Par François Jarraud
Est-il possible de réformer le lycée français ? A l’évidence, non ! Le texte présenté le 13 octobre par Nicolas Sarkozy est davantage un enterrement, celui du rêve d’un nouveau lycée démocratique, qu’une naissance. Ceux qui attendaient une véritable réforme du lycée restent sur leur faim. Ceux qui espéraient des avancées significatives sur au moins un des points noirs des lycées sont aussi déçus, tant il apparaît que les solutions proposées ont une efficacité nulle ou fortement réduite.
Le président promet de rééquilibrer les filières. Mais son projet se limite en fait à la modification des contenus d’enseignement de la seule filière littéraire. Pourra –t-on rendre celle-ci plus attractive uniquement en améliorant le niveau de langues ou en développant une branche « loisirs » ? On évite au moins de cette façon une réflexion d’ensemble sur les enseignements de base à donner au lycée…
Le président promet davantage d’égalité et de suivi personnalisé. Mais l’accompagnement des élèves est déjà présent dans les lycées à travers les heures de module et d’aide individualisée à hauteur de 4 heures hebdomadaires. Comment le nouvel accompagnement va-t-il se matérialiser ? Il est probable qu’il remplace ces deux dispositifs, d’ailleurs souvent dévoyés. Sera-t-il suffisant pour réduire les inégalités scolaires ? Le président de la République a d’emblée en début de discours fermé la porte à tout aménagement des contenus d’enseignement et des pratiques pédagogiques. On reste donc dans la philosophie des béquilles pour élèves faibles tel que cela est pratiqué au primaire et au collège. L’efficacité de ces dispositifs reste à démontrer.
Le président promet une meilleure orientation. La question du redoublement qui pourrit effectivement le système scolaire français du haut en bas, et qui n’est traitée ici que dans les années où elle est moins criticable, peut difficilement trouver de solution dans un stage de remise à niveau durant un mois d’été. Ce que montrent justement les études sur le redoublement c’est que n’est pas parce qu’on refait le programme qu’on règle les difficultés de l’élève. La solution résiderait plutôt dans un véritable travail d’accompagnement durant l’année scolaire. Les stages passerelles sont une idée mieux adaptée à condition d’être très vigilant sur le processus de réorientation lui-même de façon à le mettre au service du seul élève. A défaut on aura seulement donné un nouvel outil de tri dans les établissements et renforcé l’élitisme.
Finalement, avec un texte aussi limité, N Sarkozy enterre la réforme des lycées. Il aura fallu deux années de détermination gouvernementale, de négociations, de crises pour aboutir à un texte aussi modeste, qui ne retient du rapport Descoings que les mesures les plus limitées. Pour un moment encore, le local sera plus beau que le national.
Réformer le lycée : un dossier