L’école est le lieu par excellence des apprentissages – avec la famille, bien sûr – mais il y a tout un pan qui est absent des pratiques de classe, c’est le « pourquoi nous apprenons ». Ce « pourquoi » est pourtant, pour moi, ce qui devrait apparaître et être inscrit dans tout emploi du temps. Sans cette réflexion-là, que faire de tous ces élèves présents en classe mais absents à ce qui s’y passe, qui font ce que l’enseignant (e) leur dit de faire (ou ne font pas) sans y donner du sens.
J’ai eu plusieurs fois l’occasion de faire partager sur ce blog sur ce que j’ai appelé le « Temps des penseurs », un dispositif inscrit dans l’emploi du temps de ma classe, où je propose aux élèves de réfléchir à ces cinq dimensions : penser l’apprentissage, penser leurs empêchements à apprendre, penser le monde, penser leur condition humain et enfin, penser le fonctionnement de la classe.
Ce temps du pourquoi, je l’expérimente aujourd’hui avec plusieurs classes d’élémentaire dans le cadre de ma fonction d’enseignant spécialisé. J’interviens à la demande d’enseignant(e)s pour faire s’exprimer leurs élèves sur leurs apprentissages.
Nous constituons des demi-groupes pour faciliter leur parole, nous nous rendons dans une autre salle, nous nous installons en cercle, nous utilisons un bâton de parole qui circulera dans le cercle, je leur rappelle quelques règles de base (confidentialité, non-jugement, toutes les paroles sont valables) et je leur pose trois questions, l’une après l’autre :
– Qu’est-ce qu’ils/elles ont eu du mal à apprendre dans leur scolarité passée et en cours ?
– Qu’est-ce qu’ils/elles arrivent bien à apprendre ?
– Qu’est-ce qu’ils/elles aimeraient apprendre de nouveau aujourd’hui ?
Ce temps de 40 minutes environ est véritablement jubilatoire pour les enfants. Certains d’entre eux en arrivent à dire pendant le bilan, que pour la première fois ils ont osé dire des choses qu’ils ont toujours cachées, qu’ils avaient en eux, que pour la première fois ils ont osé dire leurs difficultés car ils sentaient qu’ils n’étaient pas les seuls à les avoir, que tout à coup ils ont découvert différemment certains de leurs camarades dans ce nouveau contexte. Et que ce temps-là, il fallait le renouveler !
Ce que nous ferons certainement, car les enseignant(e)s ont découvert eux aussi des élèves différents de ceux qu’ils/elles ont l’habitude de voir.
Daniel Gostain
Pour aller plus loin
1) Découvrir le « Temps des penseurs«
2) D’autres approches qui peuvent changer la classe
Une question
Qu’est-ce qui empêche de nombreux enseignant(e)s à laisser émerger une libre parole en classe ?