Rentrée 2008 : ce qui va changer, ou ce qui doit changer ?
La rentrée 2008 va-t-elle marquer le début d’une ère nouvelle dans les écoles ? Nombreux sont ceux qui le pensent, mais pas forcément en positif.
Récapitulons : avec des nouveaux programmes « rencentrés sur l’essentiel », 24 heures de travail hebdomadaire, deux heures de soutien pour les « élèves en difficulté » et des stages de remédiation pendant les vacances, va-t-on mieux faire qu’avant pour les élèves qui ont le plus besoin de l’Ecole ?
Inutile de revenir ici sur les nombreuses critiques de fond qui ont plu sur les intentions ministérielles, elles sont largement détaillées dans notre dossier.
Mais au-delà des intentions idéologiques, qui sont évidemment centrales, le nouveau dispositif va nécessairement imposer aux écoles des fonctionnements différents, comme le confirme l’enquête du SNUipp. Dans les écoles, les circonscriptions, on vainement attendu la circulaire ministérielle de cadrage qui allait dire « comment on fait ». Dans toutes les circonscriptions, et dans les inspections académiques, on est en train de chercher des solutions pour se sortir de l’injonction paradoxale : peut-on organiser une aide aux élèves sans les stigmatiser ? Faut-il organiser des horaires décalés, comme le suggère le SGEN pour privilégier le travail à plusieurs enseignants ? Quelle place pour les RASED ? les directeurs seront-ils les contrôleurs des heures faites ?
Toutes ces questions en posent une, plus profonde : celle de l’accompagnement des enseignants. Si tout ce qui se passe dans les écoles est piloté depuis Paris à travers le BO, on comprend que la logique de « contrôle » puisse fonctionner avec l’organisation des IEN telle qu’elle existait depuis des décennies. Mais si le système entend donner aux acteurs plus de responsabilité pour chercher à plusieurs des solutions aux difficultés des élèves, alors le système ancien ne peut plus tenir.
Si la circonscription est le bon niveau pour organiser l’accompagnement des équipes d’enseignants pour mieux comprendre les difficultés des élèves, alors ses ressources actuelles ne peuvent plus suffire : deux conseillers pédagogiques et un IEN ne constituent pas une équipe assez forte pour organiser, pour plusieurs centaines d’enseignants, le travail pédagogique sur les évaluations, des propositions d’accompagnement pédagogique, la recherche de cohérence dans les aides construites par les différents intervenants (chargés de classe, RASED, conseillers pédagogiques…), l’appui aux enseignants sur leurs projets, le travail d’analyse des activités ordinaires de la classe, le suivi des débutants…
Devant l’immense perplexité qui gagne les écoles, le risque le plus grand qui guette l’Ecole est sans doute celui du repli individuel. La rentrée dira si les syndicats pourront être le vecteur de la revendication de « professionnalité » des enseignants. Mais il est certain qu’aucune « réforme » ne peut faire évoluer les résultats des élèves sans que sur le terrain, on prenne le temps de travailler ensemble, enseignants de maternelle et d’élémentaire, RASED, conseillers, référents, IEN, dans le respect mutuel, en osant s’outiller, se regarder faire, gratter où ça fait mal. Partout où ce souci existe, on fait des bonds dans la confiance en soi, on ose bouger ce qui paraissait figé, on cesse la guerre des clans et les petits plaisirs hiérarchiques. Bref, on travaille.
Le protocole en discussion entre le ministère et les inspecteurs ferait bien d’y faire une place significative : quelle que soit la valeur des chefs, une organisation efficace ne peut jamais se contenter d’une armée de soldats commandée par un chef visionnaire et lointain.