« Pierrot », « Félix le chat », « Mickey Mouse », « Blanche Neige », « Daffy Duck », »Bugs Bunny », »Jeannot l’intrépide », « Wallace et Gromit », « les Shadocks », « Kirikou », « Oggy », « Nicolas » et bien d’autres, sont réunis, pour le plaisir des petits et des grands, à l’exposition « Dans les coulisses du film d’animation » du Musée de la Poste jusqu’au 25 août 2012. Jouets optiques du XIXème siècle, projections d’anciens et de récents courts et longs métrages, affiches, story-board, photographies de plateau, manuscrits, cellulos, dessins évoquent plus d’un siècle d’histoire, du premier dessin animé aux images de synthèse. Cette exposition interactive dévoile aussi l’envers du décor: le visiteur découvre les étapes de réalisation de deux types de films, l’un en 2 dimensions, l’autre en images de synthèse 3 dimensions.
L’exposition est structurée en deux parties. La première « Des sources de l’animation à l’image de synthèse » explore l’histoire du dessin animé des origines à nos jours. Un certain soir d’octobre 1892… un jour ordinaire, non, les visiteurs se pressent au Musée Grévin et vont assister sans le savoir à la naissance du dessin animé. Emile Reynaud projette ,grâce au théâtre optique , ses « Pantomimes lumineuses », Pierrot court inlassablement et sans succès derrière Colombine. » Pauvre Pierrot »! Ce procédé inventé en 1889, donne l’illusion du mouvement. Aboutissement d’une longue série de jouets optiques il permet désormais de projeter une bande de dessins de longueur variable sur un écran. L’exposition présente de magnifiques » joujoux scientifiques » comme les appelle Baudelaire : thaumatrope, phénakitiscope, zootrope, praxinoscope, folioscope, mutoscope. Le passage du théâtre optique au cinématographe est possible ensuite grâce à l’invention de la pellicule. En 1908 , Emile Cohl réalise le premier dessin animé sur pellicule de cinéma » Fantasmagorie » que le musée retransmet intégralement sur écran. La bande mesure 36 mètres et comporte 700 dessins. Le dessin animé va passer du stade de l’artisanat à l’industrialisation grâce à la mise au point des perforations standards et du cellulo. Le dessinateur n’a plus besoin de reproduire les décors fixes sur chaque dessin, seuls les éléments à animer sont tracés sur ces feuilles transparentes. En 1919 Félix le chat fait son apparition et devient la première star du cartoon. On le retrouve dans plus de 200 épisodes et les visiteurs peuvent découvrir » Félix saves the day » de 1922. Mais le célèbre chat se fait voler la vedette en 1928…par une souris répondant au nom de Mickey Mouse.
Enfin le dessin animé gagne ses titres de noblesse en 1937 avec « Blanche Neige et les 7 nains », le premier long métrage animé sonore et en couleurs, qui comporte 400 000 dessins et a nécessité trois ans de travail. Son statut change, il n’est plus uniquement projeté en avant-programme des séances de cinéma, mais tient désormais le haut de l’affiche. Le 23 février 1939 Walt Disney reçoit un oscar pour ce film. Dans les studios, plus de 600 personnes travaillent, les dessins sont faits à la main et l’équipe de coloriage se charge de peindre à l’aquarelle chacun des cellulos. Des concurrents tentent de rivaliser avec Walt Disney, les frères Fleischer créent les personnages de Popeye, de Koko le clown. Tex Avery devient le chef de file du cartoon hollywoodien basé sur des dessins humoristiques, Porky Pig, Daffy Duck, Bugs Bunny font leur apparition sur les écrans. Le réalisateur se veut l’anti-Disney avec un univers comique et burlesque où règne la démesure et dans lequel les personnages échappent à tout contrôle. A partir des années 60, l’animation japonaise fait irruption sur la scène. En 1963, Osamu Tezuka, le père du manga moderne, produit « Astro Boy », la première série animée japonaise. Hayao Miyazaki réalise plusieurs longs métrages au succès mondial, comme » Mon voisin Totoro » (1988) , » Princesse Monoké » ( 1997), » Le voyage de Chihiro » (2001) mais de manière traditionnelle bien qu’à l’ère de l’informatique. En effet à partir de 1995, l’avènement de l’informatique modifie profondément les techniques de réalisation. « Toy story » révolutionne l’animation. C’est le premier long métrage intégralement réalisé en images de synthèse 3D. Le story-board, représentation illustrée du film avant sa réalisation, ne compte que 25 000 dessins. L’exposition réserve un espace spécialement dédié au dessin animé français. Affiches, photographies de plateau, story-board, projections font revivre ces créations. Jean Image et son héro Jeannot l’intrépide sont en bonne place , ainsi que Paul Grimault qui réalise des courts métrages à l’univers poétique et fantaisiste dont « L’épouvantail »(1943), » Le voleur de paratonnerres »(1944), »Le roi et l’oiseau »(1980).Puis ce sont « Les shadoks », à l’esprit absurde, qui crèvent le petit écran. Dans les années 90 Kirikou régale petits et grands de ses aventures en Afrique, et en 2003 Sylvain Chomet amuse le public avec « Les triplettes de Belleville », ce film d’animation muet qui mêle 2D et 3D.
Cette première partie historique sur le dessin animé se termine par l’espace « Tout peut s’animer » qui présente comment des réalisateurs ont exploré l’animation avec des matériaux comme les papiers découpés, les marionnettes, les épingles, les pâtes à modeler. La vedette en est « Le roman de Renard » réalisé en 1926, en France , par le Russe Ladislas Starewitch, dont les héros sont des marionnettes d’animaux humanisés par des vêtements et des attitudes. Les ombres chinoises de Lotte Reiniger, l’écran d’épingles d’Alexandre Alexeïff, les pâtes à modeler de Nick Park sont également explorés.
Après cette évocation historique, la seconde partie de l’exposition, « Les secrets de fabrication », explique les étapes de réalisation de deux films d’animation, un dessin animé en 2D et l’autre en image de synthèse 3D. Le visiteur découvre l’envers du décor, des dessins de recherche au montage, sans oublier le mixage de la bande son. L’explication de la fabrication d’un dessin animé en 2D est illustrée par un épisode d « Oggy et les cafards », série diffusée dans Ludo sur France 3. Le court métrage d’animation » Nicolas et Guillemette »(2008) est le support pour l’explication de la réalisation en images de synthèse.
Après cette exposition didactique, la réalisation d’un film d’animation n’a plus de secret et chacun est convaincu que » c’est plutôt amusant de faire l’impossible ». Des visites guidées de l’exposition sont possibles sur réservation. Un concert est prévu le samedi 25 août à 15h où Mami Chan joue la musique qu’elle a composée pour « Nicolas et Guillemette ».
Béatrice Flammang