Par François Jarraud
Promis : ce n’est pas en rapport avec les débats actuels sur l’Ecole, nous a affirmé Yann Diraison, directeur général des relations humaines au Secrétariat général de l’enseignement catholique (SGEC). N’empêche, l’autonomie des établissements est un des sujets en débat actuellement et l’enseignement catholique publie un ouvrage qui en pousse la logique. Simple coïncidence pour un service d’éducation qui multiplie les innovations de gestion ?
« C’est l’aboutissement de deux ans de travail« , nous explique Yann Diraison. L’ouvrage « L’établissement associé : l’autonomie au service de l’intérêt général » que publie le SGEC est un véritable guide juridique destiné aux chefs d’établissement du privé sous contrat. En 7 chapitres, il aborde les différents points relatifs au contrat passé entre l’Etat et les établissements catholiques : les obligations du contrat, la nomination des maîtres, le droit disciplinaire applicable aux maîtres, la scolarité et l’orientation des élèves, la passation et résiliation du contrat, les relations informatisées entre l’Etat et les établissements et le financement des établissements.
Mais, voilà, l’ouvrage n’est pas qu’un guide juridique. « On est remonté aux textes fondateurs », explique Y. Diraison. « Mais on a aussi relever les contradictions entre les textes et donné notre interprétation » avec l’optique de « montrer que le contrat laisse des espaces de liberté aux établissements ». L’ouvrage fait donc une lecture qui invite les chefs d’établissement à user de leur marge d’autonomie. » Yann Diraison en donne des exemples. Si un texte de 1960 demande au chef d’établissement de faire valider l’organisation de l’établissement et les emplois du temps, la loi Censi de 2005 donne au chef d’établissement le droit de faire les emplois du temps. Par conséquent, pour Y Diraison, celui-ci peut organiser l’année et la semaine à sa guise pour peu qu’il respecte les volumes annuels des différentes disciplines. « On veut que les chefs d’établissement se posent la question de travailler autrement et sachent qu’ils peuvent oser le faire. On n’est pas porteur de dérégulation », poursuit-il, « mais le système éducatif s’asphyxie progressivement à appliquer uniformément des règles qui ne sont pas forcément adaptées à la situation de l’établissement. Il faut laisser les établissements respirer ». Certains établissements catholiques n’ont pas attendu cet ouvrage pour prendre les devants et inventer de nouveaux temps scolaires.
Cette propension à l’autonomie inquiète les syndicats. « Le secrétaire général sait très précisément ce que nous pensons de cet ouvrage », explique Bruno Lamour, secrétaire général de la Fep Cfdt, premier syndicat du privé. « C’est une source potentielle de conflit car il mélange réglementation et interprétation ». La Fep relève que le SGEC tranche toujours au bénéfice des chefs d’établissement. Par exemple sur l’interprétation des circulaires pour la nomination dans un établissement privé. Pour Luc Viehe, secrétaire général du Spelc, un autre syndicat du privé, « l’autonomie des établissements est présentée comme une panacée. Elle permettrait, si elle était accordée par l’Etat, d’adapter dans une certaine mesure le service des enseignants en fonction des décisions du chef d’établissement… Cela nous fait craindre une précarisation de leur situation ».
Yann Diraison nie toute arrière-pensée en ce domaine et souligne que le Sgec prêche la consultation auprès des chefs d’établissement. Il rappelle que le livre a été décidé il y a deux ans dans un contexte différent. Mais les chefs d’établissement sont-ils tous à même de différencier leur capacité à annualiser les enseignements du droit d’annualiser les services à un moment où cela arrangerait bien l’institution ? Ce n’est pas sûr. Pour Yann Diraison, des évolutions sont souhaitables. « Les établissements ne devraient pas être évalués que sur leur respect des programmes et des horaires mais sur ce qu’il ont fait des élèves qui leurs sont confiés ». L’ouvrage est déjà en cours de réédition.
François Jarraud
L’établissement associé : l’autonomie au service de l’intérêt général, SGEC 2011.