Vous aimez les tacos ? Non, pas ceux là ! Les Tâcos d’Olivier Quinet et Laurent Fillion. En 2013, ces deux professeurs d’histoire-géographie ont ouvert un site qui est devenu la référence dans leur discipline pour les tâches complexes, rebaptisées avec humour « tâcos ». Des tacos que les enseignants s’arrachent pour tout un tas de raisons. Entre autre parce que les professeurs d’histoire-géographie font confiance aux professeurs d’histoire-géographie. L’aventure du site des tâcos révèle bien des aspects de la cuisine de l’éducation… Trois ans après l’ouverture de ce restaurant pédagogique, il est temps de faire le bilan…
Professeur au collège de Montpon Ménestérol (24), Olivier Quinet est devenu une personnalité connue des professeurs d’histoire-géographie. Une des raisons c’est le site sur les tâches complexes qu’il a ouvert en 2013 avec un collègue, Laurent Fillion. Trois années après sa création, alors que le collège prend un nouveau tournant, c’est le moment de faire le point sur ces ressources créées et diffusées par les enseignants eux -mêmes.
Pourquoi avoir lancé ce site en 2013 ?
On est au début de l’approche par compétences et les recommandations officielles, entre autre sur les tâches complexes, n’étaient pas très claires. Avec Laurent Fillon, on a constaté qu’il y avait peu de ressources disponibles sur les tâches complexes en histoire-géographie. On a donc eu l’idée d’ouvrir un site qui puisse mutualiser les productions des collègues. ON a aussi beaucoup alimenté le site avec nos propres projets.
Vous avez compensé un déficit de l’institution ?
IL y a trois ans on parlait peu de tâches complexes dans le second degré. Et il y avait un grand manque par rapport à l’apparition des compétences.
Quel est le lien entre approche par compétences et tâche complexe ?
Un élève est compétent quand il est capable de résoudre une tâche complexe. Pour cela il doit avoir des connaissances. Mais il doit aussi savoir chercher de l’aide auprès de ses camarades pour mener à bien la tâche. Dans une démarche de ce type, ce qui compte c’est la façon dont l’élève mobilise ses compétences.
Ca demande une autre posture pour l’enseignant. Il devient une ressource pour les élèves et en même temps il doit savoir les laisser affronter seuls la tâche. Il faut que l’élève sache mobiliser ses ressources.
Quel est l’intérêt pédagogique ?
La tâche complexe permet déjà de faire le point sur ce qu’on sait et ce qu’on ne sait pas. Elle permet d’utiliser des connaissances pour créer quelque chose. Elle apprend l’entraide et le travail de groupe. C’est un point important. L’élève gagne en autonomie de cette façon. Enfin il y a une dimension métacognitive. L’élève doit réaliser ce qui lui manque pour mener à bien la tâche et doit avoir un retour réflexif sur sa production. Il doit être capable de dire comment il l’a réalisé. C’est plus important que la production finale !
Cela suppose que ces élèves aient une certaine aisance par rapport à l’école et ses codes. La tâche complexe convient vraiment à tous les élèves ?
Concrètement la dimension de jeu qui est souvent associé à la tâche fait que ça marche bien avec les élèves. Mais il faut que la tâche soit bien présentée par l’enseignant.
Trois ans après son ouverture, que propose aujourd’hui le site ? Quelle est sa fréquentation .
Depuis 2013 on a eu 250000 pages vues par 40 000 visiteurs. Le site propose près d’une centaine de tâches complexes , essentiellement pour le collège. 4 ou 5 collègues déposent des projets sur le site de façon très régulière, une quinzaine de façon un peu moins régulière.
Quel usage en font les enseignants ?
On ne sait pas trop. Les collègues qui déposent des tâches nous disent le faire car ils ont été aidé par Tacos. On voit aussi que des manuels scolaires se sont inspirés des projets du site. Mais pour le reste c’est la grande inconnue. Tacos s’est imposé comme le site de référence pour les tâches complexes en histoire-géo surtout parce qu’on a recensé à peu près tout ce qui existe.
Aujourd’hui il y a une réforme du collège avec les EPI. La page se tourne pour Tâcos ?
Non pas du tout. Tant qu’on recommande une démarche de compétences, les tâches complexes ont leur place. La différence avec les EPI c’est que ceux ci sont plus longs et qu’ils ont obligatoirement une dimension pluridisciplinaire. Mais une tâche complexe peut très bien s’intégrer dans un EPI.
Ca ne fait pas peur de jouer le rôle que l’institution aurait du jouer ?
Non car le site Tâcos fait autre chose. C’est un site de mutualisation entre enseignants. Cette dimension de mutualisation est essentielle et encore plus avec la réforme du collège. Je ne serai pas bien dans mon métier sans ces échanges avec les collègues. Et j eme garde bien d’émettre un avis sur les projets qu’ils déposent. Certaines tâches sont fabuleuses à mes yeux. D’autres plus banales. On les partage toutes et on fait confiance aux collègue spour faire leur propre tri.
Propos recueillis par François Jarraud