« Instruire les filles ? A quoi bon ? Il faut se méfier de cette engeance « pire que le démon » et dont l’intervention « dérègle » le cours des choses, comme disait le doux Fénelon ». En introduction à l’ouvrage de Michel Fiévet, l’historienne Michelle Perrot rappelle qu’en pays catholique, aux 17ème et 18ème siècles, « l’instruction populaire des filles n’est pas une priorité ».
Elles n’en ont que plus de mérite les Angèle Mérici, Louise de Marillac, Françoise de Bermont, Anne de Xaintonge, Marguerite Bourgeoys qui s’acharnent à créer des écoles pour les filles. Bien sûr, elles oeuvrent sous contrôle d’hommes d’Eglise. L’enseignement est plus préoccupé de décence et de contrôle des corps que de savoir. « Encadrement et normalisation progressent plus que l’instruction ». S’ajoutent à cela les difficultés de l’enseignement populaire. Ainsi, chez les Ursulines, les élèves reçues gratuitement sont à 50 par classe quand les élèves payantes ne sont jamais plus de 20. Chez les Chanoinesses de Saint Augustin, il faut, avec obstination, ruser avec les voeux, la hiérarchie et les statuts pour éduquer les petites filles pauvres.
Michel Fiévet fait connaître ces pionnières. Comme le dit M.Perrot, « enseigner, enseigner les filles, c’est une manière d’agir et de s’affirmer, de contester les limites imposées aux femmes, tout en s’y conformant. Entre contrainte et liberté, ainsi cheminent ces « Amazones ».
Michel Fiévet, L’invention de l’école des filles, Des amazones de Dieu aux 17ème et 18ème siècles, Paris, Imago, 2006, 237 pages.
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