Par Fred Yvetot
Mardi 18 janvier 2011, Un « nouveau » projet de circulaire de missions des professeurs documentalistes voyait le jour, envoyé par la Dgesco à la Fadben et aux syndicats. Il n’est pas nécessaire de rappeler que la circulaire actuellement en vigueur date de 1986 et qu’elle est largement dépassée. Cependant, il est peut-être utile de rappeler que trois tentatives d’actualisation ont été menées en mai, juin 2010.
Petit rappel des faits
Sur le site de Docs pour Docs, les différentes étapes de l’actualisation du projet de circulaire sont retracées, de l’envoie de la première proposition jusqu’à l’annulation de la réunion du 29 juin 2010. En mai 2010, Fadben et syndicats avaient été invités par la Dgesco à participer à une réunion de travail sur l’actualisation de la circulaire de missions des professeurs documentalistes. Un premier projet avait été proposé. Évidemment quelques points posaient problème. Le rôle pédagogique et éducatif du professeur documentaliste était notamment minoré et passait après la politique documentaire. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si l’intitulé de ce premier projet était « Politique documentaire des établissements scolaires et mission des professeurs documentaliste »… à noter, « mission » au singulier ! Un contreprojet avait alors été rédigé par la Fadben et les syndicats réunis.
Fin mai et début juin, un second puis un troisième projet étaient envoyés par la Dgesco. Il y avait toujours quelque points problématiques, néanmoins les négociations suivaient leurs cours… jusqu’à l’annulation de la réunion, par la Dgesco, de la réunion programmée avec l’intersyndicale et la Fadben.
Et puis il y a eu les vacances d’été, la rentrée et plus aucune nouvelle du projet, silence total. Fin décembre 2010, la Fadben et l’intersyndicale écrivaient donc au directeur de la Dgesco pour demander la reprise des travaux d’actualisation de la circulaire. Visiblement la Dgesco n’a pas du tout besoin d’eux puisque, le 18 janvier, la Dgesco envoie cette 4ème version du projet sans aucune concertation.
Sur le site de Docs pour Docs
http://docsdocs.free.fr/spip.php?breve554
http://docsdocs.free.fr/spip.php?breve506
Une « nouvelle » version du projet ?
Mais en fait, en y regardant de plus près, cette 4ème version ressemble étonnement à la seconde, seconde version qui aurait subi quelques petites modifications et aurait été joliment mise en page, fin prête pour le Bulletin Officiel ! Il ne manque plus qu’à mettre la date et le numéro du B.O. !
Il s’agit donc d’un retour en arrière puisque l’actuel projet fait fi des remarques qui avaient conduit à la rédaction de la troisième version. La Fadben a mis en ligne un document reprenant les deux versions de ce deuxième projet : la version de juin 2010 et celle de janvier 2011. Ce document a l’avantage de montrer quelles sont les subtiles modifications apportées. Chaque mot, chaque formulation a son poids ! Vaut-il mieux que le professeur documentaliste assure ou qu’il contribue à la formation de tous les élèves à la culture et à la maîtrise de l’information ? Vaut-il mieux parler de « formation» ou « d’enseignement » ?
Sur le site de la Fadben
http://www.fadben.asso.fr/spip.php?article136
Des délais limités
Il semble qu’un avis extérieur ne soit pas réellement désiré par la Dgesco puisqu’elle demande une retour pour le 24 janvier… cela laisse vraiment peu de temps pour la Fadben et l’intersyndicale ! Syndicats et associations de professeurs documentalistes s’accordent pour dire que les délais sont un peu juste. Six jours (week end compris !) pour s’approprier le texte et en discuter n’est pas suffisant quand on sait quelle importance a une circulaire et quels sont les enjeux pour notre profession. Cela serait-il une manière de publier le texte sans laisser le temps de réagir ? Le Snes lance donc une pétition dénonçant, bien sûr, le texte inacceptable à son goût mais dénonçant aussi ce calendrier et ce manque de discussion.
Sur le site du Snes
http://www.snes.edu/Nouveau-projet-de-circulaire-de.html
Un regard sur cette circulaire
Sur le site des Trois Courronnes, L’Andep (Association Nationale des Documentalistes de l’Enseignement Privé) propose une synthèse reprenant les éléments de ce « nouveau » projet ainsi que les différents apports du SNES et de la Fadben. La présidente y dénonce la réduction de l’autonomie et de la responsabilité pédagogique du professeur documentaliste. La mission pédagogique du professeur documentaliste est cadrée, balisée, peut-être trop étroitement, laissant peu de place à l’initiative. Les limites sont clairement définies notamment par le b2i, le socle commun et le Pacifi. Car celui-ci fait son entrée dans la circulaire, et par là même, devient texte de référence dans la progression des compétences info-documentaires. Dans ce projet, associé au Pacifi, l’activité du professeur documentaliste est étroitement liée aux disciplines, il collabore, il contribue, parce que la formation à l’information est présente partout, dans chaque discipline, dans tous les programmes. Mais la dimension d’enseignement ou d’apprentissage ne sont pas du tout mise en avant.
De plus, la culture numérique n’est à aucun moment abordée. On y parle bien de ressources numériques, ou d’environnement mais le texte ne mentionne pas les apprentissages info-documentaires liés à cette culture numérique. Il n’est pas suffisant de former les élèves à l’utilisation des outils ou à une maîtrise technique de l’information car à quoi cela sert-il de former à une technique alors qu’elle sera dépassée rapidement ? Les professeurs documentalistes n’apprennent pas uniquement à faire ! Et dans cette circulaire, il n’y a rien de tout ça !
Vous trouverez également un entretien avec la Fadben dans l’Expresso du 25 janvier 2011.
Sur le site des trois courronnes
http://esmeree.fr/lestroiscouronnes/idoc/blog/synthese-reflexions[…]
Sur le site du Café Pédagogique
http://cafepedagogique.studio-thil.com/lexpresso/Pages/2011/01/2501profsdocsFADBEN.aspx
Un travail de Titan
C’est en lisant ce projet, que l’on peut mesurer l’étendue du travail du professeur documentaliste, le nombre, la variété et la diversité de ses missions. Mais, dans la réalité, ces missions sont difficiles à mettre en place. Qui serait capable de contribuer à la formation de tous les élèves à la culture et à la maîtrise de l’information, de mettre en oeuvre la politique documentaire de l’établissement, d’être un acteur essentiel de la gestion et de la diffusion de l’information au sein de l’établissement, et enfin de participer à l’ouverture culturelle de l’établissement sur son environnement éducatif, culturel et professionnel… et tout ça avec trente heures (plus six !) par semaine, en voyant défiler les classes et la multitude d’élèves dans les CDI ? Quel est l’intérêt de décrire des missions fourre-tout si les moyens humains ne le permettent pas ?