« Quand on est mal éclairé , désorienté, on ne peut pas exercer sa citoyenneté ». C’est sous l’angle de l’apprentissage des valeurs de la République que Najat Vallaud Belkacem a présenté le 6 octobre le nouveau service « Lire l’actu » proposé gratuitement à tous les établissements scolaires. Avec Lire l’actu les enseignants et les élèves ont effectivement accès à la totalité des contenus d’une douzaine de titres de la presse française et étrangère. Pour autant, les enseignants ont-ils la possibilité de l’utiliser pour l’éducation à la citoyenneté et aux médias ? Pas sur…
La presse française et étrangère en accès facile et complet
« Oui, oui, oui c’est le rôle de l’Education nationale que de former les jeunes à la citoyenneté ». Venue au collège parisien Dorgelès pour présenter le service Lire l’actu, la ministre a nettement mis l’accent sur l’éducation aux valeurs républicaines.
Lire l’actu est une nouvelle plateforme proposée gratuitement aux établissements d’enseignement et offerte à l’Education nationale par une entreprise privée : miLibris. La plateforme reconnait automatiquement les adresses et tout élève ou enseignant peut parcourir la presse du jour librement depuis les postes, ou le réseau wifi, de l’établissement. Selon la ministre, 80% des établissements ont déjà accès au service. Les autres suivront.
On a ainsi accès à une douzaine de titres en version complète et dépouillée de la publicité. On retrouve dans Lire l’actu le Figaro, le Monde, La Croix, par exemple, mais aussi El Pais ou Daily News. Tous ces titres offrent gratuitement l’accès à leurs contenus aux élèves français. La presse quotidienne régionale devrait entrer dans Lire Actu début 2017. Peut-être aussi la presse jeunesse.
La navigation est simple : on part des Unes, on choisit un article et la plate forme propose spontanément en bas de page d’autres articles traitant du même sujet dans d’autres titres. On peut aussi utiliser le moteur de recherche.
La presse comme rempart des valeurs républicaines
« Lire l’actu donne à voir aux élèves que les titres ont des points communs.. Mais qu’ils ont aussi une identité éditoriale qui est légitime. » La ministre a opposé la presse aux sites de rumeurs ou aux moteurs de recherche « qui enferment dans nos habitudes ». « La formation à la citoyenneté n’avait jamais déserté les établissements… Mais au lendemain des attentats , au regard de la façon dont les choses se sont passées dans des établissements, on s’est posé la question (de cette éducation). L’EMI est un axe fort de l’éducation à la citoyenneté. Quand on est mal éclairé , désorienté, on ne peut pas exercer sa citoyenneté ». Pour la ministre, « c’est le rôle de l’Education nationale que d’éclairer les élèves et d’apprendre à décrypter l’information ».
Le Clemi a proposé des séquences abordant avec la plateforme l’analyse de l’image, l’analyse de unes, le travail sur les sources des articles. Des sujets déjà bien connus au collège Dorgelès.
Dans ce collège, Anne Verguet, Maud Moussy, deux professeures de français, et Leslie Fridsch , professeure d’histoire-géo, animent une « classe média » proposée aux 6èmes. « Les 6èmes ne lisent pas la presse », explique A Verguet. L Fridsch souligne que si les élèves ont tous de l’EMC ce travail sur l’information reste utile. Une EPI lettres – histoire basé sur l’analyse de unes est en préparation.
Un outil inadapté ?
Mais voilà, la plateforme Lire l’actu ne permet pas de stocker les articles. Tout est en streaming et est renouvelé quotidiennement. Pour les mêmes raisons, économiques, aucun article ne peut même être imprimé.
« Comment préparer des séquences, demande A Verguet. « Il faut du temps et il faut pouvoir stocker les articles » , explique M Moussy. « On espère qu’il y aura la possibilité de constituer des dossiers », dit L Fridsch. En attendant, difficile de faire l’éducation aux médias et à l’information ou même l’information morale et civique avec Lire l’actu.
Si l’outil est pratique et bien pensé pour un lecteur standard, il n’a pas été réfléchi au regard des pratiques pédagogiques. L’accès aux journaux est ouvert. Mais l’accès aux pratiques de classe impossible.
Dernier problème : le collège Dorgelès est chichement équipé sur le plan numérique. Cinq ordinateurs sont présents au CDI et une salle informatique compte une vingtaine de machines. Le tout pour 440 élèves.
François Jarraud