Le dispositif d’aide personnalisée a été lancé en cette rentrée par le ministre, et les réactions d’enseignants ont été aussi nombreuses que variées. Pas facile de faire déjà un bilan, mais au fil des mois on commence à se faire une idée, sur le terrain. Eparpillement, injonction, abolition du social, indices d’abord positifs avant de se dégrader au fil des mois : le GFEN a décidé de faire de la question de l’aide le fil rouge de ses deuxièmes rencontres, avec différents angles d’attaque, du point de vue pédagogique, sociologique, psychologique, mais aussi du travail de l’enseignant.
De qui parle-t-on ? Les élèves faibles en lecture sont identifiés par les études internationales et les évaluations nationales, qui constatent des écarts importants selon les territoires, selon les écoles. Une récente étude de la DEPP (08.38) indique que la situation se dégrade essentiellement pour les élèves des milieux populaires. « C’est donc autour de la réduction des inégalités que se situe la mission essentielle de l’Ecole, et l’école n’y parvient plus ».
Bruno Suchaut, pour l’IREDU, est chargé de faire un point sur la question de fond des «politiques éducatives ». Il attaque franchement : « En France, il est d’usage qu’on expérimente sans évaluer les expérimentation ». L’aide existe sous diverses formes, depuis une vingtaine d’années : moyens spécifiques en heures d’enseignement pour organiser des dispositifs, développement de l’accompagnement éducatif à côté de l’école, RASED, incitation aux changements de pratiques (cycles, différenciation, PPRE, aide personnalisée…). L’aide est à tous les étages, sur le temps scolaire, péri- et extrascolaire.
L’aide personnalisée mise en œuvre depuis quelques mois sera-t-elle évaluée ? Est-ce possible ? Le ministère en prendra-t-il le risque ? L’histoire prouve que la culture français en la matière est faible : les dernières évaluations sur les ZEP sont anciennes ; celles sur les RASED ne permettent pas de conclusions générales et engagent à aller regarder dans le détail des pratiques les conditions de l’efficacité ; celles sur le tutorat montrent que l’efficacité est surtout forte pour les étudiants assidus. Sur l’accompagnement à la scolarité, on a surtout mesuré l’importance de l’implication des parents.
Mais derrière les spécificités des dispositifs, c’est surtout sur les conditions de l’apprentissage qu’insistent B. Suchaut, qui ne sont pas différentes dans et hors la classe : « ce qui compte, selon nos études, est multifactoriel : avoir des attentes positives envers tous les élèves, mais aussi s’obliger à une gestion rigoureuse des activités et du temps, tout en s’attachant à comprendre les mécanismes d’implication de l’élève dans les tâches scolaires. C’est d’abord dans la classe que cela s’organise, même s’il est impératif de penser l’articulation entre les différents temps de l’enfant… »
Jacques Bernardin propose donc de retourner la question : « Et si nous avions à apprendre de ses jeunes « mal partis » sur les obstacles à l’apprentissage, en nous obligeant à d’autres chemins pour notre métier, pour mieux comprendre la relation au savoir ? «
C’est pourquoi il invite les participants, assis comme ils le peuvent dans l’amphi trop étroit, à se répartir dans les ateliers. Pour les participants, un autre moyen d’entrer dans la controverse et les apprentissages, en se relevant les manches ou en se bousculant les neurones…