Dossier spécial
La circulaire Robien
» Il est nécessaire que l’élève
identifie les sons de la langue française ainsi que la
relation qui les relie aux lettres et groupes de lettres
correspondants. Il comprendra alors que les lettres codent du
son et non du sens. Il apprendra à assembler les lettres
pour constituer des syllabes prononçables, puis des mots
qu’il rapprochera de ceux dont il a déjà l’image
auditive dans sa mémoire. La syllabe est un point d’appui
essentiel : savoir segmenter la parole en unités,
retrouver les syllabes qui constituent un énoncé
sont des premiers pas vers la prise de conscience des sons
élémentaires de la langue ». Le ministre de
l’éducation nationale a présenté le 5
janvier sa circulaire sur l’apprentissage de la lecture.
Le texte invite à abandonner la méthode globale et
s’appesantit sur une découverte des phonèmes et
des sons. » L’automatisation de la reconnaissance des mots
nécessite des exercices systématiques de liaison
entre les lettres et les sons et ne saurait résulter
d’une mise en mémoire de la photographie de la forme des
mots qui caractérise les approches globales de la lecture
: j’attends donc des maîtres qu’ils écartent
résolument ces méthodes qui saturent la
mémoire des élèves sans leur donner les
moyens d’accéder de façon autonome à la
lecture ». Et il fixe un objectif : « A la fin du CP, tous
les élèves doivent avoir acquis les techniques du
déchiffrage et les automatismes qui permettent la lecture
autonome et le plaisir de lire ». Après tout qui
pourrait s’opposer à cet objectif ?
Beaucoup moins lisse est le discours qui accompagne ce texte. G.
de Robien maintient que « Oui, la méthode globale
existe toujours ». Il promeut allusivement » une
célèbre méthode syllabique » fort
contestée par les enseignants. Surtout il se
présente comme un ministre de rupture.
« L’apprentissage de la lecture doit commencer par le son et
la syllabe. Il faut le dire clairement, nettement, explicitement
et le faire savoir à l’ensemble du système
éducatif. Cela, je le dis avec force, n’a jamais
été fait. Les instructions ont jusqu’ici
prêté à confusion ; elles sont
demeurées ambiguës… Je veux dire aussi
clairement quel type de démarche doit être
résolument écarté. Cela n’avait jusqu’ici
jamais été fait ».
Pourtant la position de G. de Robien prolonge celle de F.
Fillon. Le ministre donne tort aux spécialistes des
sciences de l’éducation. Il désavoue sa propre
administration qui continue à produire des analyses et
des études fort éloignées des propos
ministériels. Ainsi par exemple la méthode
vantée par le ministre a fait l’objet d’une critique
sévère de l’inspecteur général Jean
Hébrard ( http://www.bienlire.education.fr/01-actualite/a-interview21-Imp.htm).
De façon de moins en moins allusive, le ministre promeut
la mouvance ultra-conservatrice de l’Ecole. Ainsi, devant la
presse, il fait une allusion flatteuse à Rachel
Boutonnet. Surtout, en laissant croire aux parents que les
difficultés de lecture viennent uniquement des « mauvais
maîtres », il jette le discrédit sur les enseignants
et l’inquiétude chez les parents.
Si le ministre lisait les études de son ministère,
il saurait que bien d’autres éléments alimentent
les difficultés de lecture. Et d’abord des facteurs
sociaux que ce gouvernement, en général,
préfère ignorer. Il saurait aussi que creuser le
fossé entre l’Ecole et les parents n’est certainement pas
profitable aux apprentissages des enfants.
http://www.education.gouv.fr/actu/element.php?itemID=200615126
Le dossier d’Education et Devenir
http://education.devenir.free.fr/Tribune.htm
La tribune de R. Goigoux
http://cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/contribs_goigoux2.aspx
Les réactions des syndicats
« Il est plus facile de pointer l’échec scolaire sur
des problèmes de méthodes qui ne coûtent
rien, plutôt que de mettre en avant les effectifs qui ne
cessent d’augmenter, le manque de moyens, le refus de prendre en
compte l’évolution du métier, le temps de
concertation, la politique des cycles, le suivi
individuel… » affirme le Sgen-Cfdt. Pour le syndicat « ce
débat quasi-lunaire sur l’apprentissage de la lecture
pourrait être risible. Mais il dénote une ignorance
totale du travail des collègues du premier degré
qui se sentent montrés du doigt, voire
méprisés, et il ne contribuera aucunement à
conduire tous les élèves à la
réussite scolaire ».
Le Se-unsa condamne également la circulaire
ministérielle. » Cette circulaire renforce la
priorité déjà donnée au
déchiffrage dans l’apprentissage de la lecture mais en
insistant sur la seule phase syllabique. Or, le meilleur
dispositif que préconisent les programmes de 2002 est
celui qui combine de manière rigoureuse l’enseignement du
code et de la compréhension, ce que font la plupart des
manuels utilisés dans les écoles. Ce texte omet la
nécessaire complémentarité entre exercices
de lecture et exercices d’écriture. Il laisse totalement
de côté l’importance de la démarche et des
activités choisies par le maître ».
Pour le Snuipp, « cet apprentissage nie tout simplement la
complexité de l’apprentissage de la lecture, les apports
de la recherche, la compétence des maîtres…
C’est une vision réductrice et tronquée des
programmes de l’école élémentaire, une
vision simplificatrice de l’acte de lecture et par là, de
la mission de l’école dans son ensemble ».
http://www.se-unsa.org/presse/comm/page.php?id=060105
http://www.snuipp.fr/article3037.html
http://www.sgen-cfdt.org/actu/article970.html
Les syndicats appellent au boycott
Les trois principaux syndicats de l’enseignement primaire, le
Se-Unsa, le Snuipp, le Sgen-Cfdt, appellent les enseignants
à ignorer la circulaire ministérielle sur la
lecture. Ils considèrent qu’elle » ignore la
réalité des pratiques mises en oeuvre dans les
écoles, officialise une prise de position
quasi-idéologique, totalement contre-productive en
matière pédagogique ».
Aussi ils appellent les enseignants à s’en tenir aux
programmes de 2002 et à signer l’appel » Apprentissage
de la lecture : assez de polémiques, des réponses
sérieuses ! ».
http://www.sgen-cfdt.org/actu/article978.html
http://cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2006/01/index060106.aspx
http://www.snuipp.fr/article3019.html
Une pétition unitaire
Le B.O. du 12 janvier publie la circulaire Robien sur la
lecture. Une dizaine d’organisations, l’Agiem, l’Airdf, le Crap,
l’Icem, la Fcpe, le Gfen, la Ligue de l’enseignement, le Snuipp,
le Se-Unsa, le Sgen-Cfdt, l’Afef, appellent à signer la
pétition » Apprentissage de la Lecture : Assez de
polémiques, des réponses sérieuses ! ».
Une démarche à laquelle nous nous associons.
Le circulaire Robien
http://www.education.gouv.fr/bo/2006/2/MENB0600023C.htm
Rappel : Sur la circulaire Robien
http://cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2006/01/index060106.aspx
La pétition
http://www.snuipp.fr/article3019.html
Le rapport de l’Inspection sur la lecture
« Les résultats des recherches des vingt
dernières années ont été largement
pris en compte dans l’élaboration des programmes en
vigueur à l’école primaire ainsi que des documents
d’accompagnement qui leur ont été annexés.
Les enseignants et leur encadrement disposent ainsi d’un corps
de recommandations qui devrait permettre une progressive
amélioration de l’enseignement de la lecture et de
l’écriture ainsi que de la prise en charge des
principales difficultés rencontrées par les
élèves ».
Le rapport de l’Inspection générale et de l’ONL
sur « l’apprentissage de la lecture à l’école
primaire » ne remet pas en cause les programmes de 2002 et se
situe très en deçà des déclarations
ministérielles en faveur de la méthode syllabique.
D’ailleurs, très clairement, pour l’Inspection,
« l’opposition entre globale et syllabique est
dépassée. Le véritable enjeu actuel est
ailleurs ». Pire encore, pour le ministre, elle explique
pourquoi la méthode syllabique traditionnelle est
mauvaise. « Les méthodes de lecture syllabiques
traditionnelles qui partent de l’idée que p + a = pa est
le point de départ de l’apprentissage de la lecture ne
peuvent être retenues en l’état. Elles omettent en
effet tout le processus qui conduit l’enfant à pouvoir
analyser la parole en unités élémentaires.
Or, pour comprendre comment fonctionnent les associations
graphèmes-phonèmes, les élèves
doivent préalablement avoir pris conscience que la parole
peut être segmentée en unités (mots,
syllabes, phonèmes) et que les plus petites de ces
unités (phonèmes) ont pour contrepartie des
lettres ou des groupes de lettres (les
graphèmes) ».
L’Inspection mentionne également les résultats
honorables de l’école française :
« L’enquête PIRLS concerne les élèves de
4ème année primaire ; elle situe la France dans un
rang médian, avec un score supérieur à la
moyenne… L’enquête Pisa, conduite sous
l’égide de l’OCDE et portant sur les élèves
de 15 ans, publiée en décembre 2001 situe les
élèves français dans la moyenne des pays
participants : ils ont obtenu un score de 505, très
légèrement supérieur à la moyenne
internationale et ce, avec une dispersion relativement faible :
4,2% d’entre eux ont été classés dans le
plus bas niveau de performances, alors que les pays dont la
moyenne est proche, comme les États-Unis ou la Belgique,
comptent sensiblement plus de jeunes en très grande
difficulté (respectivement 6,4% et 7,7%) ; inversement,
seuls 8,5% des jeunes Français se situent au niveau le
plus haut (plus de 12% aux États-Unis et en
Belgique) ».
Pour autant l’Inspection signale des faiblesses et
concède au ministre qu’il existe des traces de
méthodes semi-globales en vogue dans les années
1970 chez les maîtres et formateurs anciens. La
réforme de 2002 est bonne mais » elle se heurte, d’une
part, à la difficulté de devoir être
expliquée par les formateurs et l’encadrement
pédagogique (or, ils en maîtrisent mal les
caractéristiques), d’autre part, au renouvellement
nécessaire des outils et manuels d’accompagnement de
l’apprentissage par les éditeurs ».
L’Inspection analyse les pratiques constatées de la
maternelle à la sixième et signale des points
faibles. Ainsi ils soulignent en maternelle des efforts à
produire pour l’appropriation du langage oral. Au CP
« l’enseignement de l’identification des mots est le plus
souvent insuffisant » , l’apprentissage de l’écriture
« insufffisant » et la littérature de jeunesse trop
négligée. L’Inspection insiste sur la
nécessité d’élargir la culture des
élèves.
Les propositions tiennent en une philosophie, il faut appliquer
la réforme de 2002 et une page. L’Inspection demande de
renforcer la formation initiale et continue des maîtres.
Pas pour leur apprendre le b-a-ba. Mais pour « que les
maîtres à tous les niveaux de l’école
primaire consacrent un temps suffisant à la construction
de l’univers de référence de la culture
écrite (connaissance du monde, littérature,
activités esthétiques, champs disciplinaires du
cycle III) » . Le ministre semble ne pas avoir lu
l’Inspection générale.
ftp://trf.education.gouv.fr/pub/edutel/syst/igen/rapports/onl_2005.pdf
http://www.adobe.fr/products/acrobat/readstep2.html
Les inspecteurs soulignent la qualité du travail des
enseignants
» La réussite scolaire ne s’impose pas par
décret, elle ne se décide pas rue de Grenelle,
elle se construit au jour le jour, patiemment et selon des voies
diverses, par des enseignants aidant des élèves
à prendre confiance en eux, travaillant en étroite
relation avec les parents reconnus comme co-éducateurs.
Ces enseignants méritent d’être aidés et
respectés ; c’est ce que leur doit un ministre ! Puisse
M. De Robien en prendre conscience au plus vite, en faisant
cesser la pitoyable pantomime à laquelle se livrent des
donneurs de leçons de tout poil… « Patrick
Roumagnac, secrétaire général du syndicat
des inspecteurs (SI-EN) Unsa-Education, juge une clarification
nécessaire.
» Au fil de nos visites, nous rencontrons des enseignants
pratiquant des méthodes différentes avec des
réussites variables. Il est clair cependant que leur
efficacité n’est que faiblement corrélée
aux supports utilisés ou aux démarches
d’apprentissage mises en œuvre. Ajoutons, mais ce ne sera
vraiment une surprise pour personne, sauf peut-être pour
le ministre, qu’il y a bien longtemps que nous n’avons vu
pratiquer la méthode globale ! En revanche, nous voyons
très souvent des enseignants remarquablement
motivés qui s’appliquent à faire réussir
tous leurs élèves, et ce dans des conditions
parfois critiques. Ces efforts accomplis depuis des
années pour répondre aux difficultés des
élèves méritent mieux que d’être
balayés d’un revers de main par un ministre qui
n’hésite pas à établir un lien de
causalité directe entre la méthode d’apprentissage
de la lecture au CP et les problèmes que rencontrent des
élèves en 6ème. Entendue dans un
Café du Commerce, cette assertion ferait sourire,
émanant de la rue de Grenelle, elle fait frémir
!…
C’est plutôt la confiance vis-à-vis des enseignants
qui semble pertinente : confiance dans leur capacité
à développer en équipe des approches
prenant en compte les besoins spécifiques liés aux
caractéristiques des élèves hic et nunc,
à analyser avec lucidité les ressources
disponibles et à en optimiser l’usage, à renforcer
les échanges professionnels en s’appuyant, en
particulier, sur les nouvelles technologies, à prendre en
compte les évolutions de la société et les
avancées de la recherche dans le champ de la construction
des savoirs, à développer des contacts avec les
parents d’élèves pour une plus grande
cohérence de la co-éducation, à solliciter
en toute confiance des aides pour parfaire leurs
pratiques… bref, à se comporter comme de
véritables professionnels plutôt qu’à se
soumettre comme des girouettes à des injonctions ou
à des oukases. Plutôt que de vilipender une
méthode inappliquée et d’encenser une autre qui ne
va pas sans poser un certain nombre de problèmes, il
serait préférable de renforcer la formation
continue et de favoriser le développement de projets
locaux répondant à des exigences soigneusement
évaluées ».
http://www.unsa-education.org/sien/dossiers/systeduc/premierdegre/methglobComPress.htm
Quand le ministre ne sait pas lire…
« Le ministre déforme les conclusions d’une
étude sur l’apprentissage de la lecture » affirme,
dans Libération, Emmanuel Davidenkoff. G. de Robien
aurait caviardé habilement un extrait d’un rapport de
l’Inspection générale et de l’Observatoire
national de la lecture pour le mettre au profit de sa
circulaire.
On peut ajouter que, dans le dossier de presse distribué
le 5 janvier, G. de Robien s’appuie sur un ensemble documentaire
habilement fabriqué. Par exemple, il propose des
citations d’A. Bentolila ou de Franck Ramus dont la
signification est faussée. Le dossier « oublie » aussi la
multitude de travaux qui mettraient en évidence
l’absurdité de la circulaire ministérielle.
http://www.liberation.fr/page.php?Article=350195
http://www.education.gouv.fr/actu/element.php?itemID=200615126
Robien désavoué
« Personne n’utilise plus depuis longtemps la méthode
globale. Quant à la méthode dite syllabique, elle
n’a jamais fait la preuve de son efficacité car elle n’a
jamais été évaluée ». Dans un
communiqué publié par l’A.E.F. (Agence Education
Formation), Michel Fayol, directeur du laboratoire de
psychologie sociale et cognitive de l’université
Blaise-Pascal de Clermont-Ferrand et membre de l’ONL, contredit
les propos ministériels sur la lecture. Pourtant M. Fayol
fait partie des scientifiques mentionnés par leministre
pour justifier sa circulaire sur la lecture.
« La seule chose que montrent les travaux scientifiques sur la
lecture, c’est qu’une part considérable de
l’apprentissage de la lecture dépend de la maîtrise
de la phonologie et de la connaissance des noms et des sons des
lettres. La question essentielle n’est pas l’usage de telle ou
telle méthode de lecture, mais bien de savoir comment
faire pour qu’un enfant qui arrive au CP puisse avoir
été préparé à construire des
phonèmes, qui ne sont pas des sons, mais des
unités abstraites et difficiles à acquérir,
et à les mettre en relation avec les lettres. Et cela n’a
rien à voir avec la méthode syllabique. Lire les
lettres et les sonoriser ne suffit pas pour que les enfants
construisent le phonème. Si c’était vrai, toute la
génération des années 1950 aurait appris
à lire. Remettre au goût du jour la méthode
syllabique n’est qu’une reconstruction idéalisée
d’un monde qui n’a jamais existé ». Michel Fayol est
très clair : il ne soutient pas le retour à la
méthode syllabique. (extraits d’une dépêche
de l’AEF (Agence Education Formation), reproduits avec son
autorisation, www.L-aef.com et pour les chefs
d’établissements www.educinfo.info).
ftp://trf.education.gouv.fr/pub/edutel/actu/2006/apprendre_a_lire_reference.pdf
http://cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2006/01/index170106.aspx
Du coté des pédagogues
R. Goigoux dénonce l’ignorance de Robien
« Affirmer, comme le fait le ministre, « que le cerveau
est ainsi fait que c’est par la méthode syllabique que
l’on apprend le mieux à lire » est proprement
ridicule ». Dans Fenêtres sur cours n°279, l’organe
du Snuipp, Roland Goigoux (Clermont-Ferrand II) ne trouve qu’une
excuse à Gilles de Robien : son souci
électoraliste.
Il dénonce l’ignorance du ministre. « Oui, il y a
ignorance quand le ministre affirme que les méthodes
dominantes ont « un départ global très long
» alors que Ratus et Gafi, les manuels les plus
utilisés au C.P, organisent l’étude des
correspondances graphèmes- phonèmes dès le
premier jour de la rentrée des classes. Ignorance encore
quand il occulte les raisons pour lesquelles les enseignants ont
abandonné la méthode Boscher et caricature les
pratiques alternatives qu’ils ont progressivement construites.
Ignorance enfin quand il veut obliger tous les instituteurs
à procéder de manière identique… Une
telle ignorance du métier ne peut-être qu’un
déni du métier ».
S’agissant des 15% d’élèves en difficultés
de lecture, « rien ne permet d’affirmer aujourd’hui que ces
difficultés ont pour origine principale les
méthodes de lecture. Comment expliquer sinon que le
chiffre de 4 % de non-lecteurs en 6ème grimpe à 11
% en ZEP alors que les méthodes utilisées au CP ne
sont pas différentes du reste du territoire ? Ceux qui
déchiffrent sans comprendre manquent de vocabulaire, de
connaissances générales et de capacité
à réguler leur compréhension. Tout cela
doit faire l’objet d’enseignement et pas seulement au CP :
dès l’école maternelle et tout au long du cycle
3 ».
http://www.snuipp.fr/IMG/pdf/fsc279.pdf
http://cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2006/01/index090106.aspx
Les professionnels mettent les pendules à
l’heure
« La situation de l’école ne correspond pas à la
description caricaturale qui en est faite ». Une dizaine
d’organisations professionnelles (Agiem, Airdf, Crap, Icem,
Fcpe, Gfen, Ligue de l’enseignement, Snuipp, Se-Unsa, Sgen-Cfdt)
publient un communiqué qui veut mettre un terme final
à la polémique sur l’apprentissage de la
lecture.
Elles rappellent que « l’apprentissage de la lecture, ne
relève pas seulement du cours préparatoire, et
vouloir ramener la réussite ou l’échec de
l’élève au seul choix de la méthode de
lecture n’est pas sérieux ». D’ailleurs, « la
« querelle des méthodes » est
dépassée. Méthodes syllabique, globale ou
mixte ont laissé place à de nouvelles pratiques
forgées progressivement au cours des trente
dernières années. Il ne s’agit pas des
méthodes mixtes. Ces approches qui sont cohérentes
avec les résultats des recherches scientifiques
récentes, mettent en œuvre simultanément la
maîtrise du code et la compréhension ».
Elles invitent donc au maintien des programmes de 2002 et
dénoncent une campagne mystificatrice. » Nous sommes
bien loin des affirmations passéistes et approximatives
de l’actuel ministre de l’Education Nationale ». Elles
rappellent également que l’apprentissage de la lecture
est une pratique sociale. Pour aider les écoliers il faut
restaurer la confiance entre l’Ecole et les familles. « C’est
également en soutenant et en renforçant toutes les
initiatives, en lien avec l’Ecole et les familles qui favorisent
le goût pour le livre et la lecture : institutions et
associations culturelles, bibliothèques et
médiathèques, presse et médias de
qualité pour la jeunesse ».
Cet appel est signé également par des
personnalités : Jacques Bernardin (IUFM
d’Orléans-Tours), Serge Boimare (Centre Claude Bernard),
Rémy Brissiaud (IUFM Versailles), Evelyne Charmeux,
Gérard Chauveau (INRP), Jacques Fijalkow
(Université de Toulouse), Roland Goigoux (Iufm
d’Auvergne), P. Meirieu, A. Ouzoulias etc.
http://www.snuipp.fr/article3019.html
Jacques Bernardin dans le Café 68
http://cafepedagogique.net/lemensuel/lesysteme/Pages/2005/tribune_68_accueil.aspx
Blog du Café
http://www.cafe-leblog.net/index.php?2005/12/13/30-l-enseignement-de-la-lecture
La syllabique, c’est pas automatique !
« Quand une campagne de santé publique est
lancée, sur les antibiotiques par exemple, le premier
interlocuteur proposé aux français est le
médecin généraliste. Quand il s’agit de
lecture, on minimise le rôle de l’instituteur, on
décide à sa place ou l’on caricature son action.
Pire, on le suspecte d’être le complice de ceux qui depuis
trente ans s’acharneraient à empêcher les enfants
d’apprendre à lire. Au mieux, on le plaint d’être
victime de la tyrannie de sa hiérarchie ou des lubies de
la recherche pédagogique ».
Dans une tribune accordée au Café
pédagogique, Roland Goigoux dénonce le
mépris ministériel envers les enseignants. »
Si, comme l’affirme le ministre, une simple circulaire,
rédigée à la va-vite et portant sur le seul
cours préparatoire, avait le pouvoir de faire baisser de
manière significative le pourcentage d’illettrés
dans notre pays, c’est que le travail actuel des instituteurs
serait d’une grande médiocrité ». Bien au
contraire, pour R. Goigoux, » il faut faire confiance aux
instituteurs et renoncer à instaurer le couvre-feu
pédagogique ».
http://cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/contribs_goigoux2.aspx
Rappel : Tribune de J. David
http://cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/baba_index.aspx
Sortir de l’idéologie
« Il y a un aussi un large consensus parmi les scientifiques
sur le fait que l’apprentissage des correspondances
grapho-phonologiques doit démarrer dès le premier
jour du CP… L’enseignement phonique systématique
est plus efficace que l’enseignement phonique non
systématique ou absent. L’enseignement phonique est plus
efficace lorsqu’il démarre tôt (GSM ou CP) que
lorsqu’il démarre après l’apprentissage de la
lecture (CE1). L’enseignement phonique systématique est
également supérieur à l’enseignement non
phonique sur des mesures de compréhension en
lecture ». Sur Education et Devenir, Franck Ramus (Cnrs)
développe sa pensée, rapetissée par Le
Figaro. Alors partisan de la « méthode syllabique » ?
C’est plus compliqué. « Si la phonique doit être
présente dès le début de l’enseignement de
la lecture, elle ne doit pas être seule; ce n’est qu’une
composante parmi bien d’autres qui sont tout aussi
nécessaires… Sur le fond, je ne suis pas un
partisan de la méthode Boscher. Je pense que c’est une
méthode qui marche bien avec beaucoup d’enfants (ceux qui
ont déjà acquis tous les fondamentaux langagiers
nécessaires), mais qui est insuffisante pour beaucoup
d’autres, qui manquent de vocabulaire, de contact avec les
livres, etc… En ce qui concerne Goigoux, il a
effectué une des rares études francophones
comparant rigoureusement l’efficacité d’une
méthode idéovisuelle et d’une méthode
phonique, et il a démontré la
supériorité de la méthode phonique
(appelée généralement syllabique en
France). Les méthodes comparées n’étaient
ni une méthode mixte, ni la méthode Boscher, ce
qui souligne, je suis bien d’accord avec vous, la confusion
qu’il y a à parler de méthodes globale et
syllabique, chaque terme recouvrant des méthodes
très variées. Malheureusement il ne m’a pas
été possible de faire sortir la journaliste du
Figaro de cette dichotomie, d’où certains
raccourcis ».
Françoise Clerc (Université Lyon 2) nuance elle
aussi le débat. « Il faut informer le public que la
méthode globale inventée au 18ème
siècle et largement réinterprétée
par Freinet et Decroly, n’a plus d’adeptes. De même, il
faut préciser que la méthode dite «
syllabique » n’existe plus au sens strict du terme. Les
enseignants ont de plus en plus tendance à
déterminer leur propre démarche à partir de
documents divers… Il est faux de dire que le
décodage précède la compréhension
dans l’ordre des acquisitions. En revanche, l’automatisation du
décodage soulage le lecteur et lui permet de mieux
consacrer ses ressources mentales à la
compréhension. À l’inverse, la familiarité
avec le sens facilite le décodage. C’est pourquoi
l’apprentissage se fait généralement en conjuguant
l’entraînement au décodage et l’élaboration
du sens à partir d’un travail complexe, alternant des
activités variées consacrées à la
compréhension du texte mais aussi à la
construction du sens… Le fameux débat sur la
lecture parle d’une école qui n’existe plus que dans les
souvenirs des adultes et dans les fantasmes des
politiques ».
Pour Françoise Clerc, » le débat cache mal un
enjeu idéologique qui en fin de compte conduit à
rejeter la responsabilité de l’échec sur l’enfant
et sur sa famille » .
Dans une contribution, Roland Goigoux (Université Blaise
Pascal à Clermont-Ferrand) estime que « la lecture est
une activité qui requiert simultanément une
pluralité de connaissances et d’habiletés
intellectuelles. Celles-ci doivent être toutes
enseignées et exercées à l’école si
l’on ne veut pas se résoudre à un échec
précoce et cumulatif des élèves les moins
sollicités et les moins instruits hors l’école. En
d’autres termes, les recommandations adressées aux
enseignants devraient insister sur « ce qu’ils n’ont pas
le droit de ne pas enseigner ». Par exemple, ne pas
exclure l’enseignement explicite des correspondances
grapho-phonologiques, ne pas négliger les tâches
d’écriture dès le début de l’apprentissage,
ne pas remettre le travail d’enseignement de la
compréhension à plus tard, ne pas réserver
l’accès au livre aux seuls élèves capables
de lire de manière autonome ou qui auraient fini leur
travail avant les autres, etc. » Dans cette perspective,
« l’effet-maître » lui paraît plus important que
« l’effet-m »thode ». « C’est pourquoi il est absurde, sur le
plan politique, de rédiger dans la précipitation
une nouvelle directive nécessairement en contradiction
avec les programmes en vigueur : celle-ci ne peut que
démobiliser les enseignants suspectés d’être
des crétins ou des lâches. L’effet magique d’une
circulaire capable à elle seule d’inverser les chiffres
de l’illettrisme (selon les propos mêmes du ministre)
stigmatise leur médiocrité antérieure, leur
aveuglement, leur manque de bon sens et leur absence d’autonomie
dans le travail ».
Sur le site d’Education et Devenir
http://education.devenir.free.fr/Lecture.htm
Bentolila : La méthode ne suffit pas
« Contrairement à ce que l’on a seriné aux
instituteurs pendant trente ans, ce n’est pas le fait de
déchiffrer qui est responsable d’une lecture
dépourvue d’accès au sens, mais c’est le
déficit du vocabulaire oral qui empêche l’enfant
d’y accéder ». Dans une tribune accordée au
Figaro, Alain Bentolila déplace le débat sur
l’illettrisme en rappelant l’importance du milieu culturel et la
durée de l’apprentissage.
« La responsabilité de l’école maternelle est
ainsi essentielle ; dès la petite section, elle doit avec
patience et obstination s’attacher à nourrir le stock
lexical des enfants, à travailler sur le sens des mots en
contexte et hors contexte. C’est là que se gagne la
bataille future de la lecture… Une dernière
question reste à poser : a-t-on fini d’apprendre à
lire au sortir du cours préparatoire ? La réponse
est non, cent fois non ! Beaucoup reste à faire, et je
dirais même l’essentiel reste à faire… On ne peut
plus penser qu’une fois les mécanismes de la lecture
acquis tous les élèves vont hardiment s’engager
dans ce que l’on appelait la «lecture courante».
Beaucoup, privés d’une médiation familiale
bienveillante et exigeante, ont besoin que l’école leur
apprenne à comprendre… Beaucoup doivent être
accompagnés sur le chemin d’une lecture de plus en plus
longue ».
http://www.lefigaro.fr/debats/20051214.FIG0248.html
Lettre ouverte de Bernard Devanne
« L’exemple que je prends est celui d’une grande section en
ZEP… La maîtresse demande aux enfants les plus
régulièrement scolarisés, en
décembre d’essayer d’écrire certains mots sans
modèle. Pour H…, c’est le mot « chocolat ».
Après une aide ponctuelle pour faire retrouver, à
partir d’écrits connus, la graphie de la première
syllabe, la maîtresse s’éloigne ; lorsqu’elle
revient près de H…, celui-ci a écrit
« chocola ». Dès que la maîtresse commente « C’est
bien, mais il y a encore une lettre après le a… « ,
le voisin d’H…., F…, jette un coup d’œil et
lance « Ben oui, à chocolat, y a un t à la fin
! ». Bernard Devanne, professeur à l’IUFM de
Basse-Normandie, nous emmène ainsi en grande section de
maternelle.
Sa « Lettre ouverte au ministre » met en évidence
l’absurdité de la dernière circulaire
ministérielle sur la lecture. Bien loin de faciliter les
apprentissages, elle les remet en question. « Cet instant de
grande section montre… que quelques-uns (c’est le cas de
F…) peuvent, dès ce moment, avoir l’intuition
qu’au-delà de la réalisation phonographique, se
pose le problème de la conformité orthographique.
Oui, avant Noël de grande section, F… sait
déjà tout cela… D’autres le suivent…
Parce qu’il s’agit d’H…, de F…, et de tous ceux
qui les accompagnent dans les mêmes apprentissages, parce
que se pose pour eux – plus que pour d’autres – le
problème de la perte de sens de l’année de CP, et
qu’ils courent donc le risque d’un « décrochage » dont on
connaît les conséquences, j’imagine que vous,
Monsieur le Ministre, pas plus que moi, ne pouvez demeurer
insensible. ». Nous suivrons, avec Bernard Devanne, les
progrès et les difficultés de ces enfants,
ballottés par une décision absurde. « Dans le
contexte actuel, je me ferai un devoir de publier les
résultats individuels, avec les réussites et les
difficultés, de ces enfants de grande section en ZEP,
afin qu’il soit clair pour tous que leur imposer, l’année
scolaire suivante, une méthode » purement syllabique »
serait une aberration ». Rendez-vous est pris.
http://cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/devanne_i2l.aspx
Sauvons la lecture !
« Le ministre se propose de démontrer en quoi la
« méthode » qu’il met en cause est dangereuse
et en quoi la syllabique s’impose à l’évidence. En
ce moment pathétique où la rue de Grenelle rejoint
le Café du commerce, le fou rire le dispute à la
consternation. Mais il est blessant, pour les maîtres, les
formateurs et les chercheurs, de voir ainsi mises en doute leurs
compétences professionnelles et la réalité
de leurs connaissances par un responsable politique qui aborde
des questions, dont à l’évidence il ne
soupçonne même pas la technicité : les
recherches en la matière, d’une extrême
précision, sont publiées dans des articles qui se
comptent par milliers. Comment peut-on les balayer ainsi d’un
simple revers de main ?
A l’initiative d’un collectif qui regroupe des
spécialistes des sciences de l’éducation (Jacques
Bernardin, Rémi Brissiaud, Eveline Charmeux,
Gérard Chauveau, Jacques Fijalkow, Roland Goigoux,
Philippe Meirieu, André Ouzoulias, etc.), la
pétition nationale « Sauvons la lecture » est
lancée. Elle conteste l’argumentation
ministérielle et montre les dangers de sa campagne.
« Le plus inquiétant n’est-il pas qu’après que
le Parlement a légiféré sur la bonne
façon d’enseigner l’histoire de la colonisation, en lieu
et place des historiens, un ministre s’arroge le droit de
trancher sur la bonne façon d’enseigner la lecture, en
lieu et place des professionnels ? A-t-il conscience qu’il
dénie aux enseignants ce que l’école laïque
leur a toujours reconnu : la pleine responsabilité de
leurs démarches pédagogiques ? A-t-il même
conscience d’ébranler gravement la confiance des parents
dans l’école ? Dénuée de toute valeur
scientifique, en rupture avec la tradition républicaine,
la campagne du ministre suscite notre indignation et nourrit nos
inquiétudes ».
Le Café pédagogique vous invite à signer
cette pétition. Le site qui héberge la
pétition appelle à une validation par
téléphone : celle-ci n’est pas indispensable, une
validation par mail (totalement gratuite) est possible.
http://www.lapetition.com/sign1.cfm?numero=1058
Le 4 pages du Snuipp sur la lecture (en pdf)
http://www.snuipp.fr/article3035.html
L’Icem, le Gfen et l’Afl refusent la circulaire
Robien
» Nous, éducateurs, enseignants, parents, militants de
mouvements pédagogiques et d’éducation populaire,
nous ne tiendrons pas compte de la circulaire du Ministre de
l’Éducation nationale préconisant une
méthode de lecture contraire à la visée
émancipatrice de l’Éducation et aux
résultats des recherches que nous conduisons ». L’Icem
Freinet, l’Afl et le Gfen durcissent le ton.
Pour eux, » imposer une méthode d’apprentissage est
déjà en soi un déni d’éducation,
réduisant l’acte d’enseigner à une simple
exécution et la classe à une somme de techniques
et de recettes. Mais lorsque cette méthode vise
l’assujettissement de la jeunesse, nous sommes bien dans la
propagation d’une idéologie politique écrasant
tout espoir d’émancipation possible par
l’éducation… Une jeunesse qui déchiffre et
une jeunesse qui lit… Les jeunes des milieux populaires
en sauront toujours bien assez pour déchiffrer les
programmes de télévision, la publicité et
les messages utiles à la consommation. Des textes
simplifiés pour les uns, des textes complexes pour les
autres, les « héritiers », qui les auront d’abord
rencontrés dans la famille et les activités
culturelles privées … ».
Les 3 organisations appellent les enseignants à ne pas
tenir compte de la circulaire Robien.
http://www.icem-freinet.info/
Une vidéo « la syllabique c’est pas
automatique »
Pas facile de résister au matraquage médiatique en
faveur des méthodes passéistes, du « bon sens », des
« solutions simples » et de la sélection précoce. Le
Café vous offre, grâce à la gentillesse de
Bruce Demaugé-Bost, une séquence vidéo qui
lutte contre la pensée prête à consommer du
moment. Une série à suivre…
Format Real Player 1,3 Mo
http://cafepedagogique.net/lesdossiers/Documents/syllabique1.ram
Format WMV 4 Mo
http://cafepedagogique.net/lesdossiers/Documents/syllabique2.wmv
Format Real Player 7 Mo
http://cafepedagogique.net/lesdossiers/Documents/syllabique3.ram