Jacques Bernardin (GFEN) : « Plus de
hors-école pour faire école ? »
La coïcidence est fortuite,
mais fait sourire la salle pleine à craquer (il a même fallu refuser du
monde) : c’est dans cette même rue que furent fondés, il y a
vingt ans, les premiers « Coups de pouce » à la Plaine St Denis, dans ce
département « où les RAR ne sont pas rares »…
Fort du signe, le président du
GFEN, Jacques Bernardin, rappelle que pour son mouvement, la réflexion
sur l’aide ne date pas d’hier. Mais l’explosion des dispositifs d’aide,
dans ses différentes variantes, interroge : études accompagnées et
accompagnement éducatif dans l’éducation prioritaire, puis dans toutes
les écoles, stages pendant les vacances, remédiation scolaire faite par
les enseignants volontaires par le passage à 24 heures… « C’est l’aide
à tous les étages ».
Mais
derrière les évidences, le GFEN veut faire s’interroger. Aider les
élèves en difficultés, certes. Mais quand on constate le désengagement
institutionnel et la volonté de gommer le social pour tout faire porter
sur la responsabilité des individus, il entend rejoindre l’avis de
Doinique Glasman lorsqu’il appelle à la « vigilance pour éviter que
l’accompagnement scolaire devienne l’accompagnement de l’exclusion
sociale ». Bruno Suchaut, de l’IREDU, constate des faits similaires
dans ses études : à caractéristiques scolaires et sociales égales,
l’effet de l’accompagnement est « ténu ». Mais en même temps, il
souligne que l’aspect global neutre peut masquer des effets positifs ou
négatifs, selon l’organisation retenue dans les établissements. Comme
le rapport Maingat sur les GAPP (ancêtres des RASED) le signifiait en
son temps, s’intéresser de près à ce qui se fait dans l’aide est
indispensable si on veut ne pas alimenter le sentiment de fatalité à
l’égard de « ces enfants là. »
« L’ambition des ces rencontres,
poursuit Jacques Bernardin, est de penser l’accompagnement
: que signifie un système où il faut toujours plus de hors école pour
faire école ? de quoi pourrait être faite l’aide pour être efficace ?
L’accompagnement est aussi un lieu d’invention, de re-saisie de
préoccupations par le corps social qui s’en empare hors du champ clos
de l’école. C’est le lot de tous ceux qui se coltinent au
réel… Travailler hors la classe aide à dévoiler les malentendus, à
trouver de nouveaux modes opératoires… »
La première journée est
centrée sur l’accompagnement à la scolarité, en analysant ce qui est en
jeu dans l’aide, en cherchant les dispositifs les plus opératoires en
croisant les acquis des mouvements pédagogiques et les questions. La
seconde journée centrera sur l’Ecole : qu’est-ce qui est de nature à
aider l’élève à l’école, avant ou pendant les apprentissages…
«
Seul on va plus vite, mais à plusieurs on va plus loin, dit un proverbe
africain. ». Deux jours de débats pour le prouver…
Gérard
Chauveau : « quatre conditions pour un accompagnement efficace »
« Pour comprendre comment
l’enfant apprend de l’école, il faut avoir un regard écologique »
explique Gérard Chauveau, qui inventa avec son épouse et collaboatrice
Eliane les « coups de pouce » , « comprendre
à la fois ce qui se passe dans un espace qui déborde largement l’espace
de l’école : la maison, la famille, mais aussi un « tiers-lieu »
éducatif et culturel. » Pour lui, c’est ce qui va
légitimer les actions d’accompagnement scolaire : « dans le prolongement des acquis
de la recherche, nous avons rédigé la Charte nationale de
l’Accompagnement scolaire, de 1992 à 2001 », avec
l’ambition de surtout ne pas pour refaire l’Ecole après l’Ecole, mais
d’agir vers quatre directions :
–
L’aide aux devoirs,
– des
apports culturels,
–
faire une place aux parents
: les aider à renforcer leur suivi scolaire de leur enfant, dans des
lieux autour de l’Ecole. « Quand on s’y prend d’une certaine façon, il
est possible de faire qu’ils s’en emparent très massivement ».
–
Mais notre action a aussi l’ambition d’accompagner les enseignants, dans le
cadre des mouvements d’éducation nouvelle, de travailler en liaison
avec eux.
«
Je postule que quand on réunit ces quatre conditions, l’aide produit
des effets positifs ».
Toute son expérience a été guidée par
une observation somme toute simple : « Comment se fait-il que les
enfants d’ouvriers se divisent dès le CP, un tiers réussissant à
apprendre à lire très bien, et un tiers étant en échec important ? »
Sa première explication ? « Nous
avons été la chercher dans l’aide quotidienne que ces enfants
recevaient à la maison, dans certaines familles d’ouvriers Nous en
avions donc tiré des conclusions sur l’aide à construire pour
ceux qui ne bénéficiaient pas de cette aide.Ensuite,
nous avons constaté que les élèves qui pouvaient avoir des activités
autour de l’Ecrit hors temps scolaire réussissaient mieux. C’est
pourquoi nous avons souhaité investir le temps péri-scolaire. »