Pratiques des classes et autorité…
Alors, l’autorité, ça ne fonctionne plus ?
« Lorsque les chercheurs ne sont pas d’accord, ils se réunissent pour voir s’ils peuvent malgré tout partager quelques concepts et opinions qu’ils pourraient partager avec le public », présente le maître de cérémonie, Bernard Rey. « Les chercheurs que vous allez entendre (Jacques Pain, Jean Houssaye, Erick Prayrat pour le matin, Christine Passerieux, Dominique Ottavi pour l’après-midi). Ces conférenciers vont être soumis à un jury qui va leur poser des questions, appuyés par des discutants, Dominique Gelin et M. Auduc, responsables de formation du 1er et 2nd degré à l’IUFM, pour les amener à préciser ce qu’ils préconisent. Les membres du jury sont professeurs, universitaires, formateurs dans diférentes disciplines, inspecteurs, conseiller principal d’éducation…
Que retiendront les participants ?
Pas simple. Les avis sont partagés : « certes, ça fait du bien de réfléchir, mais j’aurais aimé qu’on entre dans les détails. Comme l’ont dit les intervenants, c’est dans la classe que ça se joue, et en tant que débutante je ne sais pas trop qu’en faire. » Selon les personnes, les questions de tel intervenant font écho : « certes, je ne comprends pas toujours les références citées? Mais j’aime bien partir sur une expression, et laisser dériver… Certes, je perds le fil. Mais dans la clase, ça doit leur faire pareil… »
Nombre de formateurs présents apprécient les invitations à « jouer collectif » pour travailler le métier. « C’est aussi une bonne piqure de rappel pour des choses que j’ai lues ». L’actualité sourd dans toutes les conversations, avec le sentiment qu’en matière de formation, on fera moins bien l’année prochaine. « J’ai bien aimé qu’on dise qu’on puisse diminuer la violence des élèves en s’interrogeant sur les violences faites aux élèves, dans et hors l’école » précise une chef d’établissement invitant aux collaborations interprofessionnelles. La salle réagit… Il faut dire que les stagiaires profs des écoles, majoritaires, se sentent moins concernés que leurs collègues du second degré.
L’actualité en cours, avec les mouvements sociaux qui se développent dans les établissements de la « périphérie », n’a pas poussé les portes de la salle de conférence de la MGEN. On cite cependant, de la salle, les réformes et les suppressions de postes qui fragilisent le collectifs dans les établissements : la salle demande « qu’on ne culpabilise pas les jeunes enseignants qui apprennent le métier ». Pour intéressants qu’ils soient, les philosophes de l’éducation sont un peu loin de la vraie vie, malgré les efforts des orateurs. Une question ramène sur terre : « Les générations d’enseignants qui arrivent ont déjà connu un système éducatif qui avait modifié son rapport à l’ordre scolaire. Est-ce que ça va avoir un effet sur la norme scolaire qu’il vont eux-même demander aux élèves ? »
Bernard Rey tente une synthèse finale qu’il définit comme « subjective » : « Il m’a semblé qu’à travers les cinq conférences, on avait de grands contrastes, tant dans la manière de parler que d’évoquer leurs expériences. Néanmoins, je trouve plusieurs points de consensus. Mais la question de l’autorité peut en cacher une autre : l’incantation qui voudrait faire croire que les problèmes de l’Ecole disparaitraient si on fait jouer l’autorité naturelle del’enseignant. »
Alors , où est le problème, où sont les divergences ? Certains veulent « construire un vivre ensemble commun dans la classe », dans un traitement relationnel invitant à construire à l’Ecole une loi commune construite dans l’interaction.
Un autre axe, un peu différent, me semble être celui qui met l’accent sur les apprentissages, qui rappelle que les problèmes de résistances des élèves à l’ordre scolaire peut avoir une source dans leur rapport au savoir, dans la manière dont les malentendus se développent à l’Ecole.
Il lui reste des questions :
– s’il est important que les élèves distingent les normes scolaires des normes sociales, peut-on mettre de côté le « vivre ensemble » ? Ce n’est peut-être pas un détail.
– à l’intérieur des savoirs, certaines didactiques postulent que la confrontation à des « problèmes complexes » vont les amener vers le savoir. Or, tout ne peut pas être réinventé par les élèves, surtout ce qui a été fixé par des patrimomines particuliers spécifiques. Comment faire pour échapper à « l’argument d’autorité » qui nous revient sur le nez ?
– dire que le respect de la loi commune va se faire en marchant, c’est intéressant, mais qu’en est-il d’un certain « ordre premier » qui soit la condition d’un « pouvoir faire ensemble minimal » ? Les quelques erreurs du débutant, en situation difficile, ne vont-il pas le condamner à ne plus pouvoir rien faire ?
– comment généraliser des modèles pédagogiques, comme la pédagogie institutionnelle, sans dire « comment on fait pour commencer », sans se contenter du « récit de vie » dont on ne peut rien faire ?
– renvoyer aux formateurs leurs problémes de formateurs, c’est sans doute la marque d’une position respectueuse de la part des chercheurs. « Mais construire un discours pour donner les règles de la pratique, ce serait sans doute un travail utile. Le « savoir de l’enseignement » n’est pas inexistant, Poursuivons-en l’écriture… »
Les PE2 quittent la salle. Ils ont eu la nouvelle qu’ils atendaient, grâce à MSN attrapé par le wifi de la salle : leur lieu de stage pour la semaine prochaine. Passage aux travaux pratiques en tentant de relativiser la petite boule au ventre. « J’ai vu ce niveau là dans les ateliers de pratique accompagnée… Ca va m’aider… ». Pourvu que ça dure… Mais il n’y a pas de raison… S’ils s’autorisent…