Vincent Peillon réunit le 6 décembre le Conseil supérieur des programmes. Dans une lettre adressée à Alain Boissinot, président du Conseil supérieur des programmes (CSP), que le Café pédagogique s’est procurée, Vincent Peillon détaille ses instructions pour les nouveaux programmes au collège et à l’école. Il confirme au collège la mise en place de nouveaux temps pour les équipes pédagogiques.
Un CSP indépendant ?
Créé par la loi d’orientation et de refondation de l’école, le CSP est présidé par Alain Boissinot, ancien recteur et directeur de l’enseignement scolaire. Composé de 18 membres, 8 parlementaires et 10 experts désignés par le ministre, le Conseil supérieur de l’éducation est paritaire conformément à la loi d’orientation. Parmi les autres membres nommés par le ministre, Marie-Claude Blais est une philosophe auteure d’ouvrages sur la philosophie politique de l’éducation. Xavier Buff préside la section mathématiques au Conseil national des universités. Agnès Buzyn est professeur de médecine. Eric Favey est secrétaire général de la Ligue de l’enseignement. L’inspecteur général Roger François Gauthier est un spécialiste des programmes. Denis Paget est un ancien co-secrétaire général du Snes. Sylvie Plane, agrégée de grammaire, professeure en IUFM a des responsabilités au Snesup. Directrice de recherches au CNRS, Agnès Van Zanten est un sociologue de l’éducation renommée. Les assemblées ont désigné 8 membres du CSP. L’Assemblée nationale a nommé Luc Belot et Sandrine Doucet, députés PS et Annie Genevard, députée UMP. Le Sénat envoie au CSP des personnalités plus connues dans l’éducation. Jacques Legendre suit les questions d’éducation à l’UMP depuis des années. Marie Christine Blandin, vice présidente du groupe écologiste du Sénat, a été très active dans les débats de la loi d’orientation. Jacques Bernard Magner est membre socialiste de la Commission éducation. Le CESE a nommé Marie-Aleth Grard, vice présidente d’ATD Quart Monde et André Leclercq, vice président du Comité olympique français.
Les missions du conseil
Le CSP « émet des avis » et « formule des propositions » sur « la conception générale des enseignements dispensés » de l’école au lycée, « l’introduction du numérique », « le contenu du socle commun » en veillant à la cohérence des programmes. La loi d’orientation précise que » afin d’avoir une vision globale des programmes et de leur articulation avec le socle commun, le conseil devra organiser ses réflexions, non seulement par grand domaine disciplinaire mais aussi par cycle, afin de garantir une cohérence interne forte en termes de connaissances, de compétences et d’apprentissages à chaque cycle ». Il doit aussi décider de la validation du socle ce qui revient à lui donner un droit de regard sur les examens, y compris le bac. Le CSP aura aussi son mot à dire sur le « contenu des épreuves des concours de recrutement d’enseignants ». C’est dire que le CSP sera au centre de toutes les politiques ministérielles et de toutes les tensions entre les acteurs de l’Ecole. Alors que le Haut Conseil de l’Education, qu’il remplace selon la loi », se bornait à un rapport annuel, le CSP aura à préparer de nombreux avis sur des sujets très variés.
Les instructions de V Peillon
Le ministre demande que les nouveaux programmes soient « plus favorables à la réussite de tous les élèves ». Ils doivent « prendre en compte de manière réaliste le temps dont disposent les enseignants ». Le ministre entend probablement des programmes moins chargés et donc qui laissent plus de liberté et de marge aux enseignants pour suivre les instructions. V Peillon veut aussi des programmes lisibles par les parents . Ce souhait avait été porté également par la droite mais il se heurte au fait que l’école ait évolué. Du coup les parents ne s’y retrouvent pus dans les termes grammaticaux ou dans la conception même de certaines disciplines qui ont beaucoup changé. Comment y remédier sans revenir sur les évolutions scientifiques ?
L’articulation avec le socle devient une obligation alors que jusque là le socle était très secondaire. Il appartient au CSP de définir le socle. Autre changement structurel, les programmes devront être conçus par cycles et faciliter l’interdisciplinaire.
L’évaluation va devenir une entrée essentielle des programmes. C’est qui pilotera le travail des enseignants. « Des niveaux d’attendus pourront être définis en cohérence avec les modalités d’évaluation que vous établirez », dit la lettre de V Peillon.
Maternelle et surtout collège
En maternelle, le document demande à revoir la partie « devenir élève » et à préciser le sens des activités selon une demande des enseignants.
Au collège, le ministre souhaite « que des temps d’accompagnement pédagogique puissent être introduits au sein des enseignements que vous identifierez comme prioritaires… Un volant d’heurs professeurs sera alloué à chaque niveau pour donner aux équipes davantage d’autonomie ».
Une nouvelle conception des programmes ?
V Peillon souhaite encourager l’interdisciplinarité dans les programmes. La nomination de RF Gauthier au CSP devrait amener le CSP à réfléchir d’abord à l’écart entre programme et curriculum. « Le curriculum renverse la logique des programmes habituelle », nous avait dit A Boissinot. « C’est une vision plus haute qui décline les disciplines en partant du parcours d’apprentissage des élèves ». Les programmes à la française sont fragmentés, annuels, ils ne se justifient pas par rapport à un projet éducatif. Ils sont très limités, sans référence au x modes d’évaluation, aux outils pédagogiques à employer. Le curriculum c’est une prescription qui a un caractère systémique et qui inclut la formation des enseignants, la gestion de la classe etc. Avec le curriculum, la mise en œuvre du programme sort de l’implicite et devient le fruit d’un travail collectif dans l’établissement », nous disait Roger-François Gauthier , directeur d’un excellent numéro de la Revue de Sèvres sur le sujet. C’est cette vision incluant l’évaluation que l’on perçoit dans les instructions ministérielles.
F Jarraud