.
Pouvez-vous nous expliquer comment vous avez mené la réalisation de ce projet ?
Après avoir présenté le projet aux élèves, nous les avons mis par groupe de deux et chacun a choisi un conte parmi ceux que nous leur avons proposé de travailler. Ils l’ont lu, ont fait des recherches documentaires dessus, et ont écrit le scénario de leur tableau. Je les ai ensuite formés au logiciel RPG Maker, et chaque groupe a monté son décor dans le logiciel de jeu vidéo. Une fois le décor en place, ils ont écrit les dialogues entre les protagonistes, puis sont retournés sur les ordinateurs pour rentrer le texte. J’ai rassemblé ensuite tous les tableaux et j’ai fait les liens entre eux pour que le jeu soit jouable.
Comment les élèves ont-ils accueilli ce travail ?
Des témoignages que j’ai pu recueillir, ils ont adoré travailler sur ce logiciel car c’est un outil qui est proche des jeux auxquels ils jouent à la maison, et ils ont été très étonnés qu’on leur propose ce type d’outil dans un cadre pédagogique. Ils ont également beaucoup aimé réécrire les histoires car ils connaissent les contes, mais leur donner la possibilité d’être un auteur à leur tour et d’inventer leur propre histoire a été une riche expérience pour eux.
Que retenez-vous personnellement de ce travail ?
C’est toujours très valorisant de voir des élèves enthousiastes sur un projet que vous leur proposez. De plus, j’ai été très étonnée de voir comme ils avaient à cœur de bien faire. Certains on eu du mal avec le logiciel et d’autre se sont fait mon relais pour aider leurs copains. Il y a eu une réelle camaraderie et une forte cohésion de groupe autour de ce travail. D’autre part, nous avons accueilli au beau milieu du projet une réfugiée syrienne qui ne parle pas du tout français et sa première approche avec ses camarades s’est faite par le biais des contes. Cette élève a réussi à trouver sa place maintenant alors qu’elle était très timide au début et je pense que ce type de projet a pu l’aider dans son contact avec ses camarades. Enfin, voir la fierté des élèves lorsqu’on leur montre le projet fini et les étoiles qui brillent dans leurs yeux tellement ils sont contents du résultat, c’est la plus belle des récompenses.
Propos recueillis par Sophie Bancel